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Production d'oignons de la vallée : Résoudre l’équation de la mévente

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Production d'oignons de la vallée : Résoudre l’équation de la mévente

Les producteurs d’oignons de la Vallée, qu’il pleuve ou qu’il vente, triment comme des forçats, et sont maigrement payés en retour, par rapport à la somme des efforts colossaux qu’ils abattent dans le cadre de leur contribution à la sécurité alimentaire. L’activité représente aussi un excellent outil de lutte contre la pauvreté et la création de richesses additionnelles. Si toutefois les récoltes sont vendues à un prix réel. Comme un métier que l’on met au travail, malgré les déficits structurels chroniques, les producteurs ne peuvent s’empêcher de retourner au dur  labeur. Même s’ils savent, par avance, qu’ils seront la proie des  intermédiaires, qui achètent le kilo d’oignons à 30 francs puis attendent  tranquillement le gel des importations pour revendre le kilo à plus de 400 … francs. C’est là une  « injustice » que  dénoncent les producteurs. Il faut que ces derniers vendent leurs récoltes à un prix aussi dérisoire, c’est pour éviter de les voir pourrir. Cela met sur le tapis les variétés utilisées, et la planification dans le calendrier cultural, d’autant plus que tous sèment et récoltent en même temps. La maturité est donc synchrone. C’est la raison pour laquelle, la mévente constitue le principal goulot contre la culture de l’oignon dans la vallée du fleuve. Rien que dans cette partie du pays, les producteurs assurent qu’ils sont capables de subvenir aux besoins du Sénégal en ce qui concerne l’oignon. Cependant, il faudra, au préalable, qu’une solution, bénéfique pour tous les acteurs, soit trouvée entre les pouvoirs publics, les opérateurs économiques et les producteurs, cela, pour également résoudre l’équation de la mévente. 

Communauté rurale BOKHOL : Les producteurs d’oignon sollicitent l’accompagnement des aurorités 
La culture  maraîchère constitue indéniablement la carte de visite de la communauté rurale de Bokhol (département de Dagana).  L’oignon, qui est la deuxième culture d’importance après la tomate, y connaît un dynamisme certain. Malheureusement, les producteurs cumulent beaucoup de difficultés. Selon eux, leur seule localité pourrait couvrir les besoins de consommation du pays pendant toute l’année, à condition que l’Etat les accompagne en les finançant de l’aménagement à la commercialisation. Et le gel total des importations  décidé récemment par le comité de pilotage de la filière, pour la période du 10 février au 31 août 2013, pourrait leur permettre de retrouver le sourire.
Située à 11 kilomètres de Dagana, la communauté rurale de Bokhol, qui couvre une superficie de 7800 km2, polarise 40 villages. Cette localité, très dynamique, tire l’essentiel de ses revenus de ses riches terres maraîchères, qui ont, depuis fort longtemps, déterminé sa vocation agricole. Dans la Vallée du fleuve où quelque 120.000 tonnes d’oignon sont produites, Bokhol constitue une gigantesque oignonière. Ses terres se prêtent bien à la culture des bulbes. L’oignon, tout comme la tomate, n’y aurait jamais fait une aussi belle carrière s’il n’existait pas de nombreuses potentialités, à savoir la disponibilité des terres et de l’eau, mais aussi  le savoir-faire et l’engagement des producteurs qui, depuis la nuit des temps, tirent parti du moindre espace de terre arable. Cette détermination pour l’agriculture constitue, pour les producteurs qui y exploitent de grandes surfaces pour des rendements de 25 à 45 tonnes à l’hectare, une source de revenus non négligeable. Malheureusement, les belles performances réalisées dans les champs ne sont pas doublées d’un franc succès économique. Chaque campagne, les producteurs voient leur trésorerie s’assécher et leurs bénéfices fondre.
 
