Eviter la désillusion aux jeunes Sénégalais tentés par l’aventure européenne, c’est le cri de cœur lancé par les émigrés vivant en Italie. Ils déconseillent à la jeunesse de mener des opérations suicide pour rallier l’Europe. Car les conditions de vie y sont difficiles, particulièrement en Italie.
La volonté des jeunes Sénégalais de se rendre en Europe à tout prix émeut les émigrés installés à Brescia. Cela, après que des milliers de personnes ont décidé, ces derniers temps, de braver la mer pour rejoindre l’Espagne. Ce nouveau phénomène plein de risques intrigue des Sénégalais d’Italie qui n’ont pas manqué de donner des conseils à ces jeunes obnubilés par l’envie de faire fortune en Europe. «Restez au pays et contentez-vous du peu que vous avez au Sénégal. L’Europe est un mirage.» Un conseil de Pape Diop, un ressortissant sénégalais domicilié à la résidence Prealpino de Brescia, selon qui, «il faut que les jeunes Sénégalais sachent que l’Italie n’est pas ce qu’elle était il y a quelques dizaines d’années». «Ce pays ne peut même plus satisfaire les besoins primaires de ses enfants. On ne peut plus compter le nombre d’Italiens qui chôment et qui sont dans un état pitoyable. A fortiori les Sénégalais. Il fut un temps, ce sont les autochtones qui nous proposaient du travail. On se permettait de refuser et d’attendre d’autres offres plus intéressantes», rappelle-t-il.
Mais, précise-t-il, «ce temps est révolu. On ne peut plus trouver du travail dans ce pays et les conditions d’existence deviennent de plus en plus difficiles». D’ailleurs, M. Seck qui a vécu en Italie plus de dix ans, ajoute que «l’heure est aux regrets. Chacun de nous ne pense qu’à retourner au Sénégal. Seulement, les conditions ne s’y prêtent pas. On ne peut pas faire plus de cinq ans en Europe et rentrer les mains vides». En effet, explique-t-il, les activités qui enrichissaient alors les Sénégalais sont accaparées par les ressortissants des pays de l’Est et des Indiens. De sorte que les revenus ne sont plus consistants. «Maintenant, non seulement, il faut avoir de la chance pour avoir du travail, mais les revenus servent uniquement à payer le loyer et à vivre ici dans la limite de la décence. On ne peut plus faire des économies avec ce que l’on gagne et l’image de l’Italie que les émigrés véhiculent au Sénégal est fausse. Les gens font des prêts ou gagnent des tontines pour pouvoir venir auprès des siens alors que la réalité qu’ils vivent est tout autre. On ne peut plus gagner beaucoup d’argent avec un travail licite», confie-t-il.
Ainsi, Pape Diop estime «qu’il faut dire aux jeunes ce que les émigrés vivent en Italie au lieu de leur montrer une fausse image de la vie d’ici. Les sommes qu’ils dépensent pour venir dans ce pays peuvent servir de capital». Mais, de l’avis de Oumy Sène, «la responsabilité incombe aux autorités sénégalaises qui se doivent de conscientiser la jeunesse. Rien ne vaut la vie auprès de ses parents dans la convivialité. L’Europe est une mer d’illusions et l’orgueil rend le retour difficile. On ne peut pas dénombrer les Sénégalais qui ne rentreront jamais, faute d’avoir de quoi vivre là-bas».
Toutefois, si Pape Diop et Oumy Sène déconseillent la saignée des jeunes vers l’Europe en peignant un tableau sombre de la situation qui y prévaut, Mor Mané Diakhoumpa soutient le contraire. De son argumentaire, il ressort que la vie en Italie est meilleure que celle au Sénégal. Ses raisons ? «Jusqu’à l’âge de 32 ans, je n’ai jamais pu garantir un sac de riz par mois à ma famille de Thiès. Maintenant, je donne la dépense du 1er au 30 de chaque mois. Mieux, moi, qui ne pouvais même pas m’assurer un seul repas dans mon pays, je mange jusqu’au dessert. En plus, j’ai pu avoir une femme grâce à ce que je gagne et j’ai amené mon frère. En tout cas, je préfère payer sept millions pour faire venir mon fils ici que de lui financer un business de trois millions au Sénégal», argumente-t-il.
-
0 Commentaires
Participer à la Discussion