Rapports de Wade avec les religieux : Dix ans de favoritisme et de brouille

Le fossé entre les différentes confréries religieuses, n’a jamais été aussi profond que sous l’ère de l’alternance. Et le président de la République, qui a, très tôt, affiché son parti-pris en faveur de la confrérie mouride, y est pour quelque chose. Contre les principes de la laïcité, Abdoulaye Wade montre de manière ostentatoire son appartenance religieuse et surtout confrérique, là où ses prédécesseurs affichaient avec l’indifférence. Le chef de l’Etat ne met pas de gants et ne rate aucune occasion pour montrer son appartenance, au point de créer des tensions entre les confréries. En visite à Touba, au lendemain de son élection, il exhiba, sans gêne, son appartenance confrérique en allant s’agenouiller devant le khalife général des Mourides de l’époque, Serigne Saliou Mbacké. Cette soumission du président de la République à une personne et, au-delà, à une confrérie scandalisa les gens épris des valeurs républicaines, qui avaient crié au scandale. ‘La République couchée’, avait d’ailleurs écrit, dans une contribution d’anthologie, le Pr. Ousseynou Kane, chef du département de Philosophie de l’Université Cheikh Anta Diop. Devant le tollé général suscité par cette subordination, Me Wade s’était défendu en affirmant qu’il s’était rendu à Touba en tant que talibé, en tant que disciple mouride, non pas en tant que président de la République.

N’empêche, cette soumission avait permis aux Sénégalais et aux autres capitales religieuses de se faire une idée sur le parti-pris présidentiel. Les milliards de francs injectés dans la ville pour sa modernisation ont outré les autres capitales religieuses, en particulier, Tivaouane, Cambérène qui ont manifesté leur colère face à la négligence et à l’abandon dont elles sont victimes, comparées à Touba, la capitale du mouridisme.

Le monument des conflits

Le Monument de la renaissance aura aussi été source de conflit. Cette statue ou monument qu’il défend contre vents et marées, aura été source de conflits entre d’une part Wade et des imans et, d’autre part, Wade et l’Eglise. Dans un excès de colère, il qualifia les chefs religieux hostiles à son monument d’ ’ignorants’.

Mais, c’est avec l’Eglise du Sénégal que l’hostilité atteindra son paroxysme. Wade qui affiche son indifférence depuis son arrivée au pouvoir, ira jusqu’à faire une comparaison alambiquée entre son fameux monument et le Christ. Lors d’une communication au Cices, à l’occasion d’une rencontre des enseignants de la Génération du concret, il s’attaqua, en effet, aux symboles de la chrétienté. Ces attaques sans précédent et les ‘blessures’ infligées à l’Eglise par le président de la République ont culminé quand les forces de l’ordre, pour disperser une manifestation de jeunes chrétiens qui protestaient contre ces ‘blessures’, ont profané la Cathédrale de Dakar en la bombardant avec des gaz lacrymogènes.