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Du Sénégal à Madrid, l'odyssée d'un migrant Senegalais de 52 ans

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Du Sénégal à Madrid, l'odyssée d'un migrant Senegalais de 52 ans

Comme des milliers d'autres, il a tout laissé derrière lui, pour tenter sa chance en Europe. Après sept jours d'un voyage suicidaire, Cheikh Ndiaye a débarqué aux Canaries.

 
DEPUIS SON ARRIVÉE à Madrid, le 5 août, Cheikh Ndiaye n'a qu'une obsession : obtenir des papiers en règle. A 52 ans, ce Sénégalais originaire d'un village de pêcheur proche de Dakar, a tout laissé derrière lui pour tenter sa chance dans le supposé eldorado européen. Tout comme des milliers de Sénégalais et Subsahariens, partis pour aider financièrement la famille restée au pays, Cheikh a rejoint l'Espagne en embarquant à bord d'un cayuco (une pirogue) depuis le port de Saint-Louis vers l'archipel des Canaries. Ce marin de profession jure qu'il ne recommencera plus jamais un tel «voyage suicidaire» de 7 jours. Sur les 75 personnes qui ont fait la traversée avec lui, 42 ont été transférées vers la péninsule Ibérique avec un avis d'expulsion en poche. Les autres ont été rapatriées en catimini au Sénégal, au terme de 40 jours de détention.
 
Assis à une terrasse de café dans le quartier populaire de Lavapies, Cheikh n'en revient pas de sa chance. Cheveux poivre et sel, port altier, silhouette longiligne, ce père de famille se demande pourquoi il a fait partie des heureux élus transférés vers la péninsule. Son rôle de chef dans le centre pour immigrés de l'île de Fuerteventura pourrait, selon lui, avoir joué en sa faveur. «Comme j'étais le plus âgé du groupe et que je parle un peu espagnol, j'ai été choisi pour faire le lien entre la police et les immigrés. C'est moi aussi qui organisais les groupes de cantine ou les équipes de foot.» Comme à ses compagnons de route, on lui a fait une prise de sang. Les résultats de l'analyse seraient déterminants pour la suite des événements. «Si le sang n'est pas bon, vous êtes sûr de retourner au pays», assure-t-il.
Durant ces 40 jours, Cheikh reconnaît avoir été «très bien traité» par les autorités espagnoles. «On avait des médecins, des cours sur les lois espagnoles, on pouvait téléphoner librement.» Et d'ajouter : «Les conflits ou les bagarres avaient lieu entre immigrés, pas avec la police.»
 
«Concurrence avec les latino-américains»
Un jour, alors qu'il regardait la télévision, on lui a dit de vite se préparer pour partir vers la capitale. Ils sont arrivés de nuit par groupe de cent à l'aéroport de Madrid. La police les aurait transférés dans un hôtel, où les attendait la Croix-Rouge. «Après la première nuit dans cet hôtel très confortable, on nous a demandé si on avait un contact en Espagne et on nous a permis de l'appeler. Puis, on nous a donné à chacun 30 euros, un billet de bus et on est parti librement avec notre certificat de détention du camp de Fuerteventura comme seul et unique papier d'identité», raconte Cheikh.
 
Il a trouvé refuge chez Mo- hammed, un neveu, employé à la municipalité de Madrid depuis dix ans. «Je vais l'abriter et ensuite il fera comme tous ceux qui viennent d'arriver : vendeur à la sauvette de sacs, foulards ou parfums», explique ce Sénégalais de 42 ans. Connu dans le quartier pour pratiquer «la solidarité et l'hospitalité», Mohammed ne cherche pas, devant les nouveaux venus, à embellir la réalité : «Ce n'est plus si facile pour les clandestins de trouver du travail en Espagne. Tout le monde se méfie maintenant. Et il y a une grosse concurrence avec les immigrés latino-américains.»
 
La présence en Espagne d'une forte population latino-américaine, notamment équatorienne, complique l'intégration des Africains et la législation mise en place par le gouvernement socialiste de José Luis Zapatero est plus sévère à l'égard des entrepreneurs qui emploient des sans-papiers. Il ne reste que l'agriculture, où les employeurs peuvent flirter avec l'illégalité. «Tous les immigrés attendent septembre pour descendre dans le Sud et travailler dans les serres de fruits et légumes», affirme Mohammed.
 
Aux nouveaux arrivés sénégalais, Mohammed recommande la patience. «Tous les ans, il y a des régularisations de sans-papiers. Ce qui compte, c'est d'être enregistré à la mairie et de trouver un employeur prêt à vous déclarer à la Sécurité sociale une fois le processus de régularisation ouvert.» En attendant, Cheikh va jouer la carte de la discrétion. Vendre des produits légaux, éviter les places très fréquentées du centre-ville où stationnent des cars de police. «Si on m'arrête, je montre mon certificat de Fuerteventura. Je risque au pire une journée au poste et ensuite je suis relâché», confie Cheikh. «Une fois ici, personne ne va vous expulser, car la main-d'oeuvre bon marché est très demandée», renchérit Mohammed.


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