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Secteur de la justice : Entre réalisations et scandales

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Secteur de la justice : Entre réalisations et scandales
Le vendredi 19 mars 2010, l’Alternance a bouclé sa première décennie. Qu’en est-il aujourd’hui du secteur de la justice, à un moment où celui-ci est au centre de toutes les attentions ? De prime abord, les grandes équations juridiques qui n’ont toujours pas été résolues : le cas de l’ex-président tchadien Hissène Habré et l’affaire des neuf mandats d’arrêt lancés dans le cadre du naufrage du bateau Le Joola. A cela s’ajoutent des controverses majeures qui ont émaillé le fonctionnement de ce secteur considéré comme le bras séculier de l’Etat. Il s’agit d’actions relevant de la justice, considérées comme des scandales judiciaires.A l’inverse, cependant, sans prétendre à un bilan exhaustif du secteur en question, des réalisations concrètes ont vu le jour. Même si des problèmes subsistent encore. Rétrospective sur l’évolution de la justice, au Sénégal, de 2000 à 2010 !

CES GRANDS DOSSIERS JUDICIAIRES TOUJOURS EN SUSPENS : De l’affaire Habré aux mandats d’arrêt du Joola

Le premier feuilleton judiciaire de l’Alternance est survenu en 2000, avec l’affaire Hissène Habré, surnommé le ’Pinochet africain’. A la date du 3 février de cette année, des victimes ont déposé des plaintes auprès du doyen des juges d’instruction de l’époque, Demba Kandji. Par la suite, l’ex-président tchadien a été inculpé pour complicité de crimes contre l’humanité et actes de tortures et de barbarie, au préjudice de 40 mille victimes. Les faits ont eu lieu durant son mandat de 1982 à 1990. Lorsqu’elle a été appelée à statuer sur la demande d’extradition formulée par la justice belge, la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Dakar s’était déclarée incompétente, le 4 juillet 2000. Et le 20 mars 2001, les victimes ont interjeté appel, mais la Cour de cassation va confirmer l’arrêt rendu en première instance.

Une nouvelle série de plaintes seront déposées en Belgique, au nom de la ‘compétence universelle’. Nous sommes en janvier 2006 lorsque le président Wade décide de confier le sort du présumé ancien dictateur tchadien à l’Union africaine qui, par la suite, va ordonner son jugement au Sénégal. Pour organiser le procès, le Sénégal réclame 18 milliards Fcfa, destinés à réfectionner l’ancien palais de justice, à l’hébergement et à la prise en charge des témoins tchadiens, au salaire du personnel judicaire, etc. Une somme revue à la baisse sur demande de l’Union européenne qui devrait déterminer le montant à octroyer. Entre-temps, le Tchad a contribué à hauteur de deux milliards de francs Cfa, pour l’organisation du procès de son ancien président.

Le 26 septembre 2002 survient l’affaire du bateau Le Joola, avec le tragique naufrage où, officiellement, 1803 personnes ont perdu la vie au large des côtes gambiennes. A cet effet, neuf mandats d’arrêt ont été décernés par la justice française contre des autorités sénégalaises : l'ancien Premier ministre Madior Boye et son ex-ministre des Forces armées, Youba Sambou, le chef d'Etat-major des Forces armées, Babacar Gaye, le chef d'Etat-major de la Marine nationale, Ousseynou Kambo, le chef d'Etat-major de l'Armée de l'air, Meïssa Tamba, le chef d'exploitation Modou Siguine, le directeur de la marine marchande, Abdoul Diop, et enfin le chef du Bureau de la sécurité maritime, Gomis Diédhiou. C'est au mois de janvier dernier que la Cour de cassation de Paris a abandonné les poursuites contre Mame Madior Boye et Youba Sambou. Le cas des sept autres présumés responsables du drame du Joola reste toujours incertain.

NOUVEAU PALAIS DE JUSTICE, REVALORISATION DES SALAIRES, RECRUTEMENT MASSIF… : Ces acquis qui ont contribué au renouveau de la Justice sénégalaise

A plus d'un titre, les 10 ans de l’Alternance représentent une étape importante dans l’évolution de la chose judiciaire au Sénégal. Grâce, notamment, aux réalisations concrètes qui ont vu le jour durant cette décennie. Parmi celles-ci, le nouveau palais de Justice Lat-Dior. Ce majestueux ouvrage architectural de trois étages, qui se dresse derrière la Maison d'arrêt et de correction de Rebeuss, est le siège de toutes les juridictions de la capitale sénégalaise, exceptés la Cour suprême, le Conseil constitutionnel et la Cour des comptes.

