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PR. ALFRED NDIAYE, SOCIOLOGUE A L’UGB : « Les imams représentaient les seuls leaders en qui la population pouvait faire confiance »

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PR. ALFRED NDIAYE, SOCIOLOGUE A L’UGB : « Les imams représentaient les seuls leaders en qui la population pouvait faire confiance »

Le travail en amont effectué par les Ong et certains partis politiques, l’absence des syndicats sur le terrain et la faillite des organisations consuméristes ont, selon le Pr. Alfred Ndiaye de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, contribué à la naissance de ce vaste mouvement social contre la vie chère à Guédiawaye. Aussi, les imams sont devenus les seuls leaders sur qui la population peut compter.

Pourquoi, selon vous, ce combat est parti de Guédiawaye et pas des autres localités du pays ?

A mon avis, il faut comprendre le combat des résidents de Guédiawaye comme un combat contre la vie chère. Sous cet angle, on ne peut pas dire que le combat est parti de Guédiawaye. On peut donner plusieurs exemples où les populations de plusieurs localités à Dakar et dans les régions ont protesté contre la vie chère avant Guédiawaye. Cependant, pour Guédiawaye, on a assisté à ce que nous pouvons appeler un mouvement social, bien structuré, avec des objectifs clairs, une stratégie de lutte et une direction. C’est ce caractère de mouvement social qui fait la différence entre la protestation sociale contre la vie chère à Guédiawaye et ailleurs dans les autres localités du pays. Mais la protestation sociale contre la vie chère est bien présente sur l’ensemble du pays.

Pourquoi le collectif des imams a-t-il senti la nécessité de monter au créneau en appelant les populations au boycott, à la désobéissance civile ?

A mon avis, il ne s’agit pas d’un Collectif des imams, mais du Collectif des résidents des quartiers de Guédiawaye, qui est un Collectif multiconfessionnel et multi confrérique. Les imans sont membres de ce Collectif et servent de catalyseurs à cette lutte. Cette lecture, à mon avis, permet de comprendre le statut que les imams jouent dans ce collectif. Ils sont membres de ce collectif avec des chefs de quartiers et d’autres notables qui ont des expériences politiques. Quand on analyse le profil de certains de ces imams, on constate que la plupart du temps, ils sont des retraités de l’administration ou du secteur privé. Ce qui leur permet de rompre plus facilement avec le modèle de l’imam assisté par les populations ou les pouvoirs publics, donc, imam fragile face aux ordres dominants (l’Etat ou la direction de la confrérie). Le muliticonfrérisme de ce collectif ne facilite pas non plus son contrôle. Mais, l’élément décisif à mon avis, est constitué par le travail long et patient des Ong sur l’engagement citoyen. Guédiawaye est une zone très investie par les Ong et je pense que ce mouvement est quelque part le fruit de leur travail. Le travail de certains partis politiques y est sans doute aussi pour quelque chose. Et dès le départ, le Collectif a déclaré que son combat s’inscrit dans un cadre citoyen qui utilise des méthodes qui s’appuient d’abord sur la participation des populations qui sont les principaux acteurs. C’est le principe de la responsabilisation des acteurs eux-mêmes, de l’action à la base. Maintenant, la grande question est la suivante : dans ce Collectif des résidents de Guédiawaye, pourquoi le leadership est occupé par les imams ? Les imams eux-mêmes l’ont expliqué : faible présence des partis politiques et absence des syndicats sur ce front de la vie chère, faillite des organisations de consommateurs. A un moment donné, dans leurs quartiers, ils représentaient les seuls leaders en qui la population pouvait faire confiance pour leur demander de s’impliquer activement dans ce combat. Naturellement, ils pouvaient s’abstenir, mais leurs expériences spécifiques militaient plutôt en faveur de leur engagement.

Pourquoi ont-ils ciblé dans leur lutte, l’électricité et non les denrées de première nécessité ou encore les questions de viol ?

Pourquoi l’électricité et non les denrées de première nécessité ou les questions de viol. Pour deux raisons essentiellement. D’une part, un mouvement social structuré se fixe toujours des objectifs accessibles et consensuels et une cible claire. L’avantage de la lutte contre la cherté de l’électricité est d’avoir une cible claire, identifiable : l’Etat. Les populations, en particulier les populations urbaines, ont traditionnellement un contentieux lourd et permanent avec l’Etat et les municipalités pour des raisons évidentes. Il est plus difficile de mobiliser les populations contre la cherté des denrées de première nécessité qui, faut-il le rappeler, sont commercialisées par une frange des populations elles-mêmes. La cible est forcément floue pour un mouvement social de quartier dont les membres peuvent aussi être des commerçants qui peuvent trouver leur compte dans l’augmentation de certaines denrées. Même pour les groupes les plus engagés sur le plan citoyen, le viol n’est pas prioritaire dans leur agenda. Ce n’est qu’une question de temps.



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