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Abdoulaye Makhtar DIOP (Ancien ministre des sports) : 'Le Comité de normalisation a trop laissé faire Lamine Ndiaye'

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Abdoulaye Makhtar DIOP (Ancien ministre des sports) : 'Le Comité de normalisation a trop laissé faire Lamine Ndiaye'

Les responsables du football sénégalais ont-ils pris le bon chemin vers la reconstruction ? Le 19 novembre prochain, ils comptent faire jouer les ‘Lions’ contre Oman. Auparavant, ils souhaitent désigner le successeur de Lamine Ndiaye au poste de sélectionneur national. C’est beaucoup de choses en peu de temps, depuis l’élimination de l’équipe nationale de la course pour la Can et le Mondial 2010. L’avis est d’Abdoulaye Makhtar Diop. Pour l’ancien ministre des Sports, le football sénégalais devait observer au moins six mois sabbatiques avant d’entrevoir un retour sur scène. Malgré tout, le membre de la Fifa croit à la résurrection. Il livre la recette dans cet entretien qu’il nous a accordé, lundi. Aussi, Abdoulaye Makhtar Diop a égrené les principaux maux du sport sénégalais non sans proposer quelques solutions de sortie de crise.

Wal Fadjri : Pour la première fois depuis 2000, le Sénégal va manquer une phase finale de Can. N’est-ce pas un échec du Comité de normalisation du football (Cnf) qui était chargé, après la débâcle de Ghana-2008, de faire renaître l’espoir ?

Abdoulaye Makhtar Diop : Encore une fois, le Cnf n’a aucune responsabilité sur ce qui s’est passé le 11 octobre dernier avec l’élimination du Sénégal de la course pour la Can et le Mondial 2010. La mission du Cnf, c’est de mettre l’équipe nationale dans des conditions de performance. Or, celles-ci sont réunies depuis plus d’un an. Quand il s’agit d’hébergement, l’équipe nationale est dans les hôtels les plus luxueux d’Afrique ou d’ailleurs dans le monde. Quand il s’agit de primes, les joueurs sénégalais en reçoivent en fonction des résultats des matches. De même que leurs titres de transport leur sont toujours remboursés. Parlant de suivi médical, le Professeur Fallou Cissé (le médecin des ‘Lions’, Ndlr) est un des plus grands spécialistes du domaine. Par conséquent, toutes les conditions de performance sont bien réunies. Le seul tort que j’ai à porter aux membres du Cnf, c’est d’avoir trop laissé faire Lamine Ndiaye dans ses choix. J’ai compris, après, qu’ils ont voulu lui faire porter la responsabilité entière d’un éventuel échec du Sénégal dans ces éliminatoires.

Wal Fadjri : La page Lamine Ndiaye est tournée et la nomination de son successeur est annoncée avant le 19 novembre prochain, jour d’Oman-Sénégal si les deux parties s’accordent sur la tenue de cette rencontre amicale …

Abdoulaye Makhtar Diop : Ce qu’on est en train de faire est extrêmement dangereux. Je ne vois pas pourquoi on se précipite à nommer un entraîneur d’ici le 19 novembre. Ce n’est pas normal de recruter un entraîneur dans la précipitation. Cette date Fifa n’est plus une obligation pour le Sénégal. Les dates Fifa servent à préparer les équipes qui sont engagées en compétition internationale. Mais, le Sénégal n’est plus dans ce cas de figure. Avant 2010, nous n’avons plus de compétition internationale. Alors, pourquoi se précipite-t-on à trouver un sélectionneur national ? Si on dit que le Sénégal doit jouer contre Oman, qu’est-ce que cela lui rapporte ? Absolument, rien. Pire, ça va entraîner beaucoup de dépenses, qui pourraient être faites pour autre chose. Et la tenue de ce match va entraîner et réveiller des querelles pour rien du tout. Il faut, au moins, se donner six mois sabbatiques, le temps de revoir tranquillement tous les problèmes relatifs au mécanisme de fonctionnement de la direction technique, du football sénégalais en général.

Wal Fadjri : D’après la presse, le ministère des Sports aurait déjà pris contact avec quelques entraîneurs étrangers. Comment appréciez-vous cette démarche de la tutelle ?

Abdoulaye Makhtar Diop : Qu’est-ce que ces gens-là (entraîneurs étrangers) peuvent apporter de nouveau ou d’original dans la détection des jeunes talents sénégalais - si c’est vrai que le ministre a entrepris de telles démarches. Je tiens à tout mettre au conditionnel parce que je ne suis pas sûr que le ministre ait entrepris de telles démarches. Rien ne presse, il faut qu’on prenne le temps de bien réfléchir aux problèmes qui se posent au football sénégalais. Le ministère des Sports et le Cnf doivent prendre le temps de réfléchir tranquillement à la meilleure formule pour rebâtir toutes les équipes nationales du Sénégal.

Wal Fadjri : Dans cette perspective, vous semblez privilégier l’expertise locale