Le
Sénégal est un pays bizarre, vraiment bizarre. Voilà un pays où les
populations rivalisent d'ingéniosité en matière de refus de l'ordre
établi. Dans tous les secteurs, règne l'anarchie. L'enquête sur les
taxis que nous avons réalisée dans l'édition que vous tenez entre vos
mains, illustre à merveille la conception que les Sénégalais ont de leur
vécu.
Difficile de leur faire respecter les normes les plus élémentaires en
matière de civilités sociales. Partout, c'est la même rengaine : "le
Sénégalais est indiscipliné". Cette boutade ne dérange plus. Pourtant,
personne ne semble s'en émouvoir. Combien de personnes parmi nous
respectent une queue dans un lieu de service public ?
On cherche à faire prévaloir des passe-droits. Conséquence majeure : les fondamentaux de notre société sont brisés. Ces derniers jours, des accidents de la circulation d'une rare intensité ont fait trembler tous les militants des droits de l'homme. Que de vies abrégées sur l'autel d'une folie de "chauffards".
Chaque jour que Dieu fait, ces "faiseurs de mort" constitués par les cars de transport en commun fauchent des âmes.Insouciants, à bord de vieilles guimbardes, ces conducteurs continuent leur danse macabre. Des esprits nourris à la sauce caustique avaient fini de trouver une formule géniale : "Do yalla té do car". Une manière singulière de pointer du doigt ces cars qui "assistent l'ange de la mort" dans sa tâche. Cette inconscience ordinaire se manifeste dans tous les segments sociaux.
Des marchands ambulants qui prennent possession de la chaussée, mettant en péril même leur vie. De gros gaillards qui transforment les murs de paisibles citoyens en urinoirs. Des marchands de sommeil qui construisent des maisons à haut risque, faisant fi des normes élémentaires de sécurité et d'hygiène au grand dam de leurs occupants.
Ces derniers, à cause de la crise, n'hésitent pas à louer des maisons prêtes à s'écrouler. Les effondrements de bâtiments sont devenus une constante avérée. De hautes autorités de notre pays qui se plaisent à braver les feux rouges. Un ministre de la République a été une fois interpellé pour avoir violé une règle élémentaire, à savoir s'arrêter quand le feu est au rouge.
Ces exemples, on peut les citer à l'infini. Ils sont les signes particuliers du sous-développement. Il est là, le sous-développement, dans les têtes censées être bien faites qui raisonnent plus selon des paradigmes liés à l'instinct de survie. Les exemples d'indiscipline et d'incivisme foisonnent. Dans tous les cas, ces pathologies caractéristiques du sous-développement, sont difficiles à éradiquer sous nos cieux. Là réside le challenge de nos gouvernants pour mettre le pays sur les rails de l'émergence.
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