C’est en marge de la tournée des parlementaires de la Commission santé et sécurité sociale, pour une sensibilisation sur les conséquences de la pratique de l’excision et un plaidoyer pour son abandon dans la région de Tamba, que Fatou Kanté, une ancienne exciseuse, domiciliée au quartier Médina Coura, s’est confiée au journal Le Quotidien. Elle indique avoir excisé plus d’une centaine de filles, sans connaître une seule fois des problèmes. Elle affirme aujourd’hui avoir déposé le couteau, depuis très longtemps, tout en jurant de ne jamais le ressortir.
Depuis quand pratiquez-vous le métier d’exciseuse ?
Vous savez, l’excision était chez nous une culture et une tradition. Depuis ma grand-mère, en passant par ma propre mère, elles ont toutes pratiqué le métier. Et dès ma tendre jeunesse, ma mère m’appelait pour l’assister dans la tâche et je l’aidais aussi à maîtriser les filles. De fil en aiguille, le métier m’a tenté et j’ai commencé à exciser, étant jeune fille, à l’âge de 20 ans déjà.
Comment s’est passé votre première expérience d’exciseuse ?
Normale ! Je l’ai faite avec maîtrise et dextérité et ça a réussi. Je n’avais pas du tout peur, car j’étais déjà habituée à assister aux scènes. Et en plus, j’étais bien assistée.
Combien de filles, avez-vous excisé durant votre carrière ?
(Elle hésite pendant quelques moments)
Une centaine environ ?
Oui une centaine ou même plus ! J’ai excisé beaucoup de jeunes filles. Je ne peux pas me rappeler du nombre exact, mais je sais que ça dépasse la centaine tout de même. C’était mon métier et nos coutumes le recommandaient en son temps. Je faisais tellement bien le métier que j’étais souvent sollicitée par les populations locales et même celles des pays frontaliers.
Pourquoi, excisiez-vous les jeunes filles ?
(Rires). Vous savez, quand on donnait en mariage une fille non excisée, le jour de la célébration du mariage, si son mari le constate, il lui demandait de retourner chez elle, car soutenait-il, elle reste une jeune fille impure et impropre. Ensuite, on lui collait l’étiquette de «Bilacoro», qui veut dire une non- circoncise. Et au delà de tout cela, elle ne pouvait pas préparer ou donner à manger à qui que ce soit. C’est une fille impure, disait-t-on.
Aujourd’hui, savez-vous que la pratique de l’excision est interdite et formellement punie par la loi ?
Bien sûr que oui ! La pratique de l’excision est de nos jours formellement interdite au Sénégal. Nous avons été sensibilisées, nous les anciennes exciseuses, et nous avions depuis lors, décidé de ranger les couteaux, pour ne plus jamais les ressortir. On a eu écho de toues les conséquences de la pratique sur les femmes. Tous les effets nous sont contés par la presse, les sages-femmes, les associations qui luttent pour l’abandon de la pratique, entre autres acteurs. Et c’est la raison pour laquelle nous avions décidé d’abandonner la pratique.
Depuis quand, avez-vous cessé la pratique ?
Ça fait très longtemps. Depuis que les gens l’ont interdit dans le pays, j’ai arrêté. Et d’ailleurs, les anciennes exciseuses ont même crée une association dénommée : «Association des anciennes exciseuses.» Dans cette association, toutes les anciennes exciseuses de la ville et même des villages y ont adhéré. Et cela témoigne encore de notre volonté de définitivement cesser la pratique. En plus, notre association a adhéré à la Fédération des associations féminines du Sénégal (Fafs). Cependant, nous manquons de financements pour des activités génératrices de revenus, et c’est le seul moyen pour prévenir les tentations auxquelles nous faisons face.
Avez-vous des regrets aujourd’hui après avoir été exciseuse ?
Des regrets, non ! Car, en son temps, lorsque je pratiquais le métier, c’était de coutume et pas interdit. Tout le monde le pratiquait d’ailleurs sauf quelques rares ethnies. Et en plus, je n’ai jamais eu de problèmes là-dessus. Durant toute ma carrière d’exciseuse, je n’ai eu aucune difficulté dans le métier, contrairement à ce que soutiennent certaines personnes qui disent avoir vu des filles succomber de leur excision. En ce qui me concerne, je n’ai pas une seule fois rencontré de difficultés.
A combien, taxiez-vous vos prestations ?
Généralement, le prix était constitué de dix morceaux de savon et d’un billet de mille francs. Mais les choses en évoluant, étaient passées jusqu’à 5.000 francs Cfa, en plus des 10 morceaux de savon.
Vos propres filles sont-elles excisées de nos jours ?
Depuis l’interdiction de la pratique, nous avons tout cessé. Même nos propres filles ne sont plus excisées. On en a fini pour de bon. Même si on me remettait un million de francs, j’en ai fini.
4 Commentaires
Pffff
En Janvier, 2014 (18:43 PM)Bob
En Janvier, 2014 (23:43 PM)Et son excuse je la trouve bidon, les hommes considéraient les femmes non - excisées comme impures !!!!!!!! QUELLE CONNERIE
Ssaredjile
En Janvier, 2014 (01:31 AM)Lol
En Janvier, 2014 (09:48 AM)Participer à la Discussion