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CHEIKH NIANG, SOCIOLOGUE : " Nous Avons Besoin Des Homosexuels "

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CHEIKH NIANG, SOCIOLOGUE : " Nous Avons Besoin Des Homosexuels "

Comment devient-on homosexuel au Sénégal ? Comment sont organisés les homosexuels ? La pratique, bannie par une bonne frange de la population, est-elle si nouvelle que ne le croit une certaine opinion ? Qu’est-ce qui explique la répression dont ils sont l’objet au Sénégal ? Dans le contexte marqué par l’affaire des  homosexuels de Mbao, dont le verdict est attendu ce lundi, nous avons interrogé un spécialiste du phénomène de l’homosexualité, pour mieux le comprendre. Cheikh Niang est enseignant à l’Institut des Sciences de l’Environnement (ISE) à l’Université Cheikh Anta Diop. Disciple de feu Cheikh Anta Diop qui a encadré sa Thèse de troisième cycle, ce Sociologue est professeur visiteur dans beaucoup d’universités Américaines et également chercheur bien connu à travers le monde. Conseiller technique temporaire pour  les programmes de l’Onusida, Cheikh Niang met, dans cet entretien qu’il a bien accepté de nous accorder, les pieds dans le plat. Et sans détours, ni censure. 

Est-ce que vous avez une idée précise de l’ampleur du phénomène de l’homosexualité au Sénégal ?

J’ai fait plusieurs études sur l’homosexualité au Sénégal. Mais ce ne sont pas des études quantitatives Donc, on n’a pas une idée de la fréquence du phénomène. Pour cela, il faudra des sondages, une autre méthodologie de recherches. Ce qu’on a fait, ce sont des études essentiellement ethnographiques et qualitatives qui expliquent que le phénomène existe.

Y a-t-il donc des difficultés pour mesurer le phénomène ?

C’est essentiellement une question de méthodologie. Cela demande beaucoup de moyens pour organiser une recherche dans ce domaine. On peut mener un travail au niveau du concept théorique. De la manière de l’opérationnalité. Ce n’est pas quelque chose d’incontournable. On peut le faire. Mais on n’a pas eu les moyens de le faire. Ce sont des sujets sur lesquels on n’a pas encore une littérature abondante pour le moment, il faut commencer toujours par une recherche qualitative. Ensuite, vous passez à autre chose, si vous en avez les moyens. À l’état actuel, nous n’avons pas une idée de la mesure du phénomène.

Mais vous savez quand même comment se manifeste le phénomène ?

Nous savons que le phénomène existe. Nous essayons de voir comment il est socialement construit. C’est-à-dire, comment il est articulé à la société de manière globale. C’est à partir de ce moment que nous allons, en plus de l’analyse sociale et culturelle, avoir recours à une analyse historique. Si on se réfère à la documentation existante, on peut voir qu’il y a des travaux, notamment ceux de chercheurs qui ont voyagé en Afrique de l’Ouest à la fin des années 1800, comme Toxier. Vous avez les travaux des historiens et ethnographes comme Crowder. Ce dernier a séjourné au Sénégal dans les années 50. Vous avez une littérature relativement fournie.

Tous ces chercheurs ont étudié le phénomène de l’homosexualité au Sénégal ?

Ils ont montré qu’il y a des hommes qui avaient des relations sexuelles avec quelques hommes, des hommes qui s’habillaient en femmes. Crowder indique que, dans certains endroits à Dakar, dans les années 50, il y a des hommes qui s’habillaient en femmes.

Dans quels endroits précisément ?

Il parle de la place Protêt qui est devenue plus tard la place de l’Indépendance. Il indique un circuit de drague où il y avait des jeunes homosexuels. D’un point de vue anthropologique, c’est un phénomène très récurrent qu’on va retrouver dans beaucoup de sociétés africaines.

Ce sont ceux-là qu’on appelle les Goordjigeen ?