Composé de huit salles d'audiences, d'une grande salle d'accueil, d'une bibliothèque ainsi que d'une salle polyvalente, le nouveau palais de Justice compte en tout 600 pièces. Bâti sur une surface de huit mille m2 au sol, ce joyau est érigé sur un site de 25 mille m2. Sa plus grande salle d'audience a une capacité d'accueil de 1 500 places. Les locaux de l'Ordre des avocats, de l'Union des magistrats, du Syndicat des travailleurs de la justice, la cave pour détenus, l'infirmerie, entre autres, se retrouvent dans ce vaste espace ; en plus des bureaux pour magistrats, greffiers, avocats et autres auxiliaires de l'administration de la justice.

L'augmentation des salaires pour le compte des fonctionnaires de l’administration de la justice, avec au premier chef les magistrats, est intervenue en 2005. Le 22 janvier 2009, le président de la République a offert aux magistrats un site de 70 parcelles, situé près du stade Léopold Sédar Senghor. A cela s’ajoute le recrutement massif des fonctionnaires de la justice. Le statut des greffiers a été relevé avec la satisfaction de la presque totalité de leurs revendications relatives aux indemnités de logement, au reclassement des greffiers en chef à la hiérarchie A, et la liste n'est pas exhaustive. La seule revendication dont les greffiers affiliés au Syndicat des travailleurs de la justice (Sytjust) attendent encore la satisfaction concerne la participation à la judicature. Une revendication qui est aujourd’hui exprimée au rythme d’une série de grèves, dont le dernier mouvement a été observé les 23 et 24 mars. Le ministre de tutelle, El Hadj Amadou Sall, estime que seule une volonté politique pourrait être en mesure de satisfaire cette sollicitation.

Selon des informations recueillies auprès du ministère de la Justice, la part du budget de l’Etat le concernant est passée de 2,02 % en 1999 à 22,84 % en 2007, soit une augmentation en valeur absolue allant de six milliards de francs Cfa à plus de 25 milliards. En 2009, le budget dudit ministère a dépassé le montant de 26 milliards de nos francs, rapportent des documents du ministère.

La justice comptait 229 magistrats en 2000, 16 greffiers en chef et 86 greffiers, tous appuyés par un personnel composé de 140 agents. Mais, l’effort de recrutement opéré a fait émerger 221 nouveaux magistrats et 205 greffiers. Les effectifs des greffiers en chef ont été renforcés d’une cinquantaine d'agents, à la suite d’un concours interne. Le personnel d’appoint, sur lequel l’effort le plus remarquable a porté, a connu une augmentation nette de 2118 agents judiciaires, souligne un rapport du ministère de la Justice.

Sur le plan pénal, des réformes législatives ont vu le jour. Il s’agit notamment de la limitation de la durée de détention préventive (autrefois appelée ‘détention provisoire’) en matière criminelle, pour éviter de longues incarcérations, la création d’une commission d’indemnisation pour les victimes de détention arbitraire, la tenue d’une session de cour d’assises tous les quatre mois pour être en phase avec la lutte contre le surpeuplement carcéral, la criminalisation du trafic international de drogue dure. Aujourd’hui, il est attendu l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur la criminalisation du viol, un fléau qui est en passe de devenir un phénomène de société.

Sur le plan de la justice commerciale, la création de deux chambres commerciales au niveau du tribunal régional hors classe de Dakar, pour le traitement des contentieux financiers et économiques a vu le jour sous l’Alternance.

Le Programme sectoriel justice (Psj), financé par l’Union européenne et la Banque mondiale, entre également dans le cadre des réalisations. Pour boucler la boucle, la constitution d’une Coalition nationale pour la justice est ainsi en perspective, afin de hisser le secteur de la justice au rang de ‘moteur institutionnel de l’émergence économique du Sénégal’, souligne le même document du ministère de la Justice.

