Dépistage du VIH/ Sida à Touba : un médecin relève ’’ un véritable problème de santé publique ’’

Touba, 30 nov (APS) - Le docteur Abdoulaye Wone, point focal VIH/Sida à l’hôpital Matlaboul Fawzeiny de Touba, estime que le test de dépistage constitue un véritable problème de santé publique dans la cité religieuse de Touba (180 Km à l’Est de Dakar).

Selon lui, son acceptabilité individuelle est fortement conditionnée par la crainte du rejet, la stigmatisation et par l’environnement socioculturel de la ville marqué par l’emprise de la religion et le faible pouvoir de décision de la femme.

Considérée comme la deuxième ville du Sénégal, avec plus de 600.000 habitants, Touba a été créée en 1887 par Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, fondateur du mouridisme.

Le médecin s’est fondé sur des travaux qu’il a réalisés en collaboration avec ses confrères sur les déterminants de l’accès au conseil et dépistage du VIH/Sida dans la ville de Touba. Cette étude a concerné 299 personnes âgées de 15 à 49 ans, tirées dans la population générale.

D’après les résultats, 78,6% des enquêtés aimeraient faire le dépistage du VIH mais seulement 8,3% l’ont fait dans les 12 derniers mois et en connaissent les résultats. Ils sont 9,4% chez les hommes contre 7,6% chez les femmes.

En étudiant les facteurs prédisposant l’accès de la population générale au dépistage du VIH, signale le médecin, cette prédisposition est plus élevée chez les célibataires, les ménages de niveau socioéconomique moyen, les personnes qui ont fréquenté l’école et celles qui connaissent un site de dépistage.

‘’Le principal facteur déclenchant le recours au dépistage du VIH retrouvé dans notre étude est la perception d’un risque individuel de contracter le virus du Sida : une personne qui se croit sans aucun risque effectue moins le test de dépistage du VIH que les autres’’, a-t-il expliqué.

Le point focal VIH/Sida à l’hôpital Matlaboul Fawzeiny de Touba indique que la maladie du sida est souvent perçue de façon irrationnelle et considérée comme une malédiction d’origine surnaturelle ‘’naatu’’ (le sort) ou comme ‘’la maladie dangereuse’’ (‘’febaar bou bone bi’’, en wolof).

L’étude a également permis de noter l’inexistence d’un centre de dépistage autonome au niveau de la ville de Touba. Il a été dénombré principalement deux services de dépistage intégrés aux activités des laboratoires du centre de santé principal et de l’hôpital. Ainsi, la commodité des prestations est-elle insuffisante et les activités de promotion et de dépistage de masse absentes.

Paradoxalement, souligne Dr Abdoulaye Wone, ‘’l’environnement socioculturel particulier de la cité religieuse de Touba ne semble pas être un frein majeur à l’accès au dépistage du VIH car dans notre étude, 78,6% de la population enquêtée a affirmé vouloir faire le test.’’

Il est revenu à l’accessibilité géographique décrite comme l’obstacle majeur à l’utilisation des structures de soins. Dr Wone a indiqué que le problème de la disponibilité et de l’organisation des services de dépistage retrouvés à Touba, a été identifié à travers des études internationales dans les pays en développement comme étant un facteur limitant l’accès au dépistage.

Il a ajouté également l’impact négatif de l’absence d’activités promotionnelles et dépistage de masse décrit dans une analyse dans les pays développés. ‘’Le conseil et dépistage du VIH est un besoin exprimé par la population de Touba.’’