Bien sûr. Les Anglais parlent de Cross dressing. Les hommes vont porter les habits de femmes. Ce qui va être associé à l’homosexualité. Mais, dans certains cas, cela ne va pas être associé à de l’homosexualité. Mais, le concept lui-même, que l’homme devienne une femme à un moment donné, renvoie à une autre construction de masculinité et de la féminité. Crowder va remarquer ce phénomène. Il va décrire des lieux où se rencontrent des homosexuels. Des lieux de drague pour des hommes qui ont des relations sexuelles avec d’autres hommes. Il va dire que les vieux musulmans décommandent cette pratique. Mais, il dit qu’il y a un trait particulier aux Africains : ils ont une large tolérance. Ils peuvent désapprouver moralement un comportement, mais ne pas recourir à la violence physique contre ce comportement qu’il dénonce.

Comment donc était organisée cette tolérance à l’homosexualité ?

Il s’agit de la tolérance à l’homosexualité, à la diversité sexuelle. Comment la diversité sexuelle est organisée, comment elle est gérée, quels sont les facteurs de régulation qui font que vous n’avez pas une violence systématique d’élimination des gens qui ont un comportement sexuel différent ? Cela a été bien réglé dans nos sociétés à l’époque. Maintenant, il y a des niveaux de lecture qui font que, pour le commun des gens de la rue, le jeune ne va pas avoir accès à cette information. L’information est gérée de sorte que l’exception sexuelle existe et les gens le savent. Vous allez dans certains coins du Sénégal, vous n’avez pas idée quand vous dites nous allons enfermer des homosexuels. On va vous dire que vous allez enfermer tout le monde. Ou, dans chaque famille, vous allez prendre quelqu’un.

Dans certaines zones du Sénégal ?

Vous savez très bien que dans les villes de Saint-Louis, par exemple, Gorée et Rufisque, à un moment donné, il y a une grande culture d’acceptation de l’homosexualité. Une culture de tolérance vis-à-vis de l’homosexualité. Les homosexuels vont jouer des rôles importants avec les femmes. Quand le Président Léopold Sédar Senghor se battait contre Lamine Guèye, ils avaient besoin de femmes leaders qui vont jouer un rôle important dans la mobilisation sociale des deux côtés. Cette capacité de mobilisation des femmes sur le terrain politique, c’est un détail typique des organisations sociales en Afrique de l’Ouest. Ce n’est pas par hasard que la zone de Saint-Louis était sous l’influence du Walo, que ce Walo soit dirigé par des femmes pendant longtemps. Et qu’il y a des réseaux de femmes qui vont avoir des pouvoirs décisionnels et des pouvoirs politiques extrêmement importants. Depuis Blaise, quand il y a un vote, ce sont les femmes qui constituaient la force de mobilisation, d’influence des électeurs.

Vous voulez dire que les homosexuels participaient activement à la politique ?

Mais oui. Les femmes leaders, qui menaient les grandes mobilisations sociales, avaient autour d’elles des homosexuels. Il y avait systématiquement des homosexuels qui habitaient dans leur cour. Il faut savoir que quand Senghor est entré à Saint-Louis pour déraciner Lamine Guèye, il a été accueilli par des femmes et par des homosexuels, qui ont organisé toute la mobilisation. C’est tellement ancré dans la culture que vous allez entendre des mots comme «Mbakalou Goordjigen». C’est même jusqu’au niveau culinaire. Cela ne veut pas dire que c’est un mode de vie sexuel qui est à promouvoir pour l’ensemble de la société. Mais, cela veut dire qu’il y a des moments où l’on gère la diversité. Où tout le monde ne fait pas la même chose de la même manière. Cette conception a une dimension spiritualité. Celui qui n’est pas comme les autres, c’est celui qui prend sur lui les fautes, les tares, la malédiction qui permettra de protéger les autres. C’est pourquoi, on ne tue pas les fous. Chercher la pureté, c’est éliminer tout ce qui est différent. Alors que la quête de la pureté fragilise notre société. Elle vous rend vulnérable.

Comment ça ?

Si vous n’avez pas de microbes dans votre organisme, vous mourez à la première attaque microbienne.

Vous voulez dire qu’on a besoin des homosexuels ?

