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Saint- Louis - 9 de ses membres tués dans le chavirement d’une pirogue

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Saint- Louis - 9 de ses membres tués dans le chavirement d’une pirogue

Cité perdue au cœur de la savane de Gandon, le village de Salguir Diagne continue de pleurer ses morts. Une descente sur les lieux a permis de se rendre compte de la précarité dans laquelle baignent les populations et de recueillir le témoignage émouvant de la rescapée Aminta Ndiaye.

C’est un véritable parcours du combattant qu’il nous a fallu faire pour accéder à Salguir Diagne. Si proche de la commune de Saint-Louis dont elle n’est séparée que d’une vingtaine de kilomètres, ce village perdu dans la savane de la vaste commune de Gandon est pourtant si éloigné. Eloigné non seulement de la ville de Saint-Louis, mais aussi du reste de la commune de Gandon à laquelle il appartient. Du fait de son enclavement, entrer ou sortir de Salguir Diagne relève presque de l’impossible pour ses habitants.

Par la route, il faut nécessairement disposer d’un véhicule tout terrain au risque de s’embourber dans le sable de la route chaotique qui y mène. Sur cette route, il nous a fallu galérer, affronter les crevasses pendant une bonne heure. Le décor pittoresque avec un paysage qui rappelle la grande savane africaine décrite dans les ouvrages de géographie laisse penser qu’il n’y a pas âme qui vive dans cette vaste étendue de terre peuplée d’arbres et d’arbustes.

Pourtant après avoir parcouru environ une soixantaine de kilomètres, notre randonnée est stoppée par une dizaine d’habitations qui, comme une barrière, font obstacle à la progression des véhicules qui nous transportent. Lieu de tous les rendez-vous depuis le 11 avril dernier, jour du triste drame qui a frappé le village avec la mort tragique de 9 de ses membres dans le chavirement de la pirogue qui les transportait, Salguir Diagne est sorti de l’anonymat malheureusement de la plus triste des manières. Les habitants encore dans la désolation et la consternation gardent les stigmates de cette tragédie. 

«J’ai perdu mon bébé de 6 mois ainsi que mon garçon de treize ans dans ce drame»

Un des trois rescapés parmi les 12 occupants de la pirogue, Aminta Ndiaye, garde encore les stigmates du tragique accident du 11 avril. Agée d’environ 40 ans, cette femme qui n’a plus que ses yeux pour pleurer et à qui il ne reste presque plus personne pour la consoler nous sert un témoignage poignant. «J’ai perdu mes deux enfants dans ce drame. J’avais sur mon dos mon bébé de six mois qui est mort en même temps que mon garçon de treize ans. Leur père est décédé l’année dernière. J’ai enterré dans ce village mon mari et cinq de mes enfants. Moi-même, j’aurais pu rester dans l’eau», révèle-t-elle, le regard hagard et perdu. Elle ajoute la gorge serrée et la voix gênée par des sanglots répétitifs : «C’est le bon Dieu qui a décidé ainsi. C’est difficile de voir ses enfants mourir dans ces conditions sans pouvoir faire quelque chose, mais moi aussi j’aurais pu être repêchée du fond de l’eau.» 

Sur les circonstances du drame, elle est toutefois incapable de dire grand-chose. «Tout s’est passé très rapidement lorsque la pirogue a perdu son équilibre. Nous avons été pris de panique», se contente-t-elle en effet d’expliquer. Son traumatisme ne l’empêche toutefois pas de plaider pour le désenclavement de son village. «Je demande à tous ceux qui peuvent nous aider à avoir une route praticable de se mettre à contribution, nous en avons besoin pour survivre. C’est le seul moyen de nous aider et nous implorons qui peut le faire», confie-t-elle avant de fondre à nouveau en larmes.

«J’ai détaché un bébé déjà mort sur le dos de sa mère pour la sauver»

L’une des rares personnes à arriver sur les lieux au moment du drame, Maguatte Diagne qui nous a accompagnés sur les lieux est encore traumatisé. Rien qu’à l’idée de revoir cet endroit où il a vécu, selon ses propos, des moments qu’il n’oubliera jamais, il a le frisson. «J’ai été alerté par les cris de détresse des femmes qui appelaient au secours. J’ai été le premier à arriver sur les lieux. J’ai immédiatement mis à l’eau une pirogue de fortune trouvée sur la berge. Une fois dans l’eau, j’ai aperçu Magatte Diagne accrochée sur une bassine. J’ai alors ramé de toutes mes forces pour arriver à elle, mais le spectacle que j’ai trouvé sur place m’a coupé le souffle. Elle avait sur son dos son bébé déjà mort asphyxié certainement par l’eau. J’ai détaché l’enfant pour le mettre dans la pirogue avant de voler au secours de la mère mal en point. C’est par la suite que les autres sont venus me prêter main forte pour tirer de l’eau les deux autres rescapés, une fille d’environ 17 ans et un enfant que sa maman avait amené avec elle pour garder son frère. Sur la plage», poursuit-il, le spectacle est indescriptible et insoutenable. «Nous avions devant nous huit corps sans vie étalés à même le sol, rien que des femmes et des enfants. On avait l’impression d’être dans un rêve, personne ne pouvait expliquer ce qui nous est arrivé. Personne n’oubliera jamais ce jour-là, c’est un jour triste qui restera à jamais gravé dans la mémoire collective. Personne ne pouvait résister à ce spectacle. Des hommes d’un âge avancé ont pleuré de chaudes larmes», raconte M. Magatte Diagne.  
   
L’enclavement, principal problème de Salguir

S’il y a un problème qu’il faut régler ici, dans ce village oublié au fin fond de la brousse et dépourvu presque de tout, c’est bien celui du désenclavement. Ce mot est en effet sur toutes les lèvres et est devenu la demande sociale la plus pressante. Dame Diagne, président du regroupement des chauffeurs de taxi de la commune de Saint-Louis et habitant du village de Salguir, rencontré sur place, explique que le principal problème de ses compatriotes demeure la construction d’une digue-route, un pont qui enjambe le fleuve qui ceinture le village qui sans nul doute permettrait aux populations de Salguir de sortir facilement de leur village sans braver les dangers du fleuve et éviterait à ceux qui en ont les moyens d’affronter la route. «Notre village est distant de la route nationale de 200 mètres seulement. Mais pour quitter Saint-Louis et venir jusqu’ici, il faut faire au moins une soixantaine de kilomètres dans des conditions qu’on ne peut pas décrire», souligne-t-il avant de faire remarquer que même si les jeunes du village travaillent sans relâche dans les activités agricoles, leurs efforts sont presque réduits à néant, car l’évacuation de la production est impossible du fait de l’absence de routes.

Absence d’un réseau d’eau potable

L’enclavement n’est pas le seul problème vécu à Salguir. Ici, l’eau potable est également une denrée rare et même inexistante. La seule source d’approvisionnement en eau reste le fleuve. C’est cette eau avec tout ce qu’elle contient comme microbes, bactéries et autres êtres nuisibles qui est puisée par les femmes qui, avant la consommation, procèdent à des opérations de décantation et de filtration. Elle est également utilisée pour les autres besoins dans ce village qui ne dispose pas encore de case de santé et où pour accoucher les femmes sont obligées de faire plusieurs dizaines de kilomètres de route ou de traverser le fleuve dans des pirogues de fortune.



1 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Avril, 2016 (13:21 PM)
    C'est triste qu' on aide nos populations. Toutes ces vies perdues
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