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LA VIE APRÈS LE PÈLERINAGE AUX LIEUX SAINTS : Le Hadj transforme-t-il le fidèle ?

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LA VIE APRÈS LE PÈLERINAGE AUX LIEUX SAINTS : Le Hadj transforme-t-il le fidèle ?

Le hadj, pèlerinage aux lieux saints de l’Islam situés en Arabie Saoudite, est une obligation à réaliser pour tout musulman qui le peut, au moins une fois dans sa vie. Ainsi, s’il est correctement fait, ce cinquième pilier de l’Islam confère au pèlerin une nouvelle virginité en matière de péchés. Aujourd’hui, bon nombre de Sénégalais en ont une pratique aux antipodes de ce que la religion recommande. Essentiellement après ce voyage spirituel que d’aucuns assimilent maintenant -avec un soupçon d’amertume- comme tout autre déplacement. Histoire d’y voir plus clair, notre reporter a mené l’enquête.

Chassez le naturel, il revient au galop. Bon nombre de Sénégalais ont beau effectuer le pèlerinage à la Mecque, mais leur pratique de la religion ou bien leur relation à autrui n’en demeure pas améliorée. Une belle occasion manquée pour le croyant de se remettre de ses péchés. Selon les dires d’Abou Houreyrah, un des compagnons du Prophète Mohamed (PSL), les pèlerins ont accompli une adoration qui fait partie des plus grandes adorations et une des plus grandes bonnes œuvres qui font se rapprocher d’Allah. Ils ont enlevé leurs vêtements au Miquate -lors du rite de sacralisation-, les larmes du repentir ont été versées sur les joues à Arafat, ayant honte à cause des péchés commis, les voix se sont élevées dans toutes les langues, montrant leur pauvreté à Allah. Les âmes ont ensuite passé la nuit à Mouzdalifah, puis, les gens se sont rassemblés pour lancer les pierres aux « jamarates », ont accompli la procession autour de la Kaaba et ont fait la circulation entre As-Safa et Al-Marwah. Ceci est mieux que le monde et ce qu’il contient, car la vie de ce monde est éphémère et ses plaisirs ne sont pas nombreux.

Aux pèlerins pour leur pèlerinage, aux adorateurs pour leurs adorations et leurs efforts, le Messager d’Allah a dit dans un hadith (hadith Quoudsi) qu’il rapporte de son Seigneur - qu’Il soit exalté - qui a dit : « Vous qui avez accompli le pèlerinage à la Maison d’Allah, qui êtes venus de différents endroits du monde, vous avez enfin terminé votre pèlerinage après que vous vous soyez arrêtés dans les lieux sacrés et que vous ayez accomplis ces rites. Vous vous préparez maintenant pour retourner dans vos pays. Donc, faites attention à ne pas retourner dans les choses interdites. : Ne soyez point, à force de parjure, comme celle qui a défait sa quenouille (pour la réduire en laine), après l’avoir fortement filée ». En d’autres termes, c’est la métaphore d’une femme inconsciente qui, après avoir travaillé jour et nuit pour tricoter, défait ce qu’elle a fait. La quintessence du propos est une invite pour celui ou celle qui vient d’effectuer le pèlerinage, à ne pas être comme cette femme en détruisant ce qui a été construit et perdre ainsi ce qui a fait l’objet de ce rassemblement (le pèlerinage, les bonnes œuvres, les péchés pardonnés...).

Ousmane Diarra, étudiant à l’Ecole nationale d’économie appliquée (Enea) constate qu’au Sénégal, les gens croient que ce sont les personnes âgées qui vont à la Mecque pour se repentir et absoudre leur péchés. Dans ce cas de figure, développe-t-il, au retour, ils doivent être en conformité avec les principes de l’Islam. « Et si nous poussons la réflexion sur le terrain du genre, nous remarquons que bon nombre de femmes se rendent à la Mecque pour davantage mettre l’accent sur leur statut social que par rapport à une pratique cultuelle », constate Ousmane Diarra.

Voyeurisme à tout va

Babacar Sy, coordonnateur du centre conseil pour adolescents et jeunes à Kolda, déplore le cachet ostentatoire que certains ont donné au cinquième pilier de la religion musulmane. « Malheureusement, le pèlerinage n’est aujourd’hui qu’un acte de voyeurisme par rapport à la richesse et non par rapport à la religion », déplore-t-il Les retours des pèlerins de la Mecque sont pour la plupart entourés de cérémonies d’accueil où l’on distribue de l’argent, des habits avec faste, ajoute-t-il. Ce que la religion réprouve. « On se glorifie du titre, alors que l’Islam recommande le partage après le pèlerinage, la pureté, la simplicité de l’accueil, relève Babacar Sy. La principale leçon qu’on peut tirer de ce voyage c’est que devant Dieu, tous les hommes sont égaux et, au retour, c’est cette vie qu’il faut développer et non le contraire ».

