GRANDES VACANCES : Le casse-tête des parents

La période des grandes vacances est l’occasion pour les parents nantis, d’emmener leurs enfants en colonie de vacances, pour les récompenser d’avoir bien travaillé en classe. Par contre, pour les familles moins riches, les grandes vacances sont une opportunité de faire découvrir certaines valeurs à leurs enfants, en leur faisant découvrir le village. Les parents ne veulent pas ainsi, livrer leurs enfants à la rue, pour que ces derniers ne vagabondent pas à longueur de journée.

Que faire des enfants pendant les trois mois de vacances scolaires ? Une question que se posent sans doute beaucoup de parents et qui constitue un dilemme. Comment les occuper, pour qu’ils ne vagabondent pas à longueur de journée. Les solutions sont diverses et dépendent très souvent de la bourse des parents. «Après neuf mois d’âpres études scolaires, il faut au moins leur offrir 21 jours de colonies de vacances. Mes deux filles vont en Gambie la semaine prochaine. Je crois que ça leur permettra de découvrir d’autres horizons et d’autres mentalités,» nous dit M. Ndiaye. Pour lui, c’est la meilleure manière de récompenser ses enfants, mais surtout de les encourager dans leurs études. Pour M. Ndiaye, au moins avec ses sorties, elles vont apprendre autres choses et surtout à vivre en communauté car, elles sont très timides et réservées. Et pourtant, Nafi sa fille de douze ans est très enthousiaste puisque pour elle, cette colonie de vacances est l’occasion de se faire de nouvelles amies et de partager avec elles 21 jours de vacances. Comme chaque année, M. Ndiaye envoie ses filles en colonies de vacances pour avoir bien travailler, mais aussi, pour ne pas les laisser oisives à la maison et toujours devant la télévision.

Mais, les colonies de vacances par ces temps de crise économique ne sont pas à la portée de tous les parents. Aminata, compte envoyer son fils de 25 ans et sa sœur au village chez leur tante. Elle compte ainsi faire découvrir à ses fils leurs origines, en leur donnant l’occasion de découvrir une autre vie que celle de Dakar la capitale : la vie en milieu rural. Salif est plutôt partant, car il a toujours voulu y aller pour faire connaissance, avec sa tante qui n’est jamais venue à Dakar et ses cousins et cousines du village. Par contre Mamy est beaucoup plus réticente, car pour elle, il lui serait difficile de s’adapter dans un environnement où il n’y a même pas l’électricité. Et comme pour la décourager, son grand frère qui n’est jamais allé au village, lui raconte qu’il y a des serpents, des hyènes et qu’elle ne pourra pas suivre …ses séries télévisées. Une raison suffisante pour Mamy de vouloir désister ce voyage au fond du Fouta, mais ses parents tiennent à ce qu’elle y aille. Cette décision d’envoyer leurs enfants découle d’un constat. Leur fille aînée qui avait passé deux mois au village, est revenue complètement changée. Elle était devenue plus tolérante, plus sereine et surtout plus serviable au point que sa petite sœur en était surprise, car le caractère coléreux de sa sœur avait disparu. C’est sans doute devant le dénuement et la misère, que l’homme apprend à se débrouiller et à devenir plus humble. Pour Anita, le voyage du Fouta a été tellement bénéfique. «Vous savez au village, j’ai vraiment saisi le sens même de la notion de solidarité. Je ne dis pas qu’il n’en existe pas à Dakar, mais je l’ai découvert au village. Des gens qui ne sont pas calculateurs ni mesquins, qui vous accueillent et vous ouvrent leurs cœurs. C’est là-bas que j’ai compris la chance que j’avais ici à Dakar de vivre dans tout ce luxe. C’est vrai que là-bas, il y’a beaucoup de choses qui manquent, mais il y’a au moins le respect et la solidarité ». Et c’est justement ces valeurs que ses parents veulent inculquer au reste de la famille, en leur faisant découvrir une autre manière de vivre. Les changements de leur fille aînée n’ont pas échappé à ses parents. Nafi est convaincue qu’une fois de retour de son voyage, sa sœur aura une autre vision de la vie. Aby quant à elle ne compte pour rien au monde renouveler son expérience de l’année dernière. N’ayant jamais quitté son village, attirée par les sirènes de la capitale, elle s’est décidée à 23 ans, de passer quelques jours à Dakar chez son oncle. «C’était horrible. J’étais devant la télévision et c’était à peine si les filles de ma tante m’adressaient la parole. C’était juste «comment vas-tu», « est-ce que tu as bien dormi», «viens manger». Ce n’est même pas qu’elles ne s’occupaient pas de moi, mais elles n’avaient pas le temps. Elles étaient tout le temps pressées et je ne savais pas qu’à Dakar les gens étaient si froids et occupés. Au bout d’une semaine, je n’en pouvais plus et je suis retournée chez moi au village». Ce manque de temps des dakarois est souvent assimilé à de l’indifférence et c’est pour cela que de moins en moins, les parents envoient leurs enfants en vacances à Dakar et surtout avec la crise économique qui du reste est très aiguë. De toute évidence, si pour certains les grandes vacances sont une occasion de découvrir le Sénégal, pour d’autres parents par contre, l’occupation des enfants constitue un véritable problème. La crise économique, combinée avec la crise des valeurs font que de plus en plus, les parents préfèrent envoyer leurs fils au village pour leur permettre de se ressourcer et de découvrir un autre mode de vie plus humain.