L’affaire des 2,5 tonnes de cocaïne saisie en juin dernier sur la Petite côte atterrit à la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar. Ce ne sont pas les personnes interpellées dans ce trafic à grande échelle qui comparaîtront devant le juge, mais le directeur de publication et un journaliste du quotidien « Le Populaire ». Djibo Kâ, ministre de l’Economie maritime à l’époque, s’estime diffamé par un article relatif à cette histoire. L’affaire, qui n’a pas été retenue hier, a été renvoyée à une autre date.
Le vendredi 3 août dernier, le quotidien d’information de proximité « Le Populaire » titrait, en gros caractères, à sa une : « Couverture des narcotrafiquants arrêtés à Mbour : Ce que Djibo savait... ». A la page 7, un article signé par Pape Sarr s’interroge : « projet de crevetticulture à Ndangane Sambou, blanchiment et couverture : les narcotrafiquants avaient-ils des complices dans l’appareil d’Etat ? ». L’article en question fait savoir : « au début du mois de juillet, et en une semaine, la Gendarmerie démantelait un réseau très dense de trafiquants de drogue qui couvraient leurs activités grâce à plusieurs sociétés écrans montées dans le cadre de ce trafic. Parmi ces couvertures, poursuit l’article, un projet en crevetticulture monté à dessein afin de maquiller le trafic dans le village de Ndangane Sambou (Communauté rurale de Fimela, région de Fatick). La Gendarmerie, ajoute l’auteur de l’article, a éventé le coup. Quelques jours plus tard, le ministre de l’Economie maritime, Djibo Leyti Kâ, se faisait limoger de son poste en permutant avec le ministre d’Etat, ministre de l’Environnement et de la Protection de la nature, Souleymane Ndéné Ndiaye. Si son implication réelle dans les opérations montées par les trafiquants reste à être prouvée, il demeure qu’il a donné son accord à l’installation du projet de crevetticulture à Ndangane », précise l’article.
Le journaliste Pape Sarr de conclure : « en l’état actuel de nos investigations (qui se poursuivent), on peut bien dire que les soupçons sont bien grands qu’au niveau de l’Etat, en tout cas, l’on a bien fermé les yeux ». Ces passages sont interprétés par les avocats de M. Kâ comme des « allégations » mettant en cause leur client par des « insinuations ou sous la forme interrogative ». Le plaignant s’estime diffamé également par un autre passage laissant croire qu’il a été question d’un rapport qui serait une « béquille scientifique » dont le but serait d’avaliser « un projet sérieux de blanchiment de l’argent sale et de trafic de drogue ». Ces affirmations sont perçues comme établissant un lien avec la charge de ministre d’Etat, ministre de l’Economie maritime qu’il occupait au moment des faits. Estimant qu’elles ont été faites avec une « méchanceté manifeste », dans « une intention de nuire » à M. Kâ et de « discréditer avec lui tout un Etat », la partie plaignante réclame justice. D’autant plus que, dit-on, l’article du « Populaire » vise à amener le lecteur à croire que Djibo Kâ serait impliqué, en sa qualité de ministre, dans une histoire de trafic de drogue et qu’il serait auteur ou bénéficiaire de pratiques illicites de blanchiment d’argent.
Par conséquent, le plaignant demande au juge de condamner le directeur de publication Yakham Mbaye et Pape Sarr, poursuivi pour complicité, et la société « 7 Editions Sa », éditrice du « Populaire », à lui allouer juste le franc symbolique à titre de dommages et intérêts pour un préjudice qualifié d’extrêmement grave. La partie civile sollicite également la suspension du « Populaire » pour une durée de trois mois. Une décision à assortir de l’exécution provisoire. Djibo Kâ, au cas où le tribunal lui donnerait gain de cause, veut non seulement que la décision du juge soit publiée dans neuf quotidiens sénégalais, mais également dans des journaux étrangers comme « Jeune Afrique L’Intelligent », le quotidien français « Les Echos », les journaux britanniques « The Times » et « The Financial times » et le « New York Times » des Etats-Unis.
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