Il est rare de voir dans le monde éducatif des enseignants et des élèves d’un même établissement tenir une conférence de presse conjointe pour la même cause : éviter à tout prix ‘le démantèlement programmé’ de l’Ecole supérieure polytechnique de Thiès. En effet, selon la section du Syndicat autonome des enseignants du Sénégal (Saes) de l’Esp de Thiès et les élèves de cette école qui faisait la fierté de toute la nation pour avoir formé des cadres de très haut niveau pour le développement, leur établissement est en voie de disparition par la seule volonté du recteur nommé à la tête de cette nouvelle université. Face à la presse, mardi, les enseignants et les élèves de l’Ecole supérieure polytechnique (Esp) qui constitue, avec quatre autres écoles d’ingénieurs (l’Ecole nationale supérieure d’agriculture (Ensa) de Thiès, l’Ecole nationale des cadres ruraux de Bambey (Encr), plus l’Institut des sciences de la terre (Ist) de Dakar) l’université de Thiès, ont soulevé les graves préjudices portés à la qualité de la formation dispensée dans cet établissement, à son projet pédagogique en retardant l’ouverture de nouvelles filières porteuses, notamment l’architecture, l’urbanisme, l’informatique et les télécommunications. Les enseignants tout comme les élèves de l’Esp sont convaincus d’une chose : ‘Un ingénieur mal formé constitue un danger pour l’économie nationale et pour la société’.
C’est pourquoi, faute de conditions idoines pour dispenser et recevoir un enseignement de qualité, ils ont décidé d’arrêter les cours au risque d’une année blanche, pourvu seulement que les autorités, en l’occurrence le ministre de l’Education et le président de la République, promulguent les textes de loi portant création de l’université de Thiès et les décrets portant sur son organisation et son fonctionnement. ‘L’université de Thiès baigne dans l’informel et dans un flou administratif parce qu’il n’existe aucun texte législatif pour sa création, son organisation et son fonctionnement’, estime Séni Tamba, enseignant et chargé des revendications de la section Saes de Thiès. Selon lui, c’est le ‘flou total’ et c’est le recteur qui gère tout et constitue à lui seul les instances de délibération, à cause de cette absence de texte de loi. Avis largement partagé par Ngor Sarr, le secrétaire général de la section Saes de l’Esp. Selon ce dernier, ‘il suffit juste d’adapter les textes’. Mouhamed Ndiaye, le président du bureau des élèves, est d’avis que ’l’université de Thiès est comme un Gie. C’est une gestion personnelle. Et c’est le recteur qui décide de tout et intervient même dans le fonctionnement des écoles’. Ce qui fait dire, encore, au responsable du bureau des élèves de l’Esp que ‘si, en cette période de l’année, les élèves décident d’aller en grève, c’est parce que la situation ne nous permet plus de continuer. Car il y a un processus de démantèlement de l’Ecole supérieure polytechnique pour en faire une Unité de formation et de recherche (Ufr)’. Ce à quoi, d’ailleurs, les élèves et les enseignants se sont opposés farouchement.
En outre, les élèves et les enseignants s’insurgent contre la volonté du recteur d’ériger l’université de Thiès sur le patrimoine de l’Ecole supérieure polytechnique. Selon eux, depuis son démarrage en 2007, l’université de Thiès ne dispose d’aucune construction. Faute de construction pour accueillir les nouveaux étudiants et les bâtiments administratifs, le rectorat occupe une bonne partie des bureaux de la direction de l’Ecole polytechnique de Thiès, l’agence comptable de l’université occupe le logement du directeur de l’Esp, tandis que les locaux pédagogiques, les résidences des élèves ingénieurs sont partagés avec les étudiants de l’université de Thiès. ‘Au résultat de tout ceci, il y a de sérieux problèmes conflictuels pour l’accès aux locaux administratifs et pédagogiques pour le corps enseignant, l’administration et les étudiants de l’Ecole supérieure polytechnique’, analyse Mouhamed Ndiaye, président du bureau des élèves ingénieurs, non sans inviter ‘les pouvoirs publics à prendre toutes les dispositions pour construire des infrastructures pour le rectorat, l’agence comptable, les salles pédagogiques et les résidences des étudiants sur un site autre que celui de l’Ecole supérieure polytechnique’.
Les élèves et les enseignants de l’Esp ont soulevé également le problème de la vétusté des locaux et des équipements de laboratoires de l’Esp depuis sa création en 1973. Face ce qu’il considère comme ‘un plan de démantèlement programmé de l’Ecole polytechnique de Thiès’, les élèves et les enseignants organisent, vendredi prochain, une marche à Dakar pour attirer l’attention de l’opinion et des autorités. Une autre manifestation de rue est prévue lundi prochain à Thiès, toujours pour la même cause.
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