Le combat contre la corruption sera sans
doute l’enjeu majeur du quinquennat de Macky Sall. Bennoo bokk yaakaar s’engage
à faire de la gestion optimale des ressources la trame de sa gouvernance.
C’était avant le 26 mars. Avant que Abdoulaye Wade
n’appelle Macky Sall pour le féliciter et reconnaître sa défaite. A droite, la
coalition des Fal 2012 récite les mesures prises par le régime libéral pour
contrecarrer la corruption. A gauche, les membres de Bennoo bokk yaakar
s’engagent de leur côté à appliquer l’ensemble des recommandations formulées
par la coalition formée par le Forum civil et Enda Graf ainsi que les
propositions exprimées par l’ensemble des segments de la société civile pour
faire de la bonne gouvernance une réalité dans la gestion des ressources
publiques. Au milieu, Mouhamadou Mbodj, le coordonnateur du Forum civil qui
tente avec peine de contenir la nervosité par moment des deux camps. A défaut
de Macky Sall et Abdoulaye Wade ce sont les lampistes de deux coalitions qui
sont venus décliner, devant tous les segments de la société civile ainsi que
des représentants de quelques organes de contrôle des finances publiques les
mesures futures à prendre en vue d’endiguer la corruption et par ricochet
arrêter la saignée des ressources publiques distraites par le biais de ce
fléau.
Le député libéral Doudou Wade et ses camarades se sont
bornés à lister une série de décisions prises par le régime pour circonscrire
la corruption. Bien sûr que le régime libéral peut se targuer que la Commission
nationale de lutte contre la non transparence la corruption et la concussion
(Cnlcc) et l’Autorité de régulation des marchés publics (Armp) aient vu le jour
sous son magistère. Certes les retards sur le vote des lois de règlements sont
en train d’être rattrapés. Sans nul doute que le changement de paradigme
intervenu dans le management avec l’avènement du Cadre de dépenses à moyen
terme (Cmdt) aura vocation, par le passage de la logique de moyens à une gestion
axée sur les résultats à donner plus d’efficacité à la dépense publique. A
l’actif du régime défait également la gestation d’une loi sur l’accès à
l’information qui fera sûrement de l’information des citoyens sur le bon emploi
des deniers publics, les effets des politiques menées et de la participation
citoyenne dans la définition des politiques publiques un impératif
démocratique. Mais la dégringolade du Sénégal dans l’indice de perception de la
corruption de Transpirancy International, la multiplication des scandales et
l’impunité érigée en règle pour les pourfendeurs de la bonne gouvernance, qui
ont pris des libertés avec la discipline budgétaire, n’ont d’égal que
l’inefficacité et la vacuité de ces organes de contrôle des finances publiques
à lutter efficacement contre la corruption. Suffisant pour que les partisans de
la coalition Bennoo bokk yaakar considère que « le Sénégal est à terre sur
le plan de la gouvernance ». Difficile de ne pas être d’accord avec eux.
Bien sûr qu’il n’est pas indiqué de parler de corde dans la maison d’un pendu.
Mais à l’évidence les déclarations et gesticulations du régime libéral se sont
heurtées au principe de réalité. A titre illustratif, dans l’indice 2011 de
perception de la corruption publié par Transparency international le Sénégal
s’est classé 112e sur 182 pays. Enfonçant le Sénégal dans la zone dite rouge
qui regroupe les pays les plus corrompus de la planète. Après s’être classé 99e
en 2009 avec un score de 3 points et 105e en 2010 avec cette fois ci un score
de 2,9 sur 10, puis 112e cette année, notre pays a reculé de 13 places en
l’espace de seulement deux ans. Un épisode qui demeure emblématique d’une
gouvernance mise à rude épreuve. Cette contre-performance presque endémique est
à mettre sur le compte de l’absence de transparence dans l’attribution de
concessions d’exploration et/ou d’exploitation minière, des contrats de
concession notamment de l’hydraulique publique. Mais également la gestion
nébuleuse de l’affectation des terres, les modifications intempestives et
fréquentes du code des marchés publics ou encore l’absence de transparence dans
la passation des marchés notamment dans le secteur des hydrocarbures et celui
des infrastructures.
2,6 pointS de perte de croissance
Dans son diagnostic de la gouvernance dans les secteurs
de la santé, de l’éducation, de l’environnement et des ressources naturelles,
des ressources halieutiques et foncières et de l’eau, Sémou Ndiaye du
Laboratoire de Recherche sur la Gouvernance (Lareg) a établi la faible
gouvernabilité de ces secteurs au Sénégal. Une situation préjudiciable à
l’économie en ce sens qu’elle participe d’une part à tirer vers le bas la
croissance et d’autre part à accroître le nombre de pauvres annihilant du coup
les efforts des politiques de réduction de la pauvreté dont le Sénégal a fait
la trame de sa politique économique. A ce sujet, analysant l’impact de la
corruption sur la pauvreté et la croissance économique ; l’économiste
Joseph Cabral a prouvé qu’elle réduit considérablement les investissements
publics et privés. « Une perte de 10% des investissements publics du fait
de la corruption fait perdre 2,6 point de croissance au Pib, 1,2% de perte de
bien être », révèle Cabral. Cette réaction de la croissance à la corruption
est confirmée par l’économiste Abdoulaye Seck, qui estime à 384 milliards les
pertes pour l’économie nationale soit la moitié de nos recettes d’exportation.
