Le prétexte religieux couramment servi par ceux qui font mendier les talibés ne tiendrait pas la route au regard des préceptes de l’islam concernant les enfants.
«Démystifier les préjugés et assertions qui veulent faire valider, reconnaître et admettre la mendicité des enfants des écoles coraniques par l’islam.» C’est l’objectif général que se fixent les animateurs du Partenariat pour le retrait et la réinsertion des enfants de la rue (Parrer) en initiant, hier à Dakar, un atelier de «restitution de l’argumentaire religieux» sur la mendicité chez les talibés (apprenants du Coran).
Selon le document de référence soumis aux participants (maîtres coraniques, guides religieux, etc.), en 2007, 90% des enfants de la rue ou enfants mendiants (environ 7800) recensés à Dakar «déclarent être des talibés». La même source ajoute que ces enfants passent «plus de 6 heures dans les rues en train de mendier». Et, poursuit le document du Parrer, «le prétexte couramment servi par ceux qui les font mendier est celui d’une socialisation et d’une éducation à l’humilité et à l’endurance que l’islam aurait encouragées». Pour les responsables du Parrer, il importe donc de recourir aux enseignements de la religion pour éclairer l’opinion, les pouvoirs publics et toutes les parties prenantes des obligations et responsabilités envers ces enfants. Ces derniers, souligne-t-on, sont «des ‘’projets’’ de Dieu pour la continuation de l’humanité dans l’équité et l’éthique, comme il est stipulé dans la Sourate an-Nahl, verset 90».
Ainsi, les participants à la rencontre d’hier ont essayé tant bien que mal de présenter les causes de la mendicité chez les talibés, de situer les responsabilités, mais aussi de proposer des solutions. Pour ce qui est des causes, d’aucuns ont indexé un manque d’organisation des maîtres des écoles coraniques. D’après l’imam Aziz Kébé, islamologue et professeur à l’université publique de Dakar (Ucad), par ailleurs consultant du Parrer, «les maîtres de daaras doivent s’organiser comme l’ont fait les médecins, les avocats, les architectes et tous les autres corps de métier». Il indique qu’«il doit y avoir une cartographie et une traçabilité des daaras». Il a aussi suggéré l’établissement d’une charte pour définir qui peut être un « serigne daara » et qui a le droit de fonder un « daara ».
À en croire toujours M. Kébé, les maîtres coraniques «confondent humanité et humiliation ; c’est par humanité que les ‘serignes’ demandaient aux talibés de faire la quête aux heures de repas, mais ce n’était pas parce qu’ils n’avaient pas de quoi manger». Mais la tournure de la pratique l’amène à penser qu’il y a quelque part une volonté pécuniaire qui anime ces « serignes daaras ». L’islamologue soutient en outre que les responsabilités sont partagées entre les parents, les maîtres des écoles coraniques et l’Etat sénégalais.
Les solutions proposées de façon générale sont l’organisation du secteur de l’école coranique, l’allocation de subventions pour ces écoles, leur modernisation, l’octroi de terres arables aux maîtres coraniques ainsi que la création d’un mouvement qui aura pour rôle de conscientiser les populations sur le sort des enfants.
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