 Vous avez besoin des microbes. Vous avez besoin des maladies. Vous avez besoin d’être confrontés à ce qui est différent de vous. Votre société à besoin de cela pour exister. En ce sens, nous avons besoin d’eux. La diversité sexuelle, le fait qu’il y ait différentes formes d’orientations sexuelles, c’est un phénomène anthropologique qui a existé dans toutes les sociétés.

On accuse les homosexuels de participer à la perversion des jeunes, c’est quand même différent de ce que vous expliquez ?

 C’est possible que ce phénomène existe tel que vous le décrivez. Je ne l’ai pas encore documenté. Je travaille sur cela. Je ne suis pas encore arrivé à cette conclusion. Je ne l’écarte pas. Tout comme il y a des femmes qui recrutent des filles et en font des prostituées. Le problème du commerce sexuel, c’est un délit. Ce n’est pas un phénomène particulier aux homosexuels. Maintenant, les choses sont devenues plus visibles. Cette codification du discours est en train de disparaître. Vous avez un langage beaucoup plus crû qui fait que ce genre de tabou du langage a disparu.

Ce glissement est lié à quoi ?

Ce glissement est lié à des changements culturels. Parce que nous allons prendre comme discours de référence, le discours scientifique. Le discours scientifique va poser, comme postulat, la recherche de l’objectivité. Alors que, dans nos sociétés, la manière de transmettre le savoir et celle d’organiser le discours utilisent le code, le non-dit, l’implicite la métaphore. Parce que ce sont des sociétés exclusives, en même temps qu’elles doivent protéger un certain nombre d’oreilles qui n’ont pas encore cette préparation. Ce discours moderne, qui fait qu’on va parler des choses crûment, a rendu le phénomène plus visible. Ensuite, le sensationnel intéresse les gens. On peut connaître une chose, mais dès que les médias en parlent, ça intéresse les gens. Je ne sais pas si le phénomène a augmenté.

Et l’impact de l’Europe sur la pratique homosexuelle locale, vous ne voyez pas de lien ? En Europe, le phénomène se manifeste différemment, il y a les Gay Club, les homosexuels s’assument ouvertement dans les médias ?

N’oubliez pas que l’Europe a des siècles de répression de l’homosexualité. Ce sont des gens qui étaient envoyés au bûcher. Des gens qui étaient torturés, exécutés en prison. La reconnaissance des homosexuels est relativement récente. Même en Europe. L’histoire doit nous apprendre quelque chose. La répression ne sert à rien en matière de changement de comportement. La répression criminelle, la répression physique ou la violence physique ne servent à rien. Si cela servait à quelque chose, l’homosexualité aurait disparu en Europe et en Amérique. Parce que le niveau de violence physique contre les homosexuels en Europe n’a pas existé dans nos sociétés. Non seulement cela ne sert à rien du tout, mais c’est très dangereux.

En quel sens ?

D’abord, c’est très dangereux par rapport à la prévention du Vih-Sida.

Comment ?

Quand nous avons commencé nos études sur l’homosexualité depuis les années 2000, nous soupçonnons, à l’époque, que la prévalence au Vih serait certainement plus élevée dans le groupe des homosexuels. Parce qu’il n’était pas intégré dans la réponse. Ils vivaient dans des conditions de vulnérabilité. Nous avons fait un certain nombre d’études. Par la suite, les recherches épidémiologiques ont montré qu’effectivement, la prévalence est beaucoup plus élevée chez cette catégorie que la population en générale. Si la prévalence est très élevée chez eux, c’est qu’ils sont dans une situation de vulnérabilité plus grande et d’exclusion. Nous avons, sur la base de nos travaux, essayé d’influencer le programme national de lutte contre le Vih pour intégrer cette dimension. Parce que si vous ne l’intégrer pas, c’est votre société tout entière qui aura des problèmes. Les gens sont en interaction dans la société. Il faut voir les problèmes globalement pour avoir des solutions globales. Si un groupe est ignoré, c’est l’ensemble qui est menacé. Nous nous sommes battus pour que le Pnls intègre ce projet. Le Sénégal a joué un rôle pionnier dans l’intégration des homosexuels. Non seulement pour la prévention, mais aussi pour la prise en charge. Cela posait beaucoup de problèmes. Vous ne pouvez pas imaginer le nombre d’heures que j’ai passé dans ce bureau pour convaincre des homosexuels que je pensais être malades pour avoir les traitements anti-rétroviraux qui étaient gratuits. Les gens avaient peur de la stigmatisation dans les hôpitaux. Ils ont peur de la violence contre eux. Il nous a fallu convaincre le programme pour former des médecins pour qu’ils aient des attitudes non-stigmatisantes qui permettent aux homosexuels de venir prendre leurs médicaments. Quand je faisais les premiers Focus groupes avec les homosexuels dans mon bureau, ils regardaient s’il n’y avait pas de micros cachés.