DIX ANS DE SCANDALES JUDICIAIRES : La justice et ses ‘dossiers’

Entre 2000 et 2010, le secteur de la justice a été le théâtre de nombre de controverses que certains observateurs qualifient de ‘scandales judicaires’. Sous ce registre, la corruption dans la magistrature a fortement secoué le secteur en question, durant cette dernière décennie.

L'on se rappelle l'affaire dite des ‘chantiers de l'Anoci’, ce contentieux ayant opposé le secrétaire exécutif de l'Anoci, Abdoulaye Baldé, au sieur Pape Malick Ndiaye. Ce dernier, que la presse a surnommé ‘Le corbeau’, a mis en cause l'ancien secrétaire général de la présidence dans une histoire de corruption relative à l'attribution de marchés, dans le cadre des chantiers de la Corniche. Il l'a aussi accusé d’avoir transféré cet argent issu d’une corruption dans des comptes bancaires en Suisse. Mais au bout du compte, Abdoulaye Baldé, actuel ministre des Forces armées, sera blanchi par la Commission nationale de lutte contre la corruption et la concussion (Cnlcc). Celle-ci avait combiné ses actions avec le Collectif de réflexion et d'action contre la corruption et la bonne gouvernance. Ainsi, ont été levées les suspicions entretenues autour de l'affaire des pots-de-vin de l'Anoci.

L'affaire de la juge Aminata Mbaye et Cie reste encore gravée dans les mémoires des Sénégalais. Il s'est agi d'une histoire de corruption dont la magistrate est supposée être le ‘cerveau’. Ce qui avait valu des sanctions disciplinaires aux magistrats impliqués que sont Cheikh Bamba Niang, Jean Louis Turpin et Ibrahima Bakhoum. Ces derniers ont été épinglés par un rapport de l’Inspection générale de l’administration de la justice (Igaj). Le Conseil supérieur de la magistrature a prononcé une sanction exemplaire contre la juge Aminata Mbaye, mise à la retraite anticipée, avec droit à une pension, alors qu’il lui restait encore 10 ans de service.

Le magistrat Théophile Turpin, assesseur au tribunal régional de Dakar, s'est vu signifier une interdiction d’exercer les fonctions de chef de parquet et de chef de juridiction, pendant cinq ans. Le juge Cheikh Bamba Niang, substitut du procureur, a été muté d'office. Son collègue Ibrahima Bakhoum, substitut général du parquet de la cour d’Appel de Ziguinchor, se voyait aussi interdit d’exercer ces fonctions. Les autres personnes concernées que sont les nommés Djibril Ndiaye, Momar War Seck et Me Mamadou Diop, El Hadj Rawane Fall, le greffier Yabal Guèye Dieng, ont fait l'objet d’une condamnation effective d’un an de prison.

L'année 2009 a principalement été marquée par l'affaire du sieur Youssou Guèye, impliqué dans une histoire d’escroquerie portant sur la somme de 350 millions de Fcfa, au préjudice de l'homme d’affaire tunisien Dridi Mohsen. Ce scandale judiciaire a été à l’origine d’importantes sanctions au sommet de la magistrature et du parquet général. C’est ainsi que le procureur général Mandiogou Ndiaye a été remplacé par le procureur général, près la cour d’Appel de Dakar, Abdoulaye Gaye.

La notaire Me Aïssatou Guèye Diagne s’est, pour sa part, vu infliger une suspension de trois mois par la Chambre des notaires, pour faute professionnelle concernant son implication dans une affaire portant sur le foncier. Il lui a été reproché d’avoir acheté la maison de Momar War Seck au profit de sa nièce mineure de 14 ans.

Le cas de Mme Nafi Ngom Keïta, Inspectrice générale d’Etat, restera à jamais dans les esprits des observateurs. Elle aussi a subi des sanctions disciplinaires pour avoir publiquement accusé le ministre des Finances du Sénégal, de malversations financières.

L'année 2010 vient d’être entamée avec l'affaire Daniel Goumalo Seck. L'ancien directeur général de l'Agence de régulation des télécommunications et des postes (Artp) est accusé de détournement de deniers publics et d’abus de biens sociaux, portant sur 135 millions de francs Cfa, au même titre que sept membres du Conseil de régulation, dont le magistrat Issakha Guèye. Cette affaire reste toujours pendante devant la justice.



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