Luc Nicolaï : « Il (Gaston) a été naïf avant moi »

Deuxième partie de l’interview que Luc Nicolaï a accordé à ndamli.sn. dans cette entrevue, le promoteur aborde la question des montants des combats ficelés par sa structure, il revient également sur ses rapports avec Gaston Mbengue et avec le CNG.

Ndamli.sn : Yèkini/ Balla Gaye2, vous avez décroché la plus grosse affiche de la saison. Comment vous vous y êtes pris pour les faire signer et damer le pion à vos adversaires?

Au niveau de Luc Nicolaï &co, nous avons l’habitude de travailler en équipe mais aussi en toute discrétion. Les gens pensent que c’est un combat que nous avons ficelé en une semaine parce qu’on en avait pas parlé, on n’avait pas communiqué dessus, mais ce ne sont pas des combats qui peuvent se monter en une semaine. Déjà même avant la saison de la saison, nous avons essayé de voir toutes les possibilités qu’on pouvait avoir au niveau délai et de la tenue du combat. Ce sont deux très grands lutteurs et leurs combats ne peuvent pas se faire sur un délai de 3 mois. Pour en revenir à votre question, notre structure a travaillé dans l’ombre et moi personnellement je suis revenu au créneau pour monter le combat. Effectivement je l’ai fait en 3 jours, nous avons fait des montages financiers et d’autres calculs. Mais j’avoue que ça s’est fait d’une manière très naturelle. Honnêtement, ça n’a pas été difficile même si beaucoup de gens convoitaient le combat. Des promoteurs et d’autres qui ne le sont pas.

Ndamli.sn : L’année dernière vous avez connu une saison plus ou moins timide, qu’est-ce qui explique cela ?

Ça fait 12 ans que nous organisons des combats et nous avons fait de très grands combats. Modestie à part, au niveau de Luc Nicolaï &Co que je dirige, nous n’avons pas l’habitude de parler, nous travaillons dans l’ombre et nous savons ce que nous faisons. Chaque année, nous organisons notre saison. En fonction de ma disponibilité ou des autres, nous organisons une grande ou une moyenne saison. Nous sommes venus dans l’arène en organisant de grands combats, Tyson-Mor Fadam. Et depuis lors, c’est ce que nous faisons. Quand j’organisais mon premier gala, certains me critiquaient disant que je « bazardais la lutte », alors que je voulais qu’on en arrive là ! Tyson qui a beaucoup contribué à l’éclosion de la lutte a même eu à le dire. La saison dernière, nous avons organisé, Lac de Guiers 2/Modou Lô, c’était une belle affiche. Faire des événements chez Luc &Co, c’est naturel.

Ndamli.sn : Peut-on revenir sur les cachets de du combat entre Yékini/BG2 ?

Au Sénégal en ce moment, il est très difficile de parler de cachet, d’argent parce que les gens ne comprennent pas. Les lutteurs savent et comprennent ce que je dis, la lutte ce sont des montages financiers que nous faisons avec les lutteurs. Un combat, ce n’est pas aussi simple que ça. Nous avons laissé beaucoup de plumes dans la lutte avant d’en arriver là. Je n’ai pas l’habitude de tenir ce genre de discours mais je vous le dit en toute honnêteté. Yekini/Baboye, par exemple, nous avons perdu beaucoup d’argent dans ce combat et les gens ne s’en rendent pas compte. Et il y en a eu d’autres. Nous sommes venus travailler pour notre pays. Ce que nous investissons dans la lutte aujourd’hui, au lieu de le faire, on aurait pu aller dans l’immobilier et vivre pénard de nos rentes. Mais par amour pour notre pays, nous voulons contribuer au développement ; la lutte est entrain de le faire de fort belle manière.

Ndamli.sn : Vous n’avez toujours pas répondu à la question, quel est le montant de l’affiche Yekini/BG2 ?

Par respect aux protagonistes, je ne le ferai pas. Les lutteurs sont cependant libres de le faire. Je n’aimerai pas qu’on se mêle de ce que je gagne ou je perds.

Ndamli.sn : Cependant, on annonce plusieurs centaines de millions pour ce combat, le CNG affirme n'avoir jamais reçu de déclaration de cachet supérieure à 50 millions. Qu'est qui explique le différentiel avec les sommes reçues par les lutteurs..?

Le CNG de lutte a abattu un travail colossal, c’est vrai, mais le seul problème, c’est qu’il n’évolue pas par rapport à la lutte. La lutte sénégalaise les a dépassés. Aujourd’hui, on ne peut parler de certains cachets avec des engagements pris au niveau du sponsor et n’avoir aucune garantie de la part du Comité National de Gestion de lutte. La majeure partie du cachet il faut que nous les mobilisions. Pourquoi, pour faire face à certaines imprévues. Par exemple, si nous avons des problèmes avec un lutteur qui ne respecte pas ce que nous avons signé via le sponsor, que nous puissions le « sanctionner ». Ce que le CNG ne fait pas. Aujourd’hui qu’on se dise la vérité, nous avons aucune assurance vis-à-vis de la tutelle

Ndamli.sn : En somme, vous reprochez au CNG de ne pas trop s’impliquer au montage des différentes affiches ? Ceci expliquerait aussi la non-transparence des promoteurs sur les cachets engagés?