Au Sénégal, il y a quand même 95% de musulmans ?

D’accord ! J’ai sous les yeux un ouvrage qui parle de l’Islam et l’homosexualité. Je ne suis pas sûr dans les pays Arabes qu’il y ait moins d’homosexuels. Mais ils gèrent cela dans la discrétion. Généralement nous sommes très forts à montrer exclusivement, ce qui ne va pas dans nos sociétés. Mais on ne montre pas comment nos sociétés gèrent les choses à côté de ce qui ne va pas. Vous avez vu un grand scandale contre les homosexuels dans les pays Arabes. Il y a tellement de travaux ethnographiques qui montrent les pratiques homosexuelles dans les pays Arabes. Il y a le Yémen, le sud de l’Arabie Saoudite. Il y a les « Canites ». Ce sont des gens efféminés qui autrefois s’habillaient en femmes. Maintenant ils ne le font plus. Mais ils trouvent toujours un petit élément pour montrer leur orientation sexuelle. Ils sont au Sud de toute l’Arabie.

Mais l’Islam interdit l’homosexualité

Il faudrait qu’il y ait un théologien pour parler de cette question. Je parle en profane. Il y a plusieurs passages du Coran qui parlent de Lode, de Sodome et Gomor. Il y a un verset du Coran qui est très clair. Ce verset condamne l’homosexualité. Il dit que quand vous les prenez « châtiez-les ». Il faut chercher un Théologien, un Erudit pour faire l’analyse textuelle. Dans ce passage, on ne dit pas la sanction contre les homosexuels. Alors que pour l’adultère, il y a des sanctions qui sont prévues. Ici on a dit « Châtiez-les ». Est-ce qu’il s’agit d’une condamnation verbale ? Le même passage dit s’ils se repentent qu’ils soient pardonnés…

Au-delà du simple fait de s’habiller en femmes, quelles sont les raisons sociologiques qui expliquent qu’un homme éprouve le besoin de s’accoupler avec un homme ?

On ne sait pas. C’est l’une des choses les plus difficiles à traiter. Et vous dire que c’est telle cause qui produit tel effet. C’est l’un des phénomènes les plus complexes à analyser. Parce que quand vous entrez dans le domaine de la sexualité, vous allez touché à la fois la biologique, la génétique, le physiologique, le social, le pchyscologique, le moral. On ne peut pas retenir un seul paramètre et penser que toute la sexualité est régie par ce paramètre.

Il paraît qu’il y a des hommes qui sont prédéterminés à être homosexuels ?

Une personne peut avoir un certain profil chrosomique  qui se traduit par un comportement efféminé. Vous la tuez, mais inéluctablement vous commettez une injustice à son égard. Vous avez aussi le cas de ces personnes qui naissent avec deux organes génitaux (mâle et féminin), et qui développent ensuite un trait féminin. On appelle ça Intersexualité, un phénomène connu dans toutes les sociétés. Vous les tuez, vous commettez là un crime. Vous commettez quelque chose de parfaitement affreux si vous tuez cette personne. Parce qu’elle n’a pas choisi d’avoir deux sexes. C’est quoi le problème ? Il y a eu des recherches approfondies sur le cerveau à la naissance pour étudier son développement. Vous savez beaucoup de choses s’expliquent par le cerveau. On  se rend compte aujourd’hui des différences de fonctionnement entre le cerveau de l’homme et le cerveau de la femme, ainsi que le niveau d’intégration des neurones. Maintenant, on  se rend compte qu’il y a des différences entre le cerveau des homosexuels et le cerveau des autres hommes. Qui s’apparente d’ailleurs beaucoup plus au cerveau des femmes. Donc le facteur biologique, le facteur génétique et le facteur biologique comme élément explicatif de l’homosexualité, je ne l’exclus pas. Je ne peux pas l’exclure pour le moment.

