Face aux accusations du procureur de la République pour asseoir son réquisitoire à charge, Momar Ndao, président de l’Association des consommateurs du Sénégal (Ascosen) et Jean Pierre Dieng, responsable de l’Union nationale des consommateurs du Sénégal ont tout nié en bloc. Quand le procureur les accuse d’avoir défié l’autorité en voulant coûte que coûte organiser une marche interdite, Momar Ndao, devant la barre rejette les accusations. ‘Nous n’organisions pas une marche, mais nous voulions tenir un sit-in devant les locaux du groupe Wal Fadjri pour expliquer les propositions que nous avions faites au ministre du Commerce qui avait déclaré qu’il n’y avait pas de solution jusqu’en 2015. c’est cela le principe de la déclaration que nous allions tenir. Notre objectif, c’était de faire passer ce message selon lequel il est possible de baisser les prix. Malheureusement, ce jour-là nous n’avons même pas eu le temps de faire passer notre message et la police nous a arrêtés de façon musclée. Mais nous ne voulions pas défier l’autorité’, se défend Momar Ndao, président de l’Ascosen, habillé d’un grand boubou ample de couleur marron avec ses binocles bien placées sur le visage. Même réponse entendue chez Jean Pierre Dieng, responsable de l’Union nationale des consommateurs du Sénégal (Uncs) tout de blanc vêtu. Les deux responsables d’organisations consuméristes ont nié, catégoriquement, être liés de près ou de loin à la destruction de trois bus de la société de transport Dakar dem dikk comme l’a soutenu à la barre du tribunal, la partie civile. D’ailleurs la partie civile avait réclamé 5 millions de dommages et intérêts.
Cependant dans leur défense, Jean Pierre Dieng et Momar Ndao n’étaient pas seuls. Loin s’en faut. Les deux responsables d’organisations consuméristes ont été défendus par douze avocats. Il ressort de l’ensemble des plaidoiries des avocats de la défense que ‘derrière ces deux présidents d’associations de consommateurs, il y a l’ensemble des Sénégalais qui subissent la cherté de la vie’. Ce qui fera dire à Me Abdou Dialy Kane, s’adressant aux juges, qu’ils n’ont ‘même pas besoin de (leur) code pénal, mais de la Constitution parce qu’il est établi que l’arrêté préfectoral est totalement illégal. Il ne peut pas toujours prendre pour prétexte le trouble à l’ordre public pour interdire les marches’. Ainsi, a t-il plaidé la relaxe de ses clients.
A sa suite, Théophile Kayossi a fulminé tout de go que ‘le Sénégal n’est plus un Etat de droit’. Avant de formuler quelques observations sur l’utilisation des matraques électriques par les forces policières. ‘Je me demande pourquoi les autorités ont autorisé l’utilisation des matraques électriques, mais ce sont des dangers. Il faut remercier le ciel qu’il n’y ait pas encore de mort, mais si cela continue, il y en aura’, certifie t-il.
Me Papa Ndiaye dans sa plaidoirie a insisté sur la ‘faim du peuple sénégalais’, estimant que l’acte d’interdiction de la marche prise par le préfet de Dakar est nul par ce qu’il n’a pas de force probante. Me El Hadji Diouf, un autre avocat de la défense a plaidé dans le même sens. ‘On ne peut pas continuer à interdire des marches, cela fait désordre. Les magistrats doivent mettre un terme à cette violation des droits de l’homme’, lance El Hadji Diouf. ‘Personne ne peut embrigader un peuple, sinon il va exploser un jour. Le chef qui n’accepte pas de dialoguer avec son peuple ou d’écouter son peuple sera balayé un jour’, prédit l’avocat et non moins député de la coalition Sopi.
Me Jacques Baudin a, pour sa part, rappelé au début de sa plaidoirie les déclarations de l’ancien président de la Cour suprême lors la prestation de serment du président Abdou Diouf quand il disait ‘les Sénégalais sont fatigués’. ‘Je préfère être fatigué que mourant sur un lit d’hôpital.
Aujourd’hui les Sénégalais sont mourants’, martèle t-il. Me Baudin a dit devant le tribunal qu’il ne comprend pas qu’au Sénégal ‘on laisse au repos ceux qui créent la famine et on arrête ceux qui crient à la famine’. Après ces observations, Me Jacques Baudin a plaidé la relaxe pure et simple de ses clients par ce qu’avant leur arrestation, il n’y a pas eu de sommation. Me Massokhna Kane embouchera la même trompette. Selon lui, ce sont plutôt les policiers que l’on devrait traîner devant la barre du tribunal des flagrants délits. Il a aussi dénoncé l’utilisation des matraques électriques et a promis de porter plainte contre la police devant le Comité de lutte contre la torture.
Après la plaidoirie des avocats de la défense, le tribunal a mis en délibéré cette affaire jusqu’au mercredi 16 avril 2008.
Rappelons que Momar Dieng et Jean Pierre Dieng ont comparu libres par ce qu’ils bénéficient d’une liberté provisoire depuis le 02 avril 2008.
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