L’importation, principale menace 
L’importation massive d’oignon terrasse l’économie de la filière. Chaque année, ce sont des milliers de tonnes d’oignon qui pourrissent dans la Vallée, particulièrement à Bokhol, faute d’acheteurs. « Bokhol a d’énormes potentialités agricoles et la filière oignon, tout comme celle de la tomate, est un des maillons importants de l’économie locale. Quand vous venez à Bokhol, vous voyez de grandes quantités d’oignon exposé à l’air libre. Cela démontre la capacité de cette zone et de ses producteurs à produire des quantités d’oignon considérables. Cela indique aussi les difficultés des producteurs à écouler leurs produits à un juste prix. Tout simplement parce que les marchés sont inondés par l’oignon importé. Avec cette situation, les producteurs sont obligés de vendre à un prix cassé et s’en débarrasser pour le plus grand profit des commerçants, mais pour le malheur des paysans », se plaint Adama Diagne, un producteur assis près de ses tas de sacs d’oignon. Selon Moustapha Mbengue, président de l’union des Gie des producteurs de Bokhol qui regroupe près de 2500 producteurs, « chaque année, notre pays importe quelques 60.000 tonnes d’oignon, cela représente des  milliards ; alors qu’on peut le produire dans la Vallée du fleuve. L’oignon souffre de l’importation à cause d’un manque de structuration ». Lors de la dernière campagne, les producteurs avaient exprimé leurs difficultés à écouler leur production. 
Un accord avait été trouvé avec l’Etat et avait abouti à l’arrêt des importations de l’oignon, de février à août 2012. Cette mesure avait pour objectif de faciliter la commercialisation de l’oignon local. Mais cela n’a pas eu les résultats escomptés, car certains opérateurs réfractaires ne se sont pas sentis tenus par l’obligation de se conformer à cette disposition. Conscients du danger que représente l’importation sur la culture de l’oignon au niveau local, les producteurs de Bokhol tirent la sonnette d’alarme. « Il est temps de freiner l’importation d’oignon, car ça ne construit pas l’avenir de notre filière », soutient M. Mbengue, qui plaide pour un soutien de l’Etat pour les aider à reconquérir des parts de marché de la filière fortement menacée. Le développement de la culture de l’oignon dans la Vallée du fleuve Sénégal est confronté à une kyrielle de difficultés. Et aujourd’hui, la volonté des producteurs est de gérer leur filière au mieux de leurs intérêts. Ces professionnels du secteur souffrent de conditions défavorables de valorisation, de structuration du marché, de commercialisation. La volatilité des prix met leur filière dans un univers de plus en plus incertain et fait que des  milliers de producteurs risquent de faire une croix sur leur activité. Les difficultés que connaissent certains d’entre eux risquent, si des actions ne sont pas prises, de compromettre le devenir de cette filière stratégique. M. Mbengue et ses camarades veulent que l’Etat  accomplisse un effort supplémentaire pour les accompagner, mais aussi s’engage à fixer un prix pour l’oignon et la tomate comme il le fait pour l’arachide. « Le kilo d’oignon est cédé à 50 francs. En période de rush, le prix est bradé et le kilo vendu à 30 ou 20 francs et le sac de 45 kg à 1.500 francs. Comme ça, si quelqu’un vient, il ne pourra pas acheter en dessous de ce prix là », a indiqué Moustapha Mbengue. 
Les autres contraintes ont pour nom coût élevé des intrants agricoles de qualité, de l’engrais, des équipements d’irrigation et autres outils d’amélioration de la productivité, faible disponibilité financière pour la plupart des producteurs, réduisant considérablement leurs capacités de production.

Coût de production élevé
Les acteurs de la filière se sont ainsi plaints des conditions d’exploitation difficiles. « Bokhol est une zone agricole par exemple, mais le problème est que nous avons un sol lourd. L’oignon est une spéculation qui se cultive difficilement. Pour travailler ici, il faut nécessairement faire des façons culturales avec des tracteurs. C’est donc un problème qui nous empêche de produire comme il faut », a expliqué M. Mbengue. « Les aménagements sont vieux et les réhabilitations coûtent très chers. C’est pour cette raison que nous demandons au gouvernement de nous aider dans ce domaine-là. 
Cela nous permettra d’augmenter la production pour parvenir à l’autosuffisance en oignon et bien approvisionner le marché et limiter les importations », a-t-il ajouté. Autre casse-tête pour les acteurs de cette filière : le coût de production très élevé dans la Vallée. « Le kilogramme d’oignon coûte 100.000 francs et  il nous faut 6kg pour faire 1ha. Pour les façons culturales, il faut environ 100.000 francs pour faire 1ha. Pour le coût hydraulique, il faut payer entre 80 et 100.000 francs sur certains pompages pour irriguer 1ha », a relevé M. Mbengue, qui a, en outre, expliqué que « si en Casamance il  faut 65.000 francs pour un hectare d’oignon,  il faut cependant débourser 300.000 francs dans la vallée ».  
Selon lui, la cherté des coûts de production n’est pas compensée par les prix bas enregistrés sur le marché et qui risquent fort d’entraîner le secteur dans une situation fâcheuse. « Ces handicaps, nous ne pourrons pas les surmonter si nous n’avons pas de financements. Nous avons toujours dit à l’Etat que nous n’avons pas besoin qu’on nous donne de l’argent ou quoi que ce  soit. Ce dont nous avons besoin, ce sont des facilités pour accéder aux financements. 
L’essentiel de l’oignon est fait par des privés. L’initiative privée, c’est la seule manière de développer l’agriculture, l’élevage, donc le pays. Mais on dirait que l’Etat oublie cela », a-t-il laissé entendre, en assurant qu’avec de telles facilitations, les producteurs de Bokhol pourront produire pour le pays pendant presque douze mois. « Pour qu’il y ait un amortissement du prix au producteur, il faut que l’Etat nous aide par des subventions. Nous n’avons pas besoin de subvention de l’engrais. Ce dont nous avons besoin, c’est une subvention sur le prix au producteur. La subvention de l’engrais ne profite qu’aux fournisseurs, pas les agriculteurs qui n’y gagnent rien », a-t-il expliqué. 
En sus de toutes ces difficultés, l’un des obstacles des plus contraignants de la filière demeure l’amélioration du stockage de l’oignon, car une bonne partie de la production se détériore. « La surproduction et les perspectives de pourrissement de la récolte, provoquent le désarroi chez certains producteurs, qui sont souvent contraints d’accepter n’importe quel prix proposé », soutient Cheikh Diop, un paysan qui précise que certains sont même obligés de squatter les marchés hebdomadaires pour écouler leur production, ou de brader leur oignon à des commerçants véreux. « Avec nos pauvres moyens, nous produisons, mais nous avons toutes les difficultés du monde pour écouler notre production. Et nous n’avons pas non plus les moyens de le transporter. Les commerçants font de sorte que nos oignons pourrissent ici pour importer. Faute d’infrastructures de conservation adéquates, beaucoup de producteurs ont dû brader leur production à vil prix », a fait savoir Moustapha Mbengue. « Quand il y a surproduction, il y a forcément mévente.

