DAKAR (Reuters) - L'Espagne a commencé ses rapatriements de clandestins africains et les familles sénégalaises attendent avec appréhension de voir si l'un des leurs est de ceux dont le voyage vers "l'Eldorado européen" a pris fin sur les rivages des Canaries.Trois vols charters en provenance des Canaries ont permis vendredi de rapatrier sous escorte policière espagnole environ 200 clandestins à Saint-Louis, l'ancienne capitale du Sénégal. La veille au soir, une cinquantaine d'autres avaient débarqué à l'occasion de la reprise du pont aérien.
Aux jeunes hommes qui débarquent, l'air abasourdi, les autorités locales distribuent un sandwich et 10.000 francs CFA (20 dollars). La consolation est maigre pour ceux dont les familles ont englouti leur argent dans le financement de ce voyage vers l'Europe.
"Les gens sont anxieux. Tout le monde a le même état d'esprit, on craint d'avoir un parent dans un avion", reconnaît Masamba Lo qui a deux frères et deux cousins en Espagne.
"Les famille se cotisent tous dans l'espoir qu'ils vont envoyer de l'argent (...) pour eux c'est un bon investissement", explique Lo qui vit à Thiaroye, une banlieue de Dakar d'où partent de nombreux clandestins
"ILS ONT HONTE"
Une place dans une pirogue coûte 500.000 francs CFA, une fortune dans un pays où les deux tiers des habitants gagnent moins de deux dollars par jour.
Ceux qui partent vers l'Europe, perçue comme un mirage, transportent avec eux les espoirs de leurs familles et amis, qui se sont cotisés pour réunir l'argent nécessaire.
"Croire que tu es en Europe, c'est un miracle pour la plupart des Sénégalais. Imaginer de les renvoyer au Sénégal, c'est une catastrophe mentale. Ils ont risqué leur vie, dépensé leur argent, ils ont honte, ils recommencent à zéro", raconte Massaer Niang, un étudiant qui a consacré huit mois et 3.000 euros légués par son père à tenter de rejoindre, en vain, l'Espagne.
De nombreux Sénégalais se montrent très critiques envers le gouvernement du président Abdoulaye Wade, qui a accepté le programme de rapatriement espagnol.
"Ceux qui veulent émigrer ne sont pas des malfaiteurs, ils essaient de trouver du travail et ce travail-là, ce ne sont pas les 13 milliards (CFA) que l'Espagne jettent comme ça qui vont régler le problème", déplore Madior Diouf, un chef de l'opposition, dans le journal Le Populaire.
"Le gouvernement ne doit pas accepter le tout répressif, les comportements répressifs n'ont rien à voir ici."
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