Offrande mortelle : la police décide de sévir contre la rumeur

Une folle rumeur sur des offrandes mortelles s’est emparée du Sénégal depuis plusieurs jours, faisant des conducteurs de véhicules utilitaires, des victimes potentielles de la furie des populations. C’est à bord de ces véhicules que de prétendus agents maléfiques circuleraient, donnant une offrande bien particulière, un kilogramme de viande et un billet de 10 mille francs. La victime alléchée meurt des suites de cette offrande, sans que la clameur populaire dise pourquoi et comment. La rumeur est partie de la ville de Saint-Louis pour se propager dans l’ensemble du pays, avec la bénédiction des journaux People, friands de ce genre de ragots. Une personne a été copieusement lynchée et n’a eu la vie sauve que par la dextérité d’un journaliste, Golbert Diagne, qui avait lui-même appelé les populations à la vigilance face à ces sorciers au col blanc.

Selon la radio dakaroise RFM, un groupe de scientifiques parti mener une étude dans un petit village  de Linguère, au centre du pays, s’est sauvé de justesse. La nature faisant bien les choses, le véhicule utilitaire qui transportait les scientifiques leur a sauvé la vie. L’instituteur qui raconte ce guet-apens raté en a eu des sueurs froides. Les villageois avaient commencé à encercler leurs victimes avec une patience méticuleuse, armés de sabres et de gourdins. Ayant remarqué un comportement inhabituel chez ces grands éleveurs au sang chaud, l’instituteur averti leur a demandé de renoncer à leurs prélèvements et de s’y prendre par 4X4.

Le journal Walf Gran’place relate le cas de  deux personnes qui ont  échappé  à une scène de lynchage dans le village de Diouroup à 12 kilomètres de la région de Fatick. Ibrahima Diop et  Mame Ndella Dione ont failli y laisser leur vie, surpris par une masse curieuse. Ils étaient à bord d’une Renault 25. Pour dire que la foule vigilante ne fait plus de discrimination. De l’avis du sociologue Djiby Diakhaté, « nous sommes en présence de deux facteurs explicatifs, dont le premier a trait avec la crise socio-économique dans laquelle  baigne le pays. Et en second lieu la volonté de l’Etat  d’arriver  à bout  de la mendicité  phénomène  qu’il  a combattu par différents moyens  sans y réussir, et par des stratégies détournées ».

L’affaire est tellement prise au sérieux que le gouvernement a émis un communiqué mettant en garde les personnes qui seraient tentées de s’en prendre à des personnes du seul fait de leur profilage, sans aucune preuve. L’affaire, il est vrai, vient au mauvais moment pour les dignitaires du régime, qui roulent souvent dans ces grosses cylindrées aux vitrines ambrées. La rumeur a décidé de s’en prendre à ceux qui circulent dans ces rutilantes bagnoles et mangent la viande. Quand la plèbe veut se venger, elle trouve toujours les moyens.