Et le facteur social ?

Il faudra nécessairement qu’on en vienne au facteur social parce qu’il est important. Il faut savoir comment l’enfant est socialisé, comme il est éduqué etc. La société ne fait rien, en tout cas le discours officiel, ne fait rien pour intégrer ceux qui présentent une anormalité du point de vue biologique.

Et les homosexuels qui sont en haut, qui sont riches et protégés et qui peuvent quitter. On ne va pas enfermer ceux-là. On va plutôt enfermer ceux qui sont dans la banlieue, qui sont pauvres... Les principaux conseillers de Senghor, du moins certains de ses conseillers, étaient des homosexuels notoires. C’était connu. Et pourtant la loi existait à l’époque. 

Et peut-être aussi chez les nouveaux dirigeants ?

Je ne sais pas. Mais cela ne m’étonnerait pas qu’il y en ait. C’est un phénomène universel. Je ne regarde pas l’identité individuelle, mais le phénomène social. Dans notre enquête, on s’est rendu compte qu’on les retrouve partout. On les retrouve aussi bien chez les musulmans que chez les catholiques. Chez les cadres, les étudiants, les fonctionnaires, chez les chômeurs, dans toutes les catégories sociales et dans tous les groupes ethniques. C’est dans une enquête publiée en 2003. Cela reflète les catégories globales de la population.

A vous entendre, on a comme l’impression que vous défendez les homosexuels ?

Je vais vous dire. Il y a un certain nombre de concepts sur lesquels nous n’avons pas assez travaillé et qui renvoient à la discrétion, comme la Kersa, la sutura… Cela ne veut pas dire qu’on va balayer tout cela et se comporter comme des européens. Cela veut simplement dire qu’une société où on a une  loi pour dire que tel comportement sexuel est normal ou pas, que cela puisse mener des gens en prison, cette option-là ne peut pas être sans conséquence. Cela a des impacts au niveau de la santé publique de ces sociétés. Nous ne pouvons pas courir le risque de laisser le sida se développer ou d’autres problèmes de santé publique parce que nous avons mal géré les orientations sexuelles. Prendre en charge correctement certains homosexuels, c’est éviter la propagation rapide du Vih-sida. Ce sont ces enjeux-là qu’il faut voir.

Les homosexuels s’organisent souvent en réseaux, à quoi est dû ce phénomène, selon vous ?

En fait, vous allez dans des endroits où la société développe une certaine tolérance vis-à-vis de cette pratique – je vous ai parlé de Saint-Louis, vous allez trouver. Effectivement il y a des réseaux qui se connaissent et sont articulés aux réseaux des femmes. Il y a  d’autres réseaux plus complexes. Donc les homosexuels ne vivent pas en vase clos. Ils se protègent entre eux. Ils partagent un certain nombre d’expériences. Ce qui procède de leur équilibre sur le plan mental, psychologique. Mais ce qui est le plus important à savoir, c’est que chaque fois que vous persécutez un groupe, il développe des réflexes de survie en s’organisant. Et c’est tout à fait normal parce que le groupe ne doit à partir de ce moment sa survie, que par son organisation. Quand vous avez des gens qui ont été lynchés, qu’on a failli égorger, où l’on arrache les cadavres des morgues, cela donne l’organisation en réseaux. D’ailleurs si l’on continue comme cela, demain on aura des morts. Alors qu’est ce qu’ils font. Ils sont obligés d’entrer dans une sorte de clandestinité par ce qu’il y va de leur survie. Il faut arrêter cette violence. Il faut arrêter cette impunité. Il faut arrêter ce transfert d’agressivité. Le Sénégal a suffisamment de problèmes pour qu’on se mette à discuter sur qui est homosexuel, qui ne l’est pas. Nous avons d’autres défis à régler, qui sont des défis de développement et de lutte contre la pauvreté. Et puis nous avons cette capacité que nous ont léguée nos ancêtres, grands-parents etc, qui est une capacité de compassion traduit dans le concept de Yeurmandé. En disant par exemple que c’est Dieu qui règle son problème avec le croyant, le problème ne se pose plus comme certains veulent le poser. On n’a pas le droit de tuer une personne que Dieu a faite. Je ne peux pas assister au massacre d’un groupe avec des arguments aussi légers que ceux qu’on avance. Je ne peux pas accepter cela.

