L’orpaillage artisanal et semi-mécanisé continue de poser d’importants défis environnementaux et sociaux dans la zone de la Falémé, à la frontière entre le Sénégal et le Mali. Face à cette situation préoccupante, l’ONG International Budget Partnership (IBP), en partenariat avec le Centre d’action pour le développement et la recherche (CADRE) et le GRDR, mène des actions de sensibilisation et de concertation.
C’est dans ce cadre que s’est tenue à Sadatou, dans l’arrondissement de Kéniéba, une rencontre départementale réunissant autorités, élus, chefs de village, services techniques et représentants de la société civile.
Cette rencontre s’inscrit dans le Programme de lutte contre les vulnérabilités liées aux mauvaises pratiques d'exploitation des ressources naturelles et au changement climatique, mené depuis deux ans dans la région. Selon Pape Faye, secrétaire exécutif de CADRE, l’objectif est de mettre en lumière les impacts négatifs de l’orpaillage incontrôlé sur les communautés riveraines. Les observations de terrain ont révélé une forte pollution des eaux de la Falémé, avec des conséquences graves sur l’agriculture, l’élevage et la pêche, activités vitales pour les populations locales.
Face à cette dégradation, l’IBP a soutenu la mise en place d’un plan d’action en trois volets, co-construit avec les acteurs locaux lors d’un atelier organisé à Kidira en août 2024. Le premier axe de ce plan est la production de connaissances : il s’agit de documenter les pratiques d’orpaillage et leurs impacts, afin de mieux orienter les politiques publiques et les interventions communautaires. Une attention particulière est portée aux témoignages des populations affectées, en vue de proposer des solutions adaptées et durables.
Parmi les propositions issues des échanges, figure la nécessité d’élargir les couloirs d’orpaillage autorisés. Actuellement, la commune de Sadatou ne compte que trois zones officiellement reconnues, insuffisantes face à la pression croissante sur les ressources aurifères. Cette limitation pousse de nombreux orpailleurs vers des sites clandestins, souvent situés en pleine forêt, accentuant les dégâts environnementaux. Le renforcement du contrôle et la légalisation de l’activité sont donc perçus comme un levier essentiel pour une exploitation minière responsable.
En parallèle, la question de la dépollution du fleuve Falémé est jugée prioritaire. Même si l’orpaillage était entièrement stoppé aujourd’hui, les dégâts causés par l’usage intensif de produits chimiques comme le mercure ou le cyanure continueraient à nuire aux écosystèmes pendant des décennies. Des initiatives techniques et scientifiques devront être engagées pour assainir les eaux et restaurer la biodiversité aquatique. Cela suppose une forte volonté politique et un engagement durable des deux côtés de la frontière.
Enfin, les acteurs de la concertation appellent à une coopération transfrontalière renforcée. Alors que le Sénégal a pris l’arrêté 2024-1202 interdisant l’exploitation minière dans un rayon de 500 mètres autour de la Falémé, le Mali n’a pas encore adopté de mesures équivalentes. Cette asymétrie rend les efforts sénégalais moins efficaces et alimente la poursuite de l’orpaillage côté malien. Une coordination entre les deux États apparaît donc indispensable pour protéger cette ressource partagée et garantir un développement harmonieux des territoires riverains.
Commentaires (0)
Participer à la Discussion