Mamadou Sèye (Inspecteur d’académie de Sédhiou) : ‘ Je vais prendre des mesures contre les enseignants qui enceintent des élèves ’

Mamadou Sèye : Elle s’inscrit dans le cadre des Crd spéciaux de rentrée que nous avons l’habitude d’organiser. Cette fois-ci, nous avons cherché d’abord à faire un diagnostic de la situation, un état des lieux. Il était important de le faire compte tenu de la situation particulière de Sédhiou qui s’est classé dernier au classement national aux derniers examens. Alors, pour redresser la barre, il fallait dresser un diagnostic sans complaisance. C’est dans ce contexte particulier marqué par ces résultats qui ont provoqué une onde de choc chez nous, que nous avons décidé de réfléchir pour dégager des stratégies de sortie de crise. Et vous avez noté avec moi l’engagement de l’ensemble des acteurs du système éducatif (autorités administratives, politiques et académiques, enseignants, organisations syndicales et parents d’élèves) qui sont mobilisés et décidés à relever l’ensemble des défis.

Wal Fadjri : Vous avez retenu la date du 10 octobre pour le démarrage effectif des cours. Avez-vous pris en compte la question liée à la mise en place des abris provisoires ?

Mamadou Sèye : Ma conviction est que l’école, c’est d’abord des élèves et un maître. Si on a des élèves et un maître, on a déjà une école. Mais il faut que les gens apprennent à fonctionner à partir des réalités de l’heure et de l’environnement. Nous sommes dans une zone où il y a plein d’abris provisoires. Déjà, depuis l’année dernière, le bon gestionnaire aurait dû prévoir qu’à la rentrée d’octobre, la situation des abris allait se poser. Ce n’est pas maintenant qu’il faut attendre pour avoir des ‘kérinting’, mais ce sont des choses qu’on aurait dû garder quelque part et après un désherbage immédiat, mettre les piquets et construire les abris provisoires, fonctionner en attendant qu’il y ait des programmes de résorption de ces abris provisoires. Vous n’êtes pas sans savoir que pour ce qui concerne l’élémentaire, le ministre a signé une convention pour le Fastrac. Et, avec ce programme, la région de Sédhiou bénéficiera de trois cents salles de classe qui vont être construites. Nous avons également, pour ce qui concerne l’élémentaire, trente salles de classe qu’on nous a offertes récemment et que j’ai détournées volontairement pour les mettre à la disposition du moyen où le besoin est beaucoup plus pressant. Nous avons également introduit des requêtes avec l’Anrac et au niveau du Projet d’appui d’urgence de la reconstruction de la Casamance (Parc 2). Nous pensons donc que beaucoup de problèmes seront résolus.

Mais, il ne s’agit pas d’attendre que les problèmes soient résolus pour aller dans les classes. Il s’agit de créer les conditions, de prendre en charge les enfants et de faire en sorte qu’on puisse respecter le quantum horaire. Sans quoi, c’est la catastrophe. S’il faut attendre le mois de décembre pour commencer les cours et arrêter dès que la pluie tombe au mois de mai, les gens ne pourront jamais faire de résultat. Nous nous sommes parlé, nous nous sommes dit des choses, nous nous sommes compris et le 10 octobre, les gens seront dans les classes.

Wal Fadjri : Vous avez également décidé d’aller en guerre contre les grossesses précoces dans les établissements scolaires. Quelles sont les mesures prises à cet effet ?

Mamadou Sèye : Il faut reconnaître d’abord que cela n’est pas sérieux. Parce que chacun d’entre nous est, d’abord, parent d’élèves. Je comprends que, quelque part, les jeunes enseignants affectés sont des enfants qui n’ont peut-être pas l’expérience qu’il faut et qui n’ont pas peut-être cette prise en main qu’ils auraient dû avoir du côté de certains managers d’établissement. Parce qu’un chef d’établissement doit pouvoir prendre en charge l’éducation de son enseignant qu’on lui a affecté, pour lui montrer la voie royale, pour ne pas qu’il tombe dans certains travers.

Mais une élève fille s’appelle : touche pas. D’ailleurs, il est même demandé à l’enseignant d’avoir un certain type de comportement. Et j’ai décidé que personne ne touche à mes filles. Je suis prêt à aller en justice avec les fauteurs de trouble. Je suis également prêt à prendre des mesures administratives contre ces enseignants qui enceintent des élèves. Je ne suis pas d’accord et je ne serais jamais d’accord. J’entends me battre contre ça et de toutes mes forces. Et je serais intransigeant par rapport à cette donne.

Wal Fadjri : Le retard du paiement des salaires des corps émergents est souvent un motif de grève. Que comptez-vous faire pour régler cette situation ?

Mamadou Sèye : Les syndicats m’ont accordé une période de grâce jusqu’au 31 décembre. Au-delà de cette date, ils peuvent aller en grève s’ils jugent que je ne suis pas à la hauteur de ma mission. Mais ce que j’ai décidé et en accord avec eux, c’est de rencontrer les institutions financières de la place pour signer avec elles des conventions, pour qu’à la fin du mois, les enseignants puissent percevoir leur salaire en attendant que l’académie puisse verser la contre-partie. Mais cela ne sera possible qu’à partir du mois de janvier. Parce que d’ici là, c’est l’académie de Kolda qui continue de gérer le personnel.