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VIOLENCES A L’UCAD - Abdou Salam Sall : « Les étudiants fautifs seront sanctionnés »

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VIOLENCES A L’UCAD - Abdou Salam Sall : « Les étudiants fautifs seront sanctionnés »

Venu participer à la 32è session du Conseil africain et malgache de l’Enseignement supérieur (Cames), le recteur Abdou Salam Sall de l’Université Cheikh Anta Diop s’exprime sur la violence qui sévit dans son institution. Qualifiant les faits d’inadmissibles, il indique que l’université va sévir et que désormais, tout étudiant auteur de voie de fait sera traduit devant le conseil de discipline, renvoyé et au besoin, l’Ucad se portera partie civile.

Votre rectorat a subi récemment la furie d’un groupe d’étudiants au point que vous avez menacé de démissionner. Comment expliquiez-vous le comportement de ces étudiants ?

C’est une quinzaine d’étudiants qu’on a pu identifier. L’essentiel d’entre eux venait de la Faculté des sciences juridiques et politiques (Droit), un de la Faculté des Sciences, deux ou trois de la Faseg (Economie). Ils ont fait des voies de fait inacceptables au rectorat. Ils ont jeté une bombe asphyxiante dans mon cabinet, cassé les vitres des fenêtres du Secrétaire général et des portes d’entrée du rectorat, mis du feu, écrit des graffitis partout, cassé des pots de fleurs. Tout cela, sous le prétexte qu’on devrait les recevoir immédiatement pour parler de la gestion des bourses sociales. Les commissions de discipline des établissements concernés ont été saisies pour, sans délai, entendre les étudiants. Et très rapidement, nous irons en conseil de discipline. Comme j’étais avec le doyen de la Faculté de Droit, ce dernier a eu la vigilance de faire appel à un huissier qui a constaté les voies de fait et lui-même se proposait de se constituer partie civile ; cependant, nous avons donné des instructions pour que notre avocat dépose une plainte. Je rappelle que les étudiants ont aussi fortement bousculé mon huissier dans mon cabinet et j’ai dû intervenir physiquement pour l’arracher de leurs mains.

Pourtant, des enseignants et Pats subissent fréquemment des actes d’humiliation. L’on se rappelle, il y a 2 ans, du cas du Secrétaire général du rectorat et tout récemment d’un enseignant dans l’amphi, sans que sanction s’ensuive. Pourquoi ?

Il y a un dysfonctionnement. Nous avons, à notre niveau, voté le texte de la police universitaire depuis trois ans. Nous n’avons de cesse de dire que les franchises n’ont de sens que si elles sont supportées par une police universitaire. Pour l’opinion, j’informe que toutes les grandes universités du monde ont une police universitaire qui assure la sécurité dans l’institution. L’Ucad compte 54.400 étudiants, plus de 1.000 enseignants titulaires, autant d’enseignants vacataires et de Personnels administratifs, techniques et de service (Pats). C’est une ville. Donc, on ne peut plus la gérer comme il y a 20 ans. C’est la raison pour laquelle, prenant la mesure de la nécessaire sécurité de l’université, depuis 2004, l’Ucad est sous vidéosurveillance. Elle a voté aussi les textes pour une police universitaire. Je crois que le gouvernement, qui a reçu des injonctions claires, accompagnera l’université. Pensez-vous qu’il est responsable que les propriétaires de véhicules anonymes, par hasard, passant à l’université, voient leurs pare-brise brisées ? Est-ce normal que des enseignants subissent des voies de fait d’étudiants parce qu’ils n’ont pas la bourse. Tout cela est inacceptable. Aujourd’hui, la situation n’est pas conforme aux franchises universitaires. C’est le moment d’agir. On a échappé au pire parce que ce groupe était prêt à incendier le rectorat. Et demain, lorsqu’un professeur se fera poignarder, qu’allons nous dire ? Allons-nous tout simplement nous en émouvoir alors qu’on le voyait venir ? J’ai de la peine que ce groupe d’étudiants risque de payer pour tous les autres. Désormais, il faut qu’on reprenne les choses en main.

Que répondez-vous à ceux qui estiment que c’est parce que vous êtes directement touché par cette violence que vous voulez que l’institution sévisse ?

Ceux-là ignorent beaucoup de choses. Est-ce la violence qui m’a contraint d’installer des vidéos de surveillance ? Je rappelle que je suis issu du mouvement syndical. Je sais parfaitement comment fonctionnent les procédures. Nous savions déjà ce qu’il fallait faire et comment. Mais les moyens nous manquent. Je rappelle également qu’en 2005, nous avions réuni et traduit, en procédure d’urgence, des étudiants devant la commission de discipline pour avoir séquestré le doyen de la Faculté de Droit. Ils ont été exclus de l’université. Cette année également, ce sera la même chose. Chaque fois qu’il y a des rapports, des preuves, on a agi. Mais, si à la dernière minute, des professeurs protègent les étudiants en arguant du fait que ces derniers sont des soutiens de famille, on n’y peut rien. Il est clair que, chaque année, la commission de discipline siège.

Comment expliquez-vous toute cette violence ?

Il faut qu’on fasse très attention dans le pays. Dans un Etat, on ne confie pas aux étudiants des responsabilités aussi énormes que de gérer les bourses sociales.

Qui leur a donné ces prérogatives ?