Ce que je veux dire, le seul problème c’est que nous n’avons aucune assurance vis-à-vis du CNG. Aujourd’hui, si nous organisons un combat et qu’un des protagonistes ne peut plus lutter, que faisons-nous ? Qui va nous rembourser. Et je pense que cette mission devait incomber au CNG. On est laissé à nous même et le CNG est là que pour signer des contrats alors qu’il devait plus s’impliquer. Les responsables de cette structure sont des gens qui ont beaucoup fait pour la lutte, même s’il y a eu des hauts et des bas comme dans toute chose. Il faut que les membres de ce comité sachent que l’ère des rois et empereurs est révolue.

Ndamli.sn : Quand vous dites L’ère des rois et empereurs est révolue, que voulez-vous dire ?

Prendre des décisions sans faire de concertation

Ndamli.sn : Quelque part, vous rejoignez donc l’association des lutteurs en activité dans leur position ?

Je ne rejoins personne, c’est ma pensée. On organise des combats et le CNG régule, quoi de plus normal qu’à la fin de la saison, ou au début qu’on se retrouve autour d’une table même pour boire un café. A la limite, on dirait qu’ils cachent quelque chose. Encore une fois ce sont des gens que je respecte beaucoup, mais là on parle du travaille et il faut dire les choses telle qu’elles sont. La lutte contribue beaucoup à la stabilité du pays donc il faut faire preuve de vigilance

Ndamli.sn : On parle de développement, à un moment, le débat sur l’imposition des cachets de lutteurs a été soulevé, quel est votre avis ?

On est au Sénégal et il y a des choses qu’on ne peut pas expliquer surtout dans le milieu de la lutte. Il y a des personnes dans le gouvernement qui ont organisé des combats mais qui n’ont pas eu à renouveler cette expérience. Pourquoi le CNG n’organise-t-il pas des combats ?

Ndamli.sn : Je vous retourne la question, vous qui êtes promoteur

Allez leur demander (rires). Quand ils vous répondront, vous allez comprendre que la lutte est un milieu très délicat. Il faut être un homme pour être et rester dans la lutte. Je déclare mes impôts et je les paye correctement

Ndamli.sn : A vous écouter le combat Modo lô/Eumeu Sène n’aura plus lieu (Lire première partie itw : Luc Nicolaï : « L’affiche Modou Lô/Eumeu Sène ne m’attraie plus »), qu’allez-vous faire pour compléter cette saison qui s’annonçait « explosive » pour Luc Nicolaï & Co ?

Il y a de plus belles affiches, laissez-moi avec mes surprises

Ndamli.sn : En parlant de surprise, vous avez prévu d’organiser un championnat cette saison ?

Le championnat est sur place, nous allons le débuter en janvier à Mbour. Cette fois-ci, nous allons organiser les combats dans les régions. 8 jeunes lutteurs répartis en 2 poules vont s’affronter. Des lutteurs « ténors » dans leur région vont aussi y participer. Nous comptons beaucoup innover surtout côté spectacle. Nous voulons sortir des signatures classiques avec notre nouveau partenaire orange.

Ndamli.sn : Gaston et vous êtes tous les deux désormais sponsorisés par Orange, allons nous vers un calumet de la paix entre les 2 plus grands promoteurs de la lutte sénégalaise ?

Mais je n’ai pas de problème avec ce Monsieur

Ndamli.sn : Mais vous l’avez traité récemment de « saboteur »

Justement « saboteur » n’est pas une insulte

Ndamli.sn : Ce n’est pas une qualité non plus ?

C’est tout ce qu’il est pour moi. C’est tout ce que je lui ai dit. Et je sais que quelque part, quand il se couche parfois, il repense à ce que je lui ai dit et ça le fait sursauter

Ndamli.sn : Gaston qui est aussi votre ainé dans le milieu de la lutte, pense que vous avez commis une erreur en remettant à « Atta » l’avance sur le cachet de Eumeu Sène. Il vous arrive vous aussi de vous coucher et de vous dire « j’ai peut être fait une erreur » ?

Le dernier combat de Eumeu Sène qu’il (Gaston Mbengue NDLR) a organisé, il a aussi remis l’avance à Gris bordeaux. Si moi j’ai été naïf, lui il l’a été avant moi.

Ndamli.sn : Les prochaines élections présidentielles auront lieu en 2012, certains acteurs de lutte sénégalaise commencent à se positionner pour un tel ou pour un tel autre, et Luc Nicolaï ?

Ce que je fais là c’est de la politique. Organiser des combats c’est faire de la politique.

Ndamli.sn : Je reformule, allez-vous vous engager auprès d’un leader politique, et si oui ce serait qui ?

(Eclats de rires) je ne vous dirai ni oui ni non