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Mamadou DIOP ‘ CASTRO ’, Sg de l'Uden : ‘ Les coupures de salaire ne nous feront pas reculer ’

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Mamadou DIOP ‘ CASTRO ’, Sg de l'Uden : ‘ Les coupures de salaire ne nous feront pas reculer ’
Malgré l’accalmie apparente notée depuis la rentrée scolaire, il y a lieu d’être pessimiste quant au bon déroulement des cours dans les écoles pour la présente année. Mamadou Diop ‘Castro’, Secrétaire général de l’Uden et figure de proue de l’Intersyndicale enseignante, sonne l’alerte. Dans cette première partie de l’entretien qu’il nous a accordé, ‘Castro’ pointe un doigt accusateur sur le gouvernement qui a créé ‘les conditions de perturbations’. Et ce ne sont pas, selon lui, les menaces du ministre de l’Education élémentaire qui vont tempérer l’ardeur des syndicalistes.

Wal Fadjri : L’année dernière a été marquée par des grèves cycliques, peut-on aujourd’hui parler de risques de perturbations scolaires cette année ?

Mamadou DIOP ‘Castro’ : Absolument, parce que nous sommes dans un secteur dynamique où la demande est sans cesse croissante, pendant que les réponses restent toujours insatisfaisantes. Il nous faut des hommes qu’il faut à la place qu’il faut, par rapport au système éducatif. L’éclatement même de ce ministère (à cause des grèves de l’année dernière, le ministère de l’Education a été scindé en trois départements ministériels : Ndlr) crée les conditions de perturbations. Il y a un affaiblissement au niveau de l’administration et un affaiblissement au niveau de la qualité des hommes qui gèrent le système éducatif. Cinq ministères ont la charge de gérer ce système en dehors des autres ministères qui sont dans l’environnement social de l’enseignant : le ministre de l’Education en charge du Préscolaire et du moyen, le ministère de l’enseignement Secondaire, des collèges et des Centres universitaires régionaux et des universités, le ministre de l’enseignement Technique et de la formation professionnelle. Il y a également le ministère de la Culture qui gère l’Alphabétisation et les langues nationales ; l’Agence de la case des tout-petits qui gère la petite enfance ; Il s’y ajoute l’Urbanisme, le Budget, le ministère de la Famille, le ministère des Sports, le ministère de la Jeunesse.

Wal Fadjri : Ce morcellement ne rend-il pas la gestion du système plus complexe ?

Mamadou DIOP ‘Castro’ : Il y a que le ministère est un creuset, un centre autour duquel gravitent plusieurs électrons. Et cela complique davantage la gestion du système, retarde l’examen des dossiers, le règlement des questions qui se posent aux parents, aux enseignants et aux apprenants ; la gestion des conflits qui éclatent et concernent plusieurs centres de décisions. Indépendamment de cela, il y a une bombe à retardement, c’est-à-dire les corps émergents. Beaucoup de revendications nouvelles se rapportent à ces catégories d’enseignants qui ont des difficultés énormes au niveau de leur statut, au niveau de la formation et au niveau de leur promotion. Les corps émergents sont sources d’instabilité. Le gouvernement pensait contourner les difficultés ou surmonter les obstacles en faisant recours à ces formes particulières de recrutement, mais aujourd’hui il est pris dans son propre piège, parce que le relèvement du taux brut de scolarisation n’est pas une fin à soi.

La massification a pris le pas sur la qualité et aujourd’hui nous sommes en train de vouloir rattraper le terrain perdu. Les enseignants réclament de meilleures conditions de travail. Aujourd’hui, ce qu’on voit n’est guère reluisant ; ce sont les abris provisoires, les classes à double flux ; c’est le manque de matériel pédagogique, les conditions de recrutement, la promotion des enseignants, les conditions de rémunération. Hier, nous étions considérés comme les mieux traités de la Fonction publique, aujourd’hui nous sommes au bas de l’échelle. Cela est une source d’instabilité.

Wal Fadjri : Face à votre stratégie de riposte, il y a les menaces du ministre consistant à couper les salaires, en cas de grève. Qu’en dites-vous ?