Infrastructures de stockage
Les producteurs sont confrontés à un problème d’écoulement de leurs récoltes, à cause de la saturation des marchés », a expliqué El Hadji Guèye, le président de la communauté rurale de la localité. Et en l’absence de magasins de stockage, a-t-il dit, beaucoup d’agriculteurs observent, impuissants, les gousses d’oignon  pourrir dans les sacs. Pour palier ces difficultés et permettre aux producteurs de jouir du fruit de leur labeur, l’Etat a acquis, grâce au soutien de l’Union européenne, dans le cadre du programme de renforcement et de développement de capacité commerciale (Prcc) du 10ème Fed, la construction, dans cette localité, d’un magasin de stockage d’une capacité  de 100 tonnes. La délibération du site devant abriter ce magasin a été effectuée depuis trois ans par le conseil rural. « La construction de cette infrastructure est un vieux vœu des populations qui se réalise enfin. Elle jouera un rôle important dans l’étalement des exportations de l’oignon toute l’année », a-t-il indiqué.  « Avec ces magasins, le cauchemar des producteurs sera un lointain souvenir, car cet entrepôt de conservation va apporter une véritable révolution dans la filière oignon en réduisant les pertes considérables. Les producteurs de la zone seront désormais en mesure de commercialiser presque toute l’année », a indiqué le Pcr de Bokhol. Pour rendre la filière beaucoup plus performante, les producteurs soutiennent que les efforts doivent se concentrer sur l’amélioration des systèmes techniques de production, la commercialisation, mais aussi sur la régularisation. « Si nous avons la mécanisation, le financement, l’argent pour atténuer le coût hydraulique, rien ne nous empêchera de contribuer à l’atteinte de l’autosuffisance en oignon et réduire l’importation de cette spéculation », a-t-il assuré. 
La décision du comité de pilotage de la filière oignon de geler les importations  pour la période du 10 février au 31 août 2013 afin de protéger l’oignon local dont les prévisions de production, pour la présente campagne, portent sur 250. 000 tonnes pourrait bien aider ces producteurs qui n’ont qu’un seul souci : sortir la filière oignon des eaux troubles.


Par Saliou Fatma LO



5 Commentaires

  1. Auteur

    Na

    En Mars, 2013 (08:29 AM)
    pas de com pour un suject aussi important. Thiey senegal, Allah, sex, fait divers rek.

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  2. Auteur

    Taftaf Records

    En Mars, 2013 (08:39 AM)
    l faut à mon avis commencer à penser à envahir les marchés mauritanéens et Maliens.... Et faire une grosse campagen de pub pour le consomé local .... En commençant par Consommer local ou barsakh, Consommer local ou pauvreté chronique, Consommer local ou tuer nos enfants
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    Auteur

    Taxawsiggil

    En Mars, 2013 (09:29 AM)
    C'est l'Etat qui devrait mettre en place des infrastructures de conservation (au Solaire) de l'oignons dans toutes ces localités.

    Ils ont raison de dire que l'on ne devrait plus importer de l'oignon au Sénégal. C'est juste une question de volonté de l'Etat.

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    Auteur

    Citoyens

    En Mars, 2013 (10:09 AM)
     :sn: 
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    Auteur

    Deug

    En Mars, 2013 (14:12 PM)
    Pourquoi le gel total des importations décidé récemment par le comité de pilotage de la filière, pour la période du 10 février au 31 août 2013? Une grande quantité d'oignons importés est entrain de pourrir au port alors que la population ne voit même pas la production locale qui est plus cher que celle importée et moins bonne. Alors de grâce laissez sortir ces oignons, la population peut en bénéficier. Le gel des importations ne profitent qu'aux intermédiaires. Je ne peut pas comprendre que des produits locaux coûtent plus chers que des produits importés.
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