Spéculation foncière à Ouakam : De hautes institutions de l’Etat au banc des accusés

Les travailleurs et la direction de la société de transport Dakar dem dikk (Ddd) dénoncent ‘une spéculation foncière scandaleuse’ qui sévit au sein de leur société. Leurs cibles : les Impôts et domaines, le Cadastre et le ministère des Finances. Hier, ils ont immobilisé le trafic pendant plus de trois tours d’horloge pour donner le signal d’une lutte qui risque d’être âpre.

L’espace qui fait office de dépôt de bus à Ouakam risque de disparaître de la carte pour servir à autre chose. Il se vend comme du gâteau au grand dam des travailleurs de l’entreprise. Lesquels ont installé hier, au banc des accusés, de hautes institutions de l’Etat, notamment les Impôts et domaines, le Cadastre et le ministère des Finances. En effet, face à la presse, les agents de la société de transport ont informé que ces institutions, par le biais de leurs représentants, ont convoqué le directeur de Ddd, Christian Salvy, pour lui intimer l’ordre de déguerpir les lieux du dépôt. Des lieux qui étaient déjà vendus. Il s’agit de ceux abritant la Mosquée, la salle d’arts martiaux et l’infirmerie. ‘C’est dommage de constater que des institutions étatiques sont mêlées à cette spéculation foncière scandaleuse. Et parmi ceux qui ont acheté ces terres, nous en connaissons même des ministres et nous en parlerons le moment venu’, a averti le secrétaire général du Syndicat démocratique des travailleurs de Dakar dem dikk (Sdt 3d), Djibril Guèye Ndiaye. D’ailleurs, depuis 2001, constatent les agents, le dépôt de Ouakam ne cesse d’être dépecé. Et sur les 12 hectares du dépôt, il ne reste plus que 7 hectares. C’est ainsi que les ateliers centraux comprenant un investissement en matériel lourd pour l’entretien et la maintenance des bus et une carrosserie des techniciens pour la remise à niveau des bus ont été vendus.

Quelques années plus tard, le centre de formation comprenant une grande piste d’essai des véhicules réparés et un lieu de formation des conducteurs nouvellement recrutés subira le même sort, confient les travailleurs.

Assez pour que la société immobilise dans la journée d’hier, une dizaine de bus sur chaque ligne de 5 à 8 heures du matin. Et les Sénégalais ont frôlé le pire en échappant à une journée entière de grève des bus comme l’auraient souhaité certains agents de l’entreprise. N’empêche, ceux qui se sont réveillés tôt pour aller au travail ont payé les frais du débrayage. Les arrêts ne désemplissaient pas de clients des cars peints en bleu et jaune.

Seulement le problème est loin d’être résolu car les travailleurs, pour exiger que le président de la République prenne la situation en main, brandissent un plan d’action aussi sévère que dangereux. Le fait que les deux intersyndicales que compte la société se réunissent pour agir ensemble, risque de rendre la situation plus pernicieuse. Et, si les autorités versent dans le dilatoire, ‘nous sortirons tous les cars du dépôt et les parquerons sur la route de Ouakam, dès la semaine prochaine’, menacent-ils. Les travailleurs réclament que toutes les parties morcelées et vendues du dépôt leur soient restituées avec la confirmation d’une appropriation de ces terres à l’entreprise par un titre foncier. Un titre foncier aussi est exigé pour le dépôt de Thiaroye présentement fermé. De même qu’un règlement définitif des compensations financières calculées à hauteur de 5 milliards et leur reversement à temps. A cela, s’ajoutent l’achat de pièces de rechange suffisantes dans de brefs délais pour assurer une bonne rentrée scolaire, la satisfaction des revendications sociales et la recherche d’un statut juridique à l’entreprise.

La dette contractée par la société à hauteur de 9 milliards doit également être épongée, ajoutent les travailleurs. Une kyrielle de revendications pour lesquelles, ils resteront intransigeants selon le secrétaire général de l’Union démocratique des travailleurs de Dakar dem dikk (Udt 3d), Mamadou Goudiaby. Le secrétaire général de la Sdt 3d, Djibril Guèye Ndiaye lui emboîtera le pas en soutenant que les autorités doivent s’atteler à la tâche et ne plus compter sur la politique du ‘diviser les syndicalistes pour régner’. Les deux centrales syndicales auxquelles l’Udt 3d et la Sdt 3d sont affiliés, notamment la Cnts et la Cnts/Fc, ont promis leur soutien aux travailleurs. Et, jamais, elles ne laisseront des bulldozers morceler le dépôt de Ouakam, promettent-elles. Ainsi en ordre de bataille, travailleurs et syndicalistes attendent de voir dans une semaine la réaction des autorités.