Mamadou DIOP ‘Castro’ : C’est de l’enfantillage. Je disais tantôt qu’il nous fallait des hommes capables de se hisser à la dimension des ambitions démocratiques de ce pays. Nous ne pouvons pas opter pour la résolution pacifique des conflits, pour le dialogue social et continuer à menacer les citoyens dans leur chair et leurs os ou les agresser parce que tout simplement ils réclament le droit à la manifestation pacifique, le droit d’association, le droit de grève, le droit à la négociation collective. Le gouvernement doit créer un cadre d’épanouissement des citoyens et en ce qui nous concerne un cadre d’échanges, de concertations, de consultations avec les syndicats d’enseignants à chaque fois que de besoin pour une gestion apaisée du système éducatif. Le gouvernement doit changer de fusil d’épaule, ce ne sont pas les menaces qui feront reculer les syndicats, ce ne sont même pas les coupures de salaire qui feront reculer les syndicalistes. Malheureusement, les anciens syndicalistes sont toujours de mauvais ministres, on ne sait pas pourquoi. Qu’ils soient à la Fonction publique ou au ministère de l’Education, ils se sont toujours mal comportés dans leurs relations avec les organisations syndicales. Aujourd’hui, Kalidou Diallo ne fait pas l’exception à la règle. Et il entraîne dans son sillage même les techniciens de son ministère, notamment le directeur de l’Enseignement élémentaire qui ne se contente pas seulement de ménager les coupures des salaires, mais qui parle de radiation (rires). C’est dommage pour notre pays que nos gouvernants n’aient pas une culture démocratique qui leur permet de gérer correctement les conflits ou d’anticiper sur les conflits.

Wal Fadjri : Cette situation n’influe-t-elle pas sur la qualité des ressources humaines ?

Mamadou DIOP ‘Castro’ : L’évolution des droits est un facteur favorable à l’épanouissement des travailleurs. Les coupures de salaire, c’est pour empêcher l’exercice du droit à la grève, c’est nous empêcher d’exercer nos droits. Cela est une entrave à l’exercice du droit syndical. C’est une violation des droits humains, économiques et sociaux notamment. Comment peut-on opposer le droit syndical au droit à la vie ? La législation dans ce domaine doit évoluer. Les organisations syndicales n’ont jamais accepté que les coupures de salaire soient opérées, parce que le travailleur va en grève quand le patronat le pousse à bout. Le préavis de grève demande au travailleur d’observer une période d’attente d’un mois pour permettre à l’employeur de créer les conditions du dépassement de la crise. Mais, si cela n’est pas fait, la loi nous autorise d’aller sur le terrain, de nous agiter. Au lieu de sanctionner l’Etat ou le gouvernement pour n’avoir pas respecté la réglementation en vigueur, on veut sanctionner le travailleur qui est dans son droit. On nous dit pas de travail, pas de salaire. Mais ce n’est pas dans le cadre d’un préavis de grève où la rupture du contrat découle du non-respect de la réglementation par l’employeur. Nous ne pouvons pas assimiler la grève à un abandon de poste, nous ne pouvons pas assimiler la grève à une rupture unilatérale du contrat dès lors que la grève est réglementée. Face à un Etat sourd, muet et aveugle, la grève est et demeurera.

Wal Fadjri : Ces menaces ne découlent-elles pas de la division des organisations syndicales, laquelle division profite au gouvernement ?

Mamadou DIOP ‘Castro’ : C’est une vision étroite que de compter sur la division du mouvement syndical ou même de chuchoter la division syndicale pour ne pas répondre aux préoccupations des syndicats d’enseignants. Dans un partenariat authentique, il faut des partenaires crédibles, nous avons besoin d’un Etat fort et crédible. Les syndicats doivent se regrouper pour ne parler que d’une seule et même voix face au gouvernement. Cela crée les conditions de l’amélioration du dialogue social et du mécanisme de concertation, de consultation et de l’approfondissement de la démocratie dans notre pays. Les syndicats ne l’ont pas compris et ils sont en train d’en payer les frais. La participation responsable a fait son bilan. Les corrompus ont fait leur bilan. Ceux qui occupent le terrain de la lutte ont aussi fait leur bilan. Et maintenant, nous avons tous décidé de marcher ensemble dans la même direction face aux propositions du gouvernement.

Même si, nous ne nous sommes pas retrouvés, pour faire ensemble un bilan, chacun a fait son bilan. Et la conclusion est qu’il faut travailler à dépasser les clivages et à défendre les intérêts de l’école et des enseignants. C’est pourquoi, l’Intersyndicale se prépare à aller vers les autres syndicats d’enseignements pour une concertation large sur les propositions du gouvernement. En tout cas, nous souhaitons que cette introspection puisse déboucher sur des formes d’organisations qualitatives qui nous permettent de minorer les effets de l’éparpillement des cadres, de la dispersion des forces pour le rassemblement de tous les ruisseaux du mécontentement vers un torrent revendicatif.

