Emigration légale : Les jeunes envoyés en Espagne ont-ils le profil de l’emploi ?

Le choix des jeunes Sénégalais bénéficiaires de visas dans le cadre de la promotion de l’immigration légale en Espagne, soulève déjà des interrogations. En effet, beaucoup parmi ceux qui ont été sélectionnés dans le secteur de la pêche se trouvent être sans qualifications au détriment des professionnels laissés en rade à Dakar.

Les jeunes Sénégalais bénéficiaires des ‘Visas de pêcheurs’ dans le cadre des accords entre le Sénégal et l’Espagne ont-ils le profil de l’emploi pour lequel ils ont été sélectionnés ? Les professionnels de la pêche en doutent au vu de la situation que vivent ces émigrés ‘légaux’. En effet, sans aucune qualification dans le secteur de la pêche, ces jeunes vivent dans la précarité, parce qu’étant confrontés aux exigences des lois et règlements sur la pêche en vigueur dans ce pays d’accueil. ‘Les Espagnols respectent le droit international maritime et le code de la marine marchande’, explique Mamadou Diop Thioune, mandataire social forum Op/SyndicatsPêche-Commerce-Environnement, qui est un professionnel du secteur de la pêche très au fait de la situation que vivent les jeunes Sénégalais. Ainsi, ajoute-t-il, les Espagnols ‘ne reconnaissent donc pas ces jeunes Sénégalais qui sont arrivés sans aucune qualification au détriment des marins de pêche laissés en rade dans le port de Dakar ou aux abords de la direction de la marine marchande en quête d’embarquement suivant les conventions internationales’.

Cette situation ne manque pas de soulever l’ire et l’indignation des professionnels du secteur qui ont été lésés au profit de jeunes sans expérience ni qualifications professionnelles dans la délivrance des titres de voyage. Cela donne raison à ceux qui estiment qu’il y a eu des ‘deals’ entretenus par des responsables de la gestion des contrats de pêche au Sénégal. ‘Les Espagnols qui n'ont embarqué à bord de leurs bateaux de pêche que deux sénégalais sur le total des jeunes arrivés en Espagne dans une situation inexpliquée et non respectueuse des règles de placement du bureau des marins, se méfient des menaces contenues dans la déclaration de Saint-Louis du 5 janvier 2008 dans laquelle, nous mettions l'Ue et le parlement européen devant le risque qu'encourent les armateurs s'ils venaient à embarquer des novices à la place des marins qualifiés’, fait remarquer Mamadou Diop Thioune.

Lors de sa visite au Sénégal, le ministre espagnol du Travail et des Affaires sociales, Jésus Caldera, avait annoncé ces contrats de travail en faveur de 700 Sénégalais qui vont servir dans le secteur de la pêche dans son pays. ‘Ce sont des entreprises privées espagnoles qui ont fait cette demande’ et ces 700 personnes vont travailler avec des contrats de travail légaux, avec notamment ‘une protection et une sécurité sociale espagnoles comme en bénéficient les Espagnols’, avait expliqué M. Caldera, lors de la cérémonie de signature d’un mémorandum sur la coopération entre nos deux pays.

Ce flou amène certains professionnels comme Mamadou Diop Thioune à se poser des questions pour que la lumière soit faite sur les conditions ayant présidé à l’embarquement de ces jeunes Sénégalais sans qualification : ‘Qu'on nous dise comment ils sont partis, sur quels critères d'aptitude et d'expérience de naviguant ils ont été choisis, à quel prix ils se sont vendus pour être dans des difficultés sans prise en charge en Espagne’. Ces professionnels de la pêche demandent donc aux autorités d’intervenir pour régler le cas de ces jeunes ‘déportés’ en Espagne et obligés de travailler ‘sans aucune protection sociale’ dans un secteur où ils n’ont aucune qualification.

Pour rappel, les gouvernements sénégalais et espagnol ont signé des accords pour promouvoir l’immigration légale. Des accords qui devront permettre à des jeunes sénégalais à travailler en Espagne en toute légalité.