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EL HADJI NDARY GUEYE - JOURNALISTE ECRIVAIN : ‘’ L’enfer que j’ai vécu…’’

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EL HADJI NDARY GUEYE - JOURNALISTE ECRIVAIN : ‘’ L’enfer que j’ai vécu…’’

Incarcéré en même temps qu’Idrissa Seck, à la Maison centrale d’arrêt et correction de Rebeuss, dans l’affaire des Chantiers de Thiès du 23 juillet 2005 au 7 novembre, le journaliste El Hadji Ndary Guèye revient, dans cet entretien, sur les circonstances de son interpellation, son séjour carcéral. Il y raconte le drame qu’il a vécu à sa sortie de prison : La mort de sa fille, prétexte du livre ‘’Un ange vient de passer’’, qu’il va publier incessamment.

M. Guèye, cela fait un moment qu’on ne vous pas entendu. Vous avez complètement disparu de la circulation. Ce qui est curieux pour le journaliste que vous êtes. Où étiez-vous passé ?


Cela ne doit pas surprendre, car après 4 mois de détention très arbitraire, on sort moralement atteint de prison. Il y a une période que l’on observe pour se reconstruire et voir quelle méthode de rechange prendre. C’est une question de temps qui est relative. C’est vrai qu’aller en prison pour des motifs virtuels, fallacieux, qui n’existent pas, peut effectivement choquer. Donc, on en sort complètement atteint. C’est la raison pour laquelle je m’étais mis au vert, en attendant d’aller un peu mieux, d’y voir un peu plus clair.

Mais entre-temps, il semble que vous êtes en train de rédiger un livre que vous allez bientôt sortir. C’est exact ?


Oui… Quand je suis sorti de prison, je vivais des moments très difficiles. Je n’avais plus de boulot.

Vous n’aviez plus eu de boulot à cause justement de votre séjour carcéral ?


Tout à fait. J’étais conseiller en communication dans une grosse boite. Avec ces incidents de parcours, je ne pouvais plus reprendre mon poste. Cela allait rejaillir sur la notoriété, sur l’image de marque de la maison. J’ai quitté et j’ai dû traverser le désert, pendant cette période. Période durant laquelle, j’ai rencontré une femme. On s’est marié et de cette union est née une fille (Fatoumata Zahra). Ma fille m’a apporté beaucoup de bonheur. Je sors donc d’une période très difficile. Tout d’un coup, je me marie et j’ai une fille. C’est si comme c’était un cadeau du ciel. Dieu me disait : ‘’je t’accorde cette fille pour égayer un peu ta vie, t’apporter du bonheur’’. Ma fille était l’épicentre de ma vie. Fatima et moi avons vécu quatre ans et demi. C’est l’âge qu’elle avait, quand elle est décédée, au mois de Mars dernier. Sa disparition a été le prétexte de ce roman qui s’intitule : ’’Un ange vient de passer’’.

Quand est-ce qu’il va sortir, ce livre dont vous parlez avec tant de passion ?


Dans une dizaine de jours, Incha Allah (l’entretien a eu lieu le ….., Ndlr)

Racontez un peu de quoi parle ce livre. Relate-t-il votre destin plutôt tragique depuis votre expérience en prison ?


Absolument. Comme le dit le dicton : ’’C’est au bout de la vieille corde qu’on attache la nouvelle’’. D’aucuns disent que le monde est vieux, mais l’avenir sort du passé. Le livre parle de l’avant et après Fatima. J’allais en France lorsque j’ai été kidnappé à l’aéroport. On m’a maltraité comme un malfrat, comme ces gens qui ont commis des bêtises et qui veulent s’échapper, s’évader du pays. Il n’y a eu ni convocation, ni mandat d’amener. J’ai été conduit à la Division des investigations criminelles (DIC) de manière très tragique. Après 48 heures, je suis allé, sans savoir pourquoi, en prison. Donc, il m’a été reproché d’avoir écrit ’’Lui et moi’’ (Ndlr : un manuscrit sur les relations entre Idrissa Seck et Me Abdoulaye Wade), d’avoir essayé de transférer des documents top secrets pour Idrissa Seck, ce qui n’est pas vrai. Et autant de choses inouïes et inimaginables. Voilà donc des motifs qui m’ont été collés et qui m’ont amené en prison pour une détention de quatre mois.

