Les reculades répétées du président de la République après ses prises de décision ne sont pas fortuites. Le sociologue Djiby Diakhaté qui a fait une analyse pointue d'une telle attitude a trouvé l'explication adéquate. Selon lui, «la population a déchiffré la tactique de sa ruse».
La stratégie de Wade consistant à prendre des décisions pour ensuite revenir dessus comme les délocalisations de l'hôpital Le Dantec, le lycée Van, les déguerpissements des marchands ambulants et récemment sa reculade sur l'ouverture d'une information judiciaire dans l'affaire des 15 milliards destinés à l'achat de terrains pour la mairie de Dakar sont à chercher dans le fait que sa tactique a été «démasquée, démystifiée». Le sociologue Djiby Diakhaté qui a fait cette analyse trouve que «la population a déchiffré la tactique de ruse de Me Wade et le concerné l'a compris, surtout avec les résultats des dernières élections locales». Pour lui, l'explication de ces décisions prises pour ensuite revenir dessus est «celle d'un guide qui se met toujours et dans toutes les circonstances en première ligne en usurpant manifestement la fonction de conseiller et de collaborateur qui dans certaines situations devrait se concentrer avec l'expertise requise». En conséquence, poursuit-il, «on assiste de la part du président à des positions plutôt tactiques sous-tendues par des calculs politiques et non à des postures adossées à une expertise et à une connaissance scientifique du dossier». En réalité, le sociologue souligne que «la flexibilité d'un dirigeant n'est pas un mal en soi lorsqu'il est articulé autour de préoccupations liées à des besoins d'adaptation aux aspirations du peuple. Mais quand ça prend la forme d'une compromission constante, cela signifie un éloignement, une méconnaissance, une surdité par rapport à ce qui pourrait être le souffle du peuple». En effet, lorsqu'un gouvernement s'enferme dans un protocole de confinement, il installe un fossé entre lui et le peuple et cela explique les compromissions, les hésitations, les tâtonnements etc., indique le Pr Diakhaté. Ce dernier pense qu'on a «un pouvoir très sensible à la pression de l'extérieur qui fait que très souvent on ne cherche plus qu’à satisfaire les desiderata des différents organismes internationaux plutôt que les difficultés réelles des populations». Sous le revêtement d'un pouvoir attaché à la bonne gouvernance, au respect des droits de l'Homme, à la gestion transparente et équitable des deniers publics, se cache la réalité d'une instance gouvernementale qui exploite un peuple, qui lui impose une orientation et qui lui tourne le dos dans les moments les plus complexes, indique-t-il.
Le psychologue Serigne Mor Mbaye pour sa part justifie cette reculade par le fait que Me Wade travaille pour un pays paisible. «Il n'a pas intérêt que ce que le pays s'enflamme, nous allons vers des élections, il a eu des difficultés, maintenant il travaille pour la paix». Mais, précise-t-il, si les reculades deviennent fréquentes ça peut entamer la crédibilité de l'Etat. «Maintenant, il y a des choses non négociables, comme l'affaire des mendiants», conclut-il.
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