De l’avis d’Oumar Sall, coordonnateur du réseau d’informations culturelles Groupe 30 Afrique, nous sommes dans un pays où le « titre » est important... d’où l’expression en wolof « diw défa beuri titeur ». « Il y a un besoin vital d’une affirmation et tous les moyens sont bons », ajoute-t-il. Le pèlerinage doit constituer un « nouveau départ » (décision d’un retour permanent vers le spirituel), estime-t-il. « Ce n’est pas après un séjour de 21 jours à la Mecque qu’on peut changer de comportement. Même s’il y a des exceptions », relève Oumar Sall. Poursuivant son argumentaire, il soutient : « Aujourd’hui, ce que l’on constate, ce sont surtout des femmes qui, fraîchement revenues de la Mecque, respectent le port du voile. Quelques temps après, elles délaissent cette pratique pour retourner à leurs vieilles habitudes ».

Avec un point de vue plus tranché, la journaliste Safiétou Kane trouve que les hommes et les femmes qui partent pour la Mecque devraient apprendre à mieux connaitre ce pilier de l’Islam avant de l’accomplir. « Ce qui est désolant dans tout cela, c’est que ces adjaratous et el Hadj ne changent d’un iota dans leur comportement. Après leur retour de la Mecque, c’est comme s’ils étaient parti pour n’importe quel voyage. Les femmes mettent le voile pendant quarante jours et puis l’enlèvent. Ce qui n’est pas du tout normal », fustige-t-elle. Pour la journaliste, l’idéal, ce serait pour le pèlerin qui a correctement effectué son Hadji, de revenir de la Mecque avec une foi raffermie mais aussi avec l’objectif de se faire une vie meilleure.

Safétou Kane fustige les gaspillages lors de leur retour. « Ceci doit être condamné avec la dernière énergie », dit-elle. En effet, observe notre interlocutrice, ce qui se passe après le retour des pèlerins est inadmissible. « Les pèlerins s’endettent pour pouvoir festoyer, alors que le musulman qui part pour faire le pèlerinage, on lui demande de s’acquitter de ses dettes avant de partir. Il faudrait que les pèlerins sénégalais puissent faire preuve de beaucoup plus de modération dans ce sens ». Pour cela, les remarques d’Abou Houreyrah sont d’une rare justesse : « Quelle bonne chose de voir le musulman retourner dans sa famille et dans son pays en ayant de bons comportements, de bonnes qualités, de bonnes relations avec les gens, étant généreux envers ses enfants. Cela, en ayant un cœur propre, suivant le chemin de la vérité, de la justice et de la droiture...Ainsi, il est dit que celui qui retourne après le pèlerinage avec ces qualités, est celui qui a réellement profité du pèlerinage, de ses secrets, de ses enseignements et de ses effets ». D’après les écrits de ce compagnon du Prophète Mohamed (PSL), depuis que le pèlerin commence son pèlerinage jusqu’à ce qu’il finisse de l’accomplir, toutes les actions du pèlerinage et ses rites lui font connaître Allah, lui rappellent les droits d’Allah et les particularités de sa divinité. Et ce sont ces droits qui lui font connaître et lui rappellent qu’Allah est l’Unique, à qui l’âme se soumet et vers qui les visages se dirigent. A cette fournée de remarques, viennent se greffer quelques interrogations sommes toutes légitimes. Où est le pèlerinage de celui qui après son retour, va voir les charlatans et les sorciers, croit aux devins et aux superstitieux, recherche la bénédiction en touchant les arbres, se frotte aux pierres et porte les amulettes et les protections ?

Où est le pèlerinage de celui qui après son retour, néglige la prière, ne donne pas la zakat, mange l’intérêt et les pots-de-vin, s’adonne à la drogue et à l’alcool, rompt les liens de parenté et est plongé dans les péchés ?

Les pèlerins se sont abstenus de commettre les interdictions qui sont attachées à l’état de sacralisation pendant le pèlerinage, mais il y a des interdictions qui sont pour toute la vie. Allah a dit dans Ses écritures saintes : Comment celui qui a répondu à l’appel d’Allah en accomplissant le pèlerinage peut-il ensuite répondre à l’appel d’une doctrine ou d’un rite ou d’un appel qui est le contraire de la religion d’Allah ? Comment celui qui a répondu à l’appel d’Allah en accomplissant le pèlerinage peut-il ensuite suivre les lois d’une législation autre que celle d’Allah, ou obéir à des lois autres que Ses lois, ou accepter un autre message que le Sien ? Autant d’interpellations qui devraient inciter à donner une vision sur ce que c’est le pèlerinage.



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