Parlez-nous de ces quatre mois passés à Reubeuss ?


C’est comme si on avait travaillé les gardes pénitentiaires au corps. Sûrement, ils avaient reçu la consigne de serrer l’étau autour de nous comme si on était des éléments dangereux. Je me rappelle des premières nuits, dans ma cellule, il y avait un garde pénitentiaire qui s’asseyait en face de moi et qui ne me quittait pas des yeux. On avait un statut spécial. Il nous était interdit de communiquer, les gens n’osaient même pas nous saluer. On sortait une fois dans la matinée et une fois dans l’après midi. Par contre, on n’avait pas le droit de dire bonjour à qui que ce soit. On interdisait aux gens de nous adresser la parole.

Idrissa Seck était où ?


Idrissa Seck et Assane Fares étaient à l’entrée de la prison. J’étais au cœur de la détention.

Aviez-vous le même traitement ?


Ah oui, on avait tous le même traitement. Tu sens le temps passer. En cellule individuelle, tu as la chance de ne pas être dérangé, mais par contre, tu sens le temps passer. Parce que tu ne parles à personne. Tu n’as que la lecture et peut-être la prière.

Pouvez-vous revenir sur la nature de vos relations avec Idrissa Seck, celles qui vous ont valu cette détention ?


Moi, je suis un ami d’Assane Farés. Je travaillais pour l’un des propriétaires de Kiréne. Même si j’ai rédigé énormément d’articles. Il m’arrivait d’avoir deux signatures dans le quotidien, Walf Fadjiri, évidemment pour le compte de l’ancien Premier ministre, il n’en demeure pas moins que j’étais l’ami d’Assane Farés.

Après la prison, espérant retrouver une seconde vie, vous êtes confronté à une nouvelle épreuve terrible : la mort de votre fille. Pouvez-vous revenir sur les circonstances de cette tragédie ?


Ma fille avait un problème de végétation, ce qui n’est rien du tout. Ce qui lui est arrivé est une première dans ce pays, un précédent. Parce que végétation, pour ceux qui connaissent, c’est à la limite, un nez bouché. Je crois qu’il ne fallait même pas une intervention, mais un curetage pour la soigner. Le jour où ma fille allait à l’hôpital, elle était toute gaie, toute joyeuse. Pour ce qui s’est passé, mon avis est qu’il y a eu une impréparation manifeste de l’intervention. Il fallait juste prendre toutes les mesures pour son déroulement. Cela n’a pas été fait. On fait une prise de sang, une analyse, c’est pour déceler des anomalies et surtout voir le temps de coagulation du sujet. J’estime que dans le cas de l’opération de ma fille, ils n’ont pas utilisé d’anticoagulants. Ma fille est redescendue du bloc avec une hémorragie. Et n’eut été ma perspicacité, elle serait passée de vie à trépas sur ce lit d’hôpital. Après trois heures de saignement inexpliqué, je suis allé voir le professeur pour le lui signaler. On l’a remontée au bloc. Elle est restée trois jours en réanimation avant de décéder, le dimanche matin. Indépendamment de l’impréparation, il y a eu ce que j’appellerai, un défaut de surveillance. Car, avant même d’être descendue, on doit s’affairer autour du patient pour voir si tout s’est bien passé.

Selon vous donc, il y a eu des négligences coupables ?


Négligences coupables et défaut professionnel.

Comment avez-vous vécu personnellement ce drame ?


