Même si les génies sont mis en cause dans les accidents sur la route de Ouakam, nombre d'habitants du village traditionnel demeurent convaincus que l'indiscipline des automobilistes et l'état des routes est à indexer.
Les opinions divergent sur les causes de la recrudescence des accidents aux abords des Mamelles de Ouakam, considérées comme une zone fortement à risque s’agissant des accidents. Même si des Saltigués ont fait des sacrifices pour lutter contre les accidents qui seraient dus, selon certains, à la colère des génies. Et pour cause, les travaux effectués sur les routes seraient sur leur demeure, c'est pourquoi, on assiste toujours à des accidents. Tel était le cas mardi, quand un minibus a heurté un taxi et renversé un conducteur de scooter, ce dernier a été grièvement blessé.
Assane Sarr, chauffeur de taxi, une des victimes, n'est pas de ceux qui lient les accidents aux humeurs des génies de Ouakam. «Ce qui cause les accidents, ce n'est rien d'autre que l'indiscipline des chauffeurs. Je viens d'être victime de la mauvaise conduite de ces ignorants. Je roulais à une vitesse normale et ce chauffeur de minibus venant du sens inverse est arrivé à toute allure pour renverser le conducteur de scooter qui était derrière moi. Il a touché l'arrière de mon taxi. Et insolent qu'il est, il n'a même pas pris la peine d'appeler les sapeurs-pompiers», explique-t-il. Toute dernière victime d'un choc sur ces lieux «à risque», le taximan estime que «cette histoire d'esprits ne tient pas debout. Il faut que les chauffeurs revoient leur comportement et respectent le code de la route».
Ayant requis l'anonymat, cet homme, la cinquantaine, taille moyenne, commerçant de son état, tient un tout autre discours. Déplorant la mauvaise construction de la route, il explique que «ce n'est pas un problème de raps (génies), c'est la route qui est mal construite. Parce que, ce qui est bizarre, c'est que ce ne sont que les voitures en provenance de la Corniche Ouest qui font des accidents. Mais parce que une descente, les voitures qui viennent du camp des Mamelles doivent s'arrêter. Mais ce n'est pas le cas, elles ne s'arrêtent pas, surtout les cars rapides».
«Certains Saltigués arnaquent les autorités en leur demandant de l'argent pour faire des sacrifices»
Le Saltigué, par ailleurs chef du quartier de Taglou de Ouakam, Mbaye Guèye Dieng, partage cet avis. Trouvé dans sa maison, sous une tente dans la cour, le vieux Dieng est formel : «il y a des esprits qui sont sur cette route, mais ce n'est pas ce qui cause les accidents. Parce que notre rap (esprit) n'est pas méchant, Youdour Guèye Yaata, il s'appelle, est un bon génie. C'est au contraire un protecteur. Il n'attaque pas les gens. Il y a des génies qui le font, mais pas Youdour Yaata».
Selon lui, «ce qui est à la source de la recrudescence des accidents sur cette route, c'est plutôt le mauvais comportement des chauffeurs, qui sont indisciplinés, qui ignorent royalement le code de la route. Le permis de conduire ne doit pas être donné à n'importe qui». M. Guèye Dieng martèle : «la thèse qu'il y aurait un génie sur ce rond-point n'est pas vrai». Il met également en cause la structure de la route. «C'est une sorte de descente et les chauffeurs viennent toujours en vitesse. Certains Saltigués arnaquent les autorités étatiques en leur demandant de l'argent pour faire des sacrifices. Il y a quelque temps, nous avions organisé avec des Saltigués sérères une grande cérémonie de Tourou (offrande aux génies) ou l’on a versé beaucoup de sang pour protéger tout le pays». C'est pourquoi ce qu'il suggère au gouvernement, c'est de prendre des mesures en affectant des agents de sécurité pour gérer la circulation sur cette zone.
Contrairement au Saltigué Mbaye Guèye Dieng, le Jaraaf Youssou Ndoye reste convaincu que les «raps» (génies) étaient à l'origine des nombreux accidents de la zone. Parce que, soutient-il, ces derniers étaient mécontents de la route qui les envahissait. Il explique par ailleurs qu'il faut un retour à la tradition. «Ceux qui disent que ce ne sont pas les ‘raps’ racontent n'importe quoi. Ce qui s'est passé n'est pas le fruit du hasard. Les ‘raps’ ont été offensés. Le résultat le confirme. Quand on a fait les sacrifices, il n'y a plus mort d'hommes liée à un accident à cet endroit. On a organisé une grande cérémonie de Tourou lors des laquelle on a sacrifié des boeufs, des coqs et des chèvres».
Comme s'il voulait répondre à ses détracteurs, le Jaraaf Youssou Ndoye martèle ceci : «mes ancêtres ont fondé le village de Ouakam et je tiens à conserver ce patrimoine coutumier. Ce n'est pas pour rien que je suis le Jaraaf. Je maîtrise l'histoire de ce village. Tout ce que je fais, c'est par amour pour mon village qui est tout pour moi. Alors, je déclare fermement que les ‘raps’ étaient mécontents et tuaient des gens et cela je défie quiconque de me prouver le contraire».
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