RUFISQUE : Le « Mbeuk-ma », nom de code des candidats à l’émigration

L’ambiance des causeries politiques très prisées dans la ville de Mame Coumba Lamb a cédé la place depuis quelques jours à un phénomène qui s’appelle « Mbeuk-ma » (aventure par la mer) qui est en train de vider la vieille ville de Rufisque de sa jeunesse. Les arrestations risquent de ne rien y faire.

Il aura fallu l’arrestation par les hommes du commissaire Mamadou Lamine Niang d’un convoyeur de candidats à l’émigration clandestine, nommé Baye More Fall pour que toute une ville se rende compte de l’ampleur de ce phénomène résultat la mauvaise passe que traverse l’essentiel de la jeunesse de la ville de Mame Coumba Lamb. En effet les « miraculés » parvenus aux Iles Canaries, participent également à la mobilisation exceptionnelle des jeunes du département vers le “Jihad”, autre appellation de l’aventure de la mer. “Lorsque mes deux fils partaient à l’aventure, je leur avais dit de ne pas oublier la situation de la famille, car la mer qui était jusque-là notre seul et unique recours, n’est plus clémente”, affirme le vieux Moustapha Mbaye pécheur de son état. Le vieux Mbaye d’ajouter : “je comprends la dignité du jeune lébou devant le besoin de sa famille”. A en croire certains citoyens interrogés, ce malaise des jeunes est l’échec d’une mauvaise politique qui n’offre aux jeunes une occupation que lors des tournois navétanes.

“Je ne peux pas comprendre qu’une municipalité aussi vieille que celle de Rufisque, ne puisse pas répondre aux aspirations de la catégorie la plus représentative de sa population”, fulmine Rokhaya Mbengue, en vacances à Rufisque. Très au fait des ambitions de la plate-forme de Diamniadio, cette habitante de Diokoul pense que les autorités locales devraient réfléchir sur les services susceptibles de faire de la vieille cité la “Sillicon Valley” du Sénégal surtout avec ce projet phare du chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade. Un projet dont les jeunes désœuvrés de la ville pourraient constituer l’essentiel des cadres parce que formés et n’étant pas loin du site. Paul Malo Sène, un observateur averti de la ville, convoque la mauvaise traduction de la substance de la décentralisation qui est de rapprocher davantage les dirigeants de leurs administrés. En atteste la commission jeunesse de la mairie de ville, en veilleuse depuis la disparition de El hadji Abiboulaye Diagne qui en était le vice-président. Une situation désastreuse dans une municipalité qui voit ses jeunes répondre aux sirènes affreuses d’un Eldorado qui continue de s’éloigner. Les hommes du commissaire Niang conscients du caractère stratégique que représente Rufisque pour la traversée (Diokoul et la plage qui se situe derrière l’ex-usine Bata) mettent les bouchées double pour dissuader les candidats à l’aventure espagnole. De l’avis des jeunes interrogés, la seule alternative est l’emploi .

“Pendant la campagne électorale, j’avais levé ma main et jusqu’à présent elle est toujours levée”, affirme ce chômeur qui n’écarte pas de prendre le large via le « Mbeuk-ma ».

A terme, c’est la vieille ville qui risque de se vider de ses bras les plus valides, particulièrement dans les quartiers Diokoul Wagg, Nddiouréné et Ndiayéne.