Wal Fadjri : Aujourd’hui, on note partout dans les établissements scolaires des agissements, il y a de quoi être pessimiste…

Mamadou DIOP ‘Castro’ : Les apprenants se mêlent à la tâche. En effet, à l’université, les étudiants s’agitent pour des meilleures conditions d’études et de vie. Il n’y a pas suffisamment d’universités dans ce pays. Le gouvernement traîne les pieds dans la mise en place des Centres universitaires régionaux. Le recrutement du personnel pose problème. Le taux d’encadrement à l’Université est extraordinaire. On fait recours à des vacataires dans l’enseignement supérieur qui restent six mois sans percevoir leur salaire. Tout cela est également source d’instabilité et de perturbation.

Les élèves au niveau du moyen et du secondaire sont dans les rues. Ils réclament des professeurs, il n’y en a pas assez. Le gouvernement ne peut plus suivre le rythme d’extension des réseaux ; la massification à la base, au niveau de l’élémentaire, entraîne une massification du moyen-secondaire. Il faut beaucoup plus de collèges, de professeurs, et de matériels pédagogiques. Avec l’électrification nous avons d’énormes difficultés. Comment gérer le parc informatique sans électricité ni solaire ? Comment gérer les photocopieuses ? Tout ce qui vient des nouvelles techniques d’information et de communication pose problème dans un pays où les délestages se font en longueur de journée ; où il n’y a pas également d’électricité dans certaines localités, cela est aussi une source d’instabilité et de perturbation. A cela s’ajoutent les conditions de travail des enseignants et les conditions d’études des apprenants.

Wal Fadjri : Où en êtes-vous avec le dialogue social ?

Mamadou DIOP ‘Castro’ : Pour le dialogue social, le gouvernement a tardé, l’année dernière, à ouvrir les négociations. Nous avons passé toutes les vacances sans pouvoir reprendre les discussions. C’est seulement, en octobre, que nous avons commencé à discuter et ces discussions ne sont toujours pas terminées. Sur les questions pédagogiques et, surtout, sur les nouvelles propositions du gouvernement, sur les Indemnités de recherche documentaire (Ird) et sur le logement, qui sont jugés insatisfaisants, il n’y a toujours pas eu d’accords.

Wal Fadjri : Justement, par rapport à ces propositions du gouvernement, jusqu'à présent il n’y a pas de réponses de l’Intersyndicale. Qu’est-ce qui est à l’origine de ce retard ?

Mamadou DIOP ‘Castro’ : C’était l’ouverture des classes qui ne permettait pas la gestion des propositions du gouvernement qui ont été faites, seulement le 8 octobre 2008. Maintenant, les assemblées générales de comités électoraux, des comités intersyndicaux locaux se sont prononcées. Nous en avons fait la synthèse. Et la plénière de l’Intersyndicale a considéré que les propositions du gouvernement ne sont pas satisfaisantes. Elles sont inacceptables du point de vue du concept qui a été utilisé en lieu et place de l’Ird. Le gouvernement, lui, parle d’Allocution de soutien scolaire. Nous avons jugé que c’est un concept dévalorisant. Il va falloir inventer un nouveau concept. Nous, nous disons simplement Indemnité de recherche documentaire. Les propositions, également sur le plan quantitatif, sont inacceptables. Pour les moyens secondaires, l’indemnité, même si elle est appelée compensatoire de surcharge horaire, gravite entre 60 et 70 mille francs Cfa.

Les inspecteurs de l’enseignement du préscolaire et de l’élémentaire viennent de bénéficier d’une indemnité d’encadrement de 150 mille francs par mois, intégrée dans le salaire. Mais le gouvernement propose aux instituteurs une enveloppe en deux tranches, notamment en juin et en octobre, c’est inacceptable ! Nous avons besoin d’une indemnité pérenne, mensuelle, intégrée dans les salaires. Parce qu’entre dix mille francs en 2009 et quinze mille francs en 2011, et le minimum dans le secondaire et le moyen qui est de 60 mille francs et les 150 mille francs du corps de contrôle, il y a une disparité énorme ; sans oublier les 300 mille francs à l’Université, qui sont versés également en deux tranches au titre de l’Indemnité de l’académie spéciale.

Nous disons que c’est la même famille. Nous revendiquons une Indemnité spécifique aux corps enseignants, qui s’appelle Indemnité d’académie spéciale à l’université, Indemnité de compensatoire de surcharge horaire pour le secondaire et moyen. Et cette indemnité appelée Allocution de soutien préscolaire pour l’élémentaire que nous réfutons. Mais nous disons également que les autres enseignants sont concernés : il s’agit des techniciens horticoles, des formateurs et éducateurs spécialisés. C’est pour dire qu’il y a encore du pain sur la planche. Et nous attendons d’harmoniser avec les autres syndicats d’enseignants puisque, nous en avions arrêté le principe d’une concertation entre syndicats d’enseignants pour aller vers le gouvernement avec une position consensuelle. *(A Suivre)



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