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« LEUL » ou circoncision communautaire a pikine : “ La case des hommes ” implantée en zone urbaine

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« LEUL » ou circoncision communautaire a pikine : “ La case des hommes ” implantée en zone urbaine

Pour la quatrième année, la mairie de Pikine en collaboration avec l’association « ANDACULT », a organisé son « leul » communautaire. Cette activité a pour principal objectif de ressusciter un pan important de notre culture en milieu urbain.

Sur l’un des nombreux couloirs du Complexe culturel Léopold Sédar Senghor de Pikine, des enfants à l’accoutrement bizarre sont assis à même le sol. Dos au mur pour certains, ils discutent entre eux dans une grande discipline. Les autres étendus de tout leur long, dorment à poings fermés. Leurs habits sont crasseux sont, et leur tête couverte d’un bonnet. A côté d’eux, une pile de paires de chaussures en bataille.

Ce sont les circoncis du « leul » communautaire ou circoncision de la ville de Pikine, organisé pour la quatrième fois dans les locaux du Complexe culturel.

En cette mi-journée, les circoncis reviennent éreintés de la grande promenade qu’ils effectuent tous les matins dans la ville. Du haut du bâtiment où ils se trouvent, il n’est pas donné à n’importe qui de les approcher.

D’ailleurs, ils sont sous la protection des « selbés », jeunes hommes initiés, chargés de veiller sur leur éducation en cette période cruciale de leur vie d’homme. Cette année, ils sont 78 garçons âgés de 4 à 18 ans à partager le « leul » communautaire. L’initiative entrée désormais dans l’agenda culturel de Pikine et de la Banlieue, est le fruit de la collaboration entre l’Association des acteurs culturels (ANDACULT), le Complexe culturel Léopold Sédar Senghor et de la Ville de Pikine.

Si dans un premier temps, l’objectif visé dans cette initiation était d’occuper les jeunes enfants pendant les grandes vacances, il reste surtout maintenant, selon Baba Ndiaye, directeur du Complexe Léopold Senghor de Pikine, un moyen de faire renaître la pratique du « leul » initiation traditionnelle des circoncis, en milieu urbain. « Dans les villes, il est regrettable de ne plus voir les « leul » que les enfants avaient l’habitude de faire en pareille période. Et partant de ce constat, nous avons pensé regrouper certains d’entre eux venus d’horizons divers et leur inculquer des valeurs traditionnelles », explique M. Ndiaye. Loin d’être réservé uniquement aux enfants de Pikine, ce « leul » regroupe des gamins venus des Parcelles Assainies, de Yeumbeul, de la Médina , Hann Mariste et des autres quartiers de Dakar.

Avant le démarrage de l’initiation, un appel à candidature est lancé aux parents par voie de presse. C’est par la suite qu’une sélection est faite en fonction des places disponibles. Cela, en réservant tout de même la primeur aux talibés et aux enfants issus de familles défavorisées. A cette édition, plus d’une vingtaine de places ont été octroyées à ces catégories de la société.

Le « leul » comme une école de la vie

Membre important de l’encadrement des initiés, le sélbé ridial Alioune Diop précise pourtant qu’aucune distinction n’est permise entre talibés ou fils de riches, une fois entrés dans le « leul ». « Ils sont là pour être forgés et non pour se faire plaisir ou faire état de leurs différences sociales », soutient le selbé ridial. Se basant sur son expérience aux côtés des initiés, Alioune Diop soutient que les premiers jours, la plupart des enfants ont du mal à se départir de leurs habitudes, mais à force de recevoir les enseignements de l’encadrement, ils finissent par se ranger.

Faisant partie des initiés de l’année dernière, Fallou et Souleymane ont été cooptés cette année pour faire partie des sélbé. Devenus aujourd’hui de grands amis, ils ont partagé les mêmes souffrances et enduré les mêmes épreuves dans le « leul ». « Au début de l’initiation, je n’aimais pas manger du poisson yaboye, les sélbé m’ont obligé à le manger durant tout mon séjour », raconte Falou, aujourd’hui satisfait d’avoir franchi cette dure épreuve de sa vie de garçon. Quant à Souleymane, il détestait un légume comme le navet. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Le courage dans l’effort et l’endurance dans l’épreuve qu’il a expérimentés sont des maîtres- mots ici. Alioune Diop a appris à les mesurer plusieurs fois dans sa vie professionnelle.

Pour cet initié au « leul », seule l’incorporation dans l’armée ou la fréquentation de l’école coranique peuvent donner à l’homme la même formation que le « leul » autrement appelé « la case des hommes ».

C’est pourquoi, au sein du Complexe Léopold Senghor où ils sont internés, les 78 enfants de la promotion de cette année sont initiés à la vie et à ses secrets. Chaque jour, après la promenade matinale, ils profitent des enseignements de l’encadrement. Cela peut aller des énigmes à décrypter aux chants dont seul les initiés connaissent la signification.

Alioune Diop assure ce volet, mais il n’est pas le seul à jouer un rôle déterminant dans l’initiation. Le « Ngamane » est aussi une personne clé de l’entourage, car, c’est à lui que revient l’opération de circoncision. De même, durant tout le temps que va durer le « leul » (un mois), le « Botal Mbar » est celui qui assure la protection mystique des enfants circoncis. Ces derniers, à cause de leur vulnérabilité face aux mauvais esprits et à d’éventuelles maladies, sont suivis de ce côté par le « Botal Mbar ».

Au préalable, l’état sanitaire de chaque circoncis est connu de l’encadrement. Quiconque souffre d’une maladie particulière est suivi avec la plus grande attention. Toutefois, avant de sortir de « la case des hommes », les enfants comme les talibés de l’école coranique doivent restituer les leçons apprises. Et ils doivent le faire à travers une séance publique appelée « Kassak » qui a lieu au coucher du soleil, au rythme des tam-tams et des chants.

A partir d’énigmes qui leur sont posées, les initiés tentent de les décrypter et de déjouer les pièges, parfois en présence de leurs parents. Toutes ces activités contribuent à créer « des liens indissociables » entre ces jeunes gens qui, au sortir de cette épreuve, deviennent des « frères ».

Pour cette 4ème édition du « leul » communautaire, le parrain est Mbaye Diack, secrétaire général adjoint à la Présidence de la Présidence. Le leul ressuscite un des symboles importants de la tradition sénégalaise. Son organisation a été possible grâce au soutien de plusieurs partenaires. Des subventions leur ont été accordées par certaines institutions bancaires comme la Mutuelle des volontaires et contractuels des enseignants et la Pamecas entre autres.

Plusieurs sacs de riz leur ont été offerts par le ministère de la Famille et de la femme et la mairie de Fass Mbao. Au-delà de Pikine, certaines voix nostalgiques de nos traditions culturelles, demandent à ce que cette initiation soit véritablement remise au goût du jour, partout dans le pays.



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