Kolda, 2 oct (APS) - En cette fin d’hivernage, Solo a de quoi pavoiser. Son champ de mil lui promet une belle récolte, un heureux évènement qu’il doit certes au bon Dieu qui a ouvert abondamment ses vannes mais qu’il doit également à sa nombreuse progéniture.
Tels les fils du laboureur de la fable, les rejetons de Solo ont travaillé d’arrache-pied à ses côtés durant tout l’hivernage pour lui offrir un très beau champ. De là à remercier le ciel de lui avoir fait don de plusieurs fils, fruits de son état de polygame, Solo n’hésite pas de midi à quatorze heures et en danse presque de joie.
‘’J’ai trouvé que mon père avait quatre épouses et je suis l’ainé j’ai le droit de chercher au moins trois’’, lance-t-il pour expliquer pourquoi il vit entouré de plusieurs femmes. Dans son champ, ses nombreux enfants l’entourent également et aidés de deux chiens ils s’évertuent à éloigner les éventuels prédateurs des beaux épis de mais.
Ils sont nombreux à Kolda à brandir l’arme de la tradition pour à l’instar de Solo, contracter plusieurs mariages. Si ce phénomène est de plus en plus courant dans la capitale du Fouladou, il reste que des polygames Koldois font état d’autres raisons pour justifier leurs nombreux mariages.
En effet, à côté de la tradition, il y a notamment la religion et les finances. Si la raison religieuse brandie par plusieurs hommes pour prendre jusqu’à quatre femmes comme le leur autorise l’islam est bien connue et a encore de beaux jours devant elle, il reste que de plus en plus d’hommes multiplient les femmes et les enfants pour voir s’accroître le montant de leurs allocations familiales. Cette attitude est le fait uniquement de certains fonctionnaires.
I. Diallo, fonctionnaire polygame, semble fier de son état quand il se lance dans cette vaste explication : ‘’L’allocation familiale vient arrondir les angles. Vous savez avec le salaire seulement et face aux nombreuses charges il y a forcement des difficultés. Si vous devez prendre en charge la location, l’électricité, l’eau, sans compter les besoins de la famille, il est impossible de s’en sortir avec le seul salaire. Par contre, si tu as une famille nombreuse et que tu perçois l’allocation familiale sous forme de rappel cela te permet d’arrondir les fins de mois’’.
Au taux de 5.000 francs CFA par épouse et par enfant, l’allocation familiale est prisée par beaucoup de fonctionnaires koldois qui pour en toucher le maximum —certains la décrivent comme ‘’la cagnotte de plus dans le salaire mensuel’’— se marient à tour de bras. Sans penser aux lendemains difficiles, quand à la retraite sonnée on se retrouve avec sa seule pension pour nourrir ses femmes et enfants.
A ce sujet, les paroles d’oustaze Diamanka sonnent comme une mise en garde : ‘’pour pouvoir avoir deux femmes, l’islam recommande à l’homme d’être d’abord capable de les mettre au même pied d’égalité. Il lui faut être à la hauteur mais non pas de prendre cela comme un héritage’’ légué par les ancêtres.
‘’Vous savez, déplore-t-il, que même si cela était le cas, les temps ne sont plus les mêmes, nos parents avaient avec leur mode de vie la possibilité de prendre autant de femmes qu’ils voulaient, c’est-à-dire jusqu’à quatre mais de nos jours cela est impossible. Nous sommes dominés par un monde ou règne l’individualisme, d’où un jeune qui a l’âge de trouver une femme le fait seul sans parfois tenir compte de l’avis de ses parents’’.
Selon l’islamologue, le Coran recommande au musulman incapable d’entretenir correctement une femme de s’abstenir de contracter un mariage en se consacrant au jeûne. ‘’Hélas, souligne-t-il, maintenant on se marie selon des intérêts et malheureusement cela explique pourquoi il y a beaucoup de divorces’’.
Mettre d’aussi sages paroles dans la tête des Koldois pour les rendre raisonnables vis-à-vis du mariage relève d’une toute autre paire de manches…
0 Commentaires
Participer à la Discussion