Mais c’est la direction des Bourses. J’informe que des amicales gèrent des emplois fictifs au Coud. On en a délibéré et on a demandé au directeur d’y mettre fin. Nous sommes dans un processus de reprise en main de l’université. Il y a eu, depuis des temps, des dérives. Pensez-vous qu’il est juste que des étudiants attribuent des chambres à leurs camarades ? L’université repose sur l’équité. Lorsque l’on délibère en Conseil d’administration et que certains donnent d’autres directives, comment voulez-vous que cela marche ? Dans l’université, on peut faire tout ce que l’on veut pourvu que tout acte repose sur l’équité. Dès qu’il y a iniquité, il y a voie de fait. Si des étudiants se battent avec des armes blanches et autres objets dangereux pour diriger des amicales, c’est parce que celles-ci sont des rampes de situation. Nous allons transformer les amicales en outils de gestion où l’étudiant, régulièrement élu, sera formé, aura des ressources pour travailler et rendra compte à ses camarades. C’est ainsi qu’on forme les jeunes pour qu’ils participent à l’effort de gestion du pays.

Est-ce à dire qu’il y a un problème de gouvernance de nos universités ?

Depuis 2003, nous procédons à des correctifs, des améliorations. On pensait développer l’université, mais on s’est vite rendu compte qu’il n’y avait même pas de fondation. Ce qui explique les six paramètres de la vision : la qualité, la pertinence, la coopération internationale, le financement, l’Internet et la communication et les étudiants. Car, dans une université où la recherche n’est pas structurée, où les enseignements ne se renouvellent pas, ce n’est une université que de nom. Je le regrette. Une université où l’essentiel des ressources proviennent des subsides de l’Etat ne peut fonctionner correctement. Nous sommes dans un monde en mutation. L’Enseignement supérieur du Sénégal doit se mouvoir. Une université qui ne crée aucune richesse, ne s’ouvre pas à l’entreprise, sera toujours bloquée. Il faut déconstruire l’héritage français. Quand des étudiants n’ont pas de perspective ou n’arrivent pas à saisir les perspectives que leur offre l’université, dès lors, ils deviennent des nihilistes. Comment un étudiant, au mois de juin, peut écrire sur les murs : plus d’examen. Pensez-vous que ce dernier a des chances de réussir ? Non.

Quelle solution alors ?

Elle est à divers niveaux. D’abord, l’Ucad traitera la question sérieusement, sans force inutile mais en étant ferme. Deuxièmement, j’ai malheureusement fait appel à la Police pour surveiller le rectorat et elle ne quittera que le jour où on mettra totalement en place la police universitaire. Il nous faut cette police. J’espère que le gouvernement nous accompagnera dans cette direction. Mais, au-delà, ce sont les enseignants qui fondent l’autorité à l’université. Il leur appartient de prendre la mesure de ce qui est en train de s’y passer et de se mobiliser pour s’imposer dans le campus. Cette mobilisation concerne également les Pats - même s’ils n’ont qu’une capacité d’indignation -, l’essentiel des étudiants qu’on ne voit jamais manifester, qui sont toujours à la bibliothèque pour travailler. La Bibliothèque centrale (BU) compte aujourd’hui 1.750 places assises et enregistre 6 à 10.000 entrées par jour. Il appartient à ces étudiants d’être très clairs dans la dénonciation. Bref, la communauté universitaire doit faire face. Il appartient aussi à la société de savoir que l’Enseignement supérieur est son outil d’anticipation. Ces enfants sont issus de cette société. Il appartient à chaque chef de famille, de recommander à son enfant de faire les efforts nécessaires pour avoir les diplômes et de ne pas faire des voies de fait. Désormais, quiconque sera auteur de voie de fait sera traduit devant le conseil de discipline, renvoyé et au besoin, on se portera partie civile. C’est donc la société entière qui doit se mobiliser pour développer l’Enseignement supérieur. Je dois avouer qu’au moment où les étudiants se livraient à des voies de fait, l’Ecole doctorale Eau, Qualité et Usage de l’Eau remportait le concours du Centre d’excellence de l’eau lancé par l’Union africaine pour l’Afrique de l’Ouest. Ce n’était pas évident. Du point de vue diplomatique, d’autres étaient en avance sur nous. Mais par la compétence des collègues, on a pu remporter ce prix. Pour le Grand Prix du président de la République pour les Sciences, les trois lauréats sont de l’Ucad. On ne peut pas avoir cette excellence et souffrir d’un manque de sérieux pour pouvoir garantir une éducation de qualité qui est à notre portée. Des ressources conséquentes viendront dans l’Enseignement supérieur. L’Usaid vient de lancer un appel d’offres de 28 millions de dollars américains pour supporter le développement, dans les universités sénégalaises, de l’agriculture. On ne peut pas mobiliser ces ressources et rendre l’université ingouvernable.

Et l’Etat dans tout cela ?

Il est au cœur du processus. C’est lui qui doit nous donner les moyens pour accélérer le recrutement des agents de la police universitaire, les former et nous aider dans l’ingénierie de gestion du campus naturellement, en interrelation avec la Police. Car, lorsqu’il y a voie de fait grave, il n’y a plus de franchises. Quand on vend du chanvre indien, on détruit des biens, il n’y a plus et c’est moi qui l’assume, de franchises universitaires.



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