On va vous poser une question que l’opinion pose généralement à ceux qui défendent l’homosexualité. Si votre fils…

Il coupe… Attention, je ne défends pas l’homosexualité, j’essaie de la comprendre. Maintenant si mon fils était homosexuel, il est possible que cela me choque. Vous savez, les hommes, dans leur relation hétérosexuelle ont une construction de la sexualité qui reste en rapport avec leur conception de la masculinité et de la virilité. On a tendance à se détacher à tout ce qui est féminin, parce que le féminin représente une menace par rapport  à la perception de soi, donc de l’identité. Conséquence, cet enfant qui a une malformation génétique qu’il exprime par une certaine féminité, cela va poser problème aux parents. Vous allez même voir des pères de famille frapper leurs enfants à mort et qui vont même secrètement souhaiter que l’enfant meurt alors que cet enfant a une malformation génétique. Parfois, c’est très tôt que le distingue et se met à le battre. Je précise que cela ne veut pas dire que tous les enfants efféminés, sont rangés dans cette catégorie. Parfois c’est la mère qui le protège. Souvent, les parents de la mère qui vont dire : « on va prendre cet enfant sinon tu vas le tuer ». Cela veut dire quoi ? Cela veut dire qu’au niveau des femmes, il y a un niveau de tolérance et de compréhension de cette diversité, de cette chose anormale qu’on va prendre comme étant une création de Dieu.

Ne craignez-vous de perdre toute objectivité, vu que vous éprouvez visiblement de la compassion pour les homosexuels ?

Au cours de mes recherches, j’avais pris une distance très forte par rapport à ce phénomène. Mais au fur et à mesure, je me suis rendu compte que le phénomène est autrement plus complexe. En écoutant, en essayant de comprendre le fait, j’ai découvert énormément de choses. Et je me suis dit que la diversité sexuelle n’était pas de mon fait, pas non plus du fait du juge, mais de Dieu. Lui qui a créé le monde et les hommes. On ne peut pas se permettre de supprimer ainsi des créatures de Dieu. Je suis musulman. Je connais le Coran et je ne suis pas sûr que l’islam soit pour la liquidation. Il faut savoir comprendre les Textes sacrés. Dans l’unique verset du Coran où l’on évoque cette question, cela se termine par la Miséricorde divine. Il faut aller chercher le Savoir. Le Coran dit jusqu’en Chine. Une société ne peut pas se permettre de négliger le savoir de la recherche, dans tous les domaines. Une société marche sur deux jambes. Le sacré et la science. Et lorsque c’est bien compris, cela se rejoint parfaitement. L’islam bien compris, c’est la Science. Il y a une harmonie parfaite. Si on voit des différences, soit on ne connaît pas bien sa religion, soit on ne connaît pas bien sa science. Peut-être le mot de la fin. Je voudrais préciser que je n’ai jamais reçu un sou du Programme national de lutte contre le sida ou la Banque mondiale fait des interventions pour les homosexuels. Je n’ai jamais reçu un seul de ces organisations. Ce que je dis, ce n’est pas pour chercher de l’argent, c’est pour la vérité scientifique.



1 Commentaires

  1. Auteur

    Kouna

    En Mars, 2011 (19:35 PM)
    bakhna aitia comentaire laine do lene diogue di reupidra nga khamoul celui la merite detre lu
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