C’était comme si le monde s’écroulait. C’était brutal et inattendu. Imaginez un enfant que vous amenez à l’hôpital qui est plein de vie, qui chante dans la voiture et qu’au finish, on vous dit : ‘’Venez prendre un cadavre’’. C’est une tragédie, cela vous laisse un goût de fin du monde. C’était si brutal que je n’en revenais pas.

Est-ce qu’il y a eu une suite judiciaire à cette affaire ?


Quand il y a une erreur aussi manifeste de la part d’un médecin, je crois que le chirurgien sort, on le voit dans les films, et même si l’opération a échoué, il va vers la famille et dit :’’je suis navré’’ et donne des explications de la manière la plus honnête et professionnelle possible. Ce qui n’a pas été le cas ici. Je n’ai pas revu ce médecin depuis que ma fille est redescendue du bloc.

Pouvez-vous nous parlez de ce médecin que vous avez fréquenté. Pourquoi, n’avez-vous pas porté plainte ?


Je n’ai pas porté plainte parce qu’en bon musulman, je crois que chacun va partir le jour décrété par le Seigneur. J’ai dû me convaincre et je me suis fait violence. Parce que la frontière est mince entre la faute professionnelle qui peut engendrer la mort et le décret divin. Est-ce que c’était le jour de ma fille ? Est-ce que, ce sont les médecins qui ont volé la vie de ma fille ? Cela a été, comme je l’ai décrit dans mon livre, le cas du révolté d’Albert Camus. Etre partagé entre un Dieu bon, clément et miséricordieux et la mort de ma fille. Ensuite, je me suis dit qu’en portant plainte, certainement que le médecin aurait été condamné. J’aurai perçu des dommages et intérêts et qu’est-ce que j’en aurai fait ? Les donner à des œuvres de bienfaisance, tout au plus. Je ne me voyais pas utiliser l’argent à des fins personnelles. Je me suis dit qu’en emprisonnant un médecin, il peut perdre la main. Ce sont les raisons qui m’ont amené à surseoir à une procédure. Avec ma femme, on envisage de monter une association ou une ONG pour ces cas d’espèce. Pour qu’à l’avenir, on ait recours à la justice, dans ces cas d’espèce, et qu’il y ait la tolérance zéro.

Dans votre livre, vous posez le débat philosophique sur la volonté divine. Cette tragédie vous a-t-elle réconcilié avec la foi, ou c’est le contraire ?


Je me suis toujours acquitté de mes actes de dévotion. Et dans mes moments de solitude, je pratique le zikr, Je crois que cela m’a beaucoup aidé. Dans la situation que j’ai vécue, je l’ai dit en avant-propos : ‘’C’est la folie ou c’est l’écriture, pas comme exutoire, mais comme confidente’’. Si je n’avais pas fait ce livre, je ne sais pas si, aujourd’hui, je serai là devant vous. Je ne dirais pas que j’allais vraiment chavirer, mais j’aurais été diminué. Je crois que ce qui est arrivé à ma fille, c’est le cas du martyre. Celui dont on verse le sang et qui est accueilli en grâce au Paradis.

Pouvez-vous revenir sur le présent et nous donner la suite de l’histoire. Aujourd’hui, que faites-vous de votre vie ?


Aujourd’hui, je me suis rééquilibré. Il fallait observer un moment pour se reconstruire.

Etes-vous prêt à rendre les coups ? Vous dites que vous avez connu beaucoup d’injustices, depuis l’affaire Idrissa Seck, ensuite votre fille. C’est comme si le sort s’acharnait sur vous. Qu’allez-vous faire de votre vie ?


Je crois que s’il y avait une raison valable d’attaquer quelqu’un, c’aurait été le médecin.

Vous ne parlez pas assez du médecin, peut-on savoir qui sait ?


Ah non, il s’appelle Karim Wade, c’est le professeur…

Karim Wade ?


Karim Diallo (rires) C’est un lapsus.

L’avez-vous revu, ou bien, le premier contact a été le dernier ?