Indubitablement, la correction d’une telle situation
requiert l’application de mesures fortes. Aussi le Forum civil et Enda Graf
ont-ils proposé un catalogue de recommandations pour une gestion optimale des
maigres ressources du pays. Il s’agit, entre autres exhortations
« d’adapter le cadre juridique et institutionnel de lutte contre la corruption
aux standards internationaux ». Au cœur de ces recommandations figure
également la nécessité de doter la Cnlcc de pouvoir de saisine, d’autosaisine
et d’investigation ; rendre à l’Armp sa prérogative d’initier et de
proposer toute mesure législative ou réglementaire de nature à améliorer le
système ; renforcer les pouvoir de la Cour des compte notamment de sa
Chambre de discipline. Lever l’impunité financière et faire reculer la
passivité de la justice devant certains scandales avérés ou allégués passe
également par la compétence liée du procureur de la république. Outre le
renforcement des attributions des organes de contrôle, il est préconisé de
régler la question du financement des partis politiques. S’y ajoute
l’assujettissement d’une catégorie d’agents publics à l’obligation de
déclaration de patrimoine : le président de l’assemblée nationale, le
président du Sénat, le Premier ministre, les ministres, secrétaires généraux et
directeurs de cabinets des ministères etc. Décidés à adosser leur gouvernance à
la Charte de bonne gouvernance démocratique des Assises nationales, Moubarack
Lô et ses camarades ont naturellement pris un paquet d’engagements qu’ils
promettent de mettre en œuvre incessamment. L’état des lieux des
privatisations, l’octroi de pouvoirs supplémentaire à la Cour des comptes en
termes de capacités humaines et d’autonomie financière, le renforcement de
l’indépendance du Conseil supérieur de la magistrature sont inscrits dans le
tableau de bord de Bennoo bokk yaakaar. La coalition promet également la
transposition immédiate de la Convention des nations unies sur la lutte contre
la corruption dans le droit national. Et évoquent la nécessité de contrôler
l’utilisation des fonds politiques par le président de la République,
d’inscrire les marchés du parlement dans le champ du code des marchés publics.
La mise en place d’un groupe de suivi des promesses électorales permettra de
faire le monitoring de tous ces engagements.
Réconcilier le citoyen avec les institutions
Avec l’élection de Macky Sall comme président de la
République, la page Wade est désormais derrière nous. La fermeture de ce
chapitre douloureux exhibe un flot de scandales symptomatiques de la gestion
calamiteuse de Wade fondée sur la prédation des ressources publiques, les
gabegies publiques et le népotisme. Sans aucun doute, Macky sall n’aura aucune
de difficulté à mesurer les conséquences de cette gestion désastreuse sur
l’économie nationale et le bien être des populations sénégalaises. L’Inspection
générale d’Etat (Ige), la Cour des comptes, l’Autorité de régulation des
marchés publics (Armp), la Commission nationale de lutte contre la non
transparence, la corruption et la concussion (Cnlcc) ont produit une série de
rapports épinglant la gestion de plusieurs ministres, directeurs de sociétés
publiques, d’agences ou d’établissements à participation publique majoritaire.
Les plus symboliques sont celles de Karim Wade à l’Anoci, la gestion des
ressources du plan Takkal, celle de Awa Ndiaye, de Baïla Wone à la Lonase, les
privatisations de la Sonacos, des Industries chimiques du Sénégal etc. Sans
oublier l’attribution de la troisième licence de télécommunication à Sudatel.
Transaction dans laquelle le Trésor public a été délestée de 20 milliards de
Fcfa. Ces épais rapports qui dorment encore dans les tiroirs du palais de la
République et de la justice documentent de manière exhaustive la mal
gouvernance dont on fait montre les libéraux. Parmi les grands défis qui se
posent à Macky Sall figure donc la réconciliation des Sénégalais avec les institutions.
Une réconciliation qui ne peut toutefois pas se faire sans justice. Il ne
s’agira pas de « verser dans la stigmatisation, non plus dans la chasse
aux sorcières » mais de mettre fin à l’impunité érigée en règle depuis 12
ans. De toute évidence il y’aura un avant et après 25 mars.
Et les Sénégalais qui n’ont pas cédé à la fatalité de la
défaite s’attendent à des ruptures dans la gouvernance. Que la gestion du
régime libéral soit auditée afin de situer la responsabilité des uns et des
autres conformément à la charte de bonne gouvernance des Assises nationales qui
mentionne clairement que « Les biens communs et les deniers publics sont
sacralisés ; tout détournement et toute utilisation indue de biens publics
seront sévèrement sanctionnés selon la loi, quel qu’en soit l’auteur ». Ce
signal fort contribuera, en plus de faire de l’obligation de rendre compte des
décideurs publics un impératif de gestion et de justice, de réarmer moralement
les citoyens qui savourent une victoire obtenue dans la douleur.
8 Commentaires
Ka Kol
En Avril, 2012 (20:39 PM)Deg Deug
En Avril, 2012 (20:47 PM)Repondre | +0 -0
Diankalaar
En Avril, 2012 (20:55 PM)Walfadjri
En Avril, 2012 (08:07 AM)Guéleward
En Avril, 2012 (09:34 AM)mûre pour la démocratie. Les Etats africains seraient juste bons pour
la corruption d'Etat, le recyclage de l'aide publique au développement
pour financer les campagnes électorales de la tutelle coloniale.
la techniques de comptabilité multiples et mensongères pratiqué par des
entreprises étrangères dans le continent Africain , en plus du Franc
CFA dont la gestion est fondée sur une des plus grosses escroqueries
d'Etat de l'histoire de l'économie et du droit international, certain
pays Africains ne voient que du feu.
A vous de juger
Bbndao50
En Avril, 2012 (10:44 AM)Backe Diop
En Avril, 2012 (21:34 PM)Copa
En Avril, 2012 (10:23 AM)NB. EN EUROPE UNE VOITURE EST VEILLE POUR SON USAGE NON POUR SON AGE.
NB: ENTREE DE VEHICULES SUR SIMPLE VISITE TECHNIQUE
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