Oui.

Vous n’avez plus envie de le revoir ?

Peut-être qu’un jour, j’aimerai l’avoir en face de moi, pour lui dire ce que j’ai sur le cœur. Je laisse chacun avec sa conscience. Dieu est le maître des juges.



12 Commentaires

  1. Auteur

    Sene Baye

    En Octobre, 2011 (19:56 PM)
    Na rang dioubbbbbbbbb; May sene baye
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  2. Auteur

    Un Inconnu

    En Octobre, 2011 (19:56 PM)
     :hun:  :hun:  il fallait rester en enfer connard pffffffffffffff :down:  :down:  :down:  :down: 
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    Auteur

    Lom

    En Octobre, 2011 (20:22 PM)
    massa..!
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    Auteur

    Peudio

    En Octobre, 2011 (20:36 PM)
    On paye toujours par là où l'on a pêché. Souviens toi du temps où, parce que tu avais des accointances avec un certain procureur, tu en abusais pourmenacer lesgens d'emprisonnement même lorsque tu savais que tu avais tort.

    C 'est triste que ta fille soit morte, que Dieu ait pitié de son âme. Elle n'y était pour rien, la petite.

    Mais tu as vu que la boule tourne. Tu savais qu'en escroquant les gens et en les menaçant avec l'appui de ton ami procureur de les faire coffrer, SA BES DINNA GNEUW.
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    Auteur

    Mami

    En Octobre, 2011 (20:48 PM)
    du courage mon frére sé dure mai dieu est grand.
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    Auteur

    Interpreter De Amitie 3.

    En Octobre, 2011 (20:49 PM)
    Mon cher ami, je ne t'oublierai jamais, tu es toujours dans mes pensees. je souhaite que Dieu apaise ta souffrance et acceuille ton enfant au paradis.

    Get in touch with Souhaibou G. for my digits asap...

    Interpreter de Amitie 3.

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    Auteur

    Gouney Bopp

    En Octobre, 2011 (03:22 AM)
    Grand Ndarry Sigilnigalai. Je te souhaite une longue vie plein de bonheur.
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    Auteur

    Rootsman

    En Octobre, 2011 (08:21 AM)
    Du courage cuz mais tu dis un ange vient de passer, donc she is in heaven. May she rest in peace and God bless her soul. Les morts ne sont pas morts, ils sont juste dans d'autres spheres. D'autre part, j'espere que l'Etat envisage de te dedommager pour les 4 mois en taule sans raison! Et Idrissa Seck que tu ne connaissais meme pas? I hope he showed some kind of concern towards you. In any case, the great Lord is never asleep and He will reward you for that injustice. One love!
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    Auteur

    La Grande Royale

    En Octobre, 2011 (08:32 AM)
    J'avais complètement perdu tes coordonnées mais je me disais toujours que "sans nouvelles bonnes nouvelles". La vie est ainsi faite! Je te souhaite beaucoup de courage et que tu retrouve une vie rose. Si tu te rappelle de moi, la première fois que tu m'as vue vers le quartier de Fass et qu'on a discuté- je portais une robe rose- tu me disait que tu voyais la vie en rose, rose comme ma jolie robe.

    Que le bon Dieu te ramène sur le chemin du salut et te donne d'autres enfants qui ne remplaceront certes Fatima mais qui te donneront beaucoup de réconfort.



    Une ancienne conaissance qui habitait Mermoz première porte du nom de Yace K.
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    Auteur

    Fayett

    En Octobre, 2011 (09:14 AM)
    Grand Regreg j'ai vraiment de la peine pour toi. Voila quelqu'un de tres sympa.
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    Auteur

    Boy Ouagou Niayes

    En Octobre, 2011 (09:33 AM)
    God bless you Gr Ndary
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    Auteur

    Joobajubba

    En Octobre, 2011 (10:40 AM)
    Condoléances sincères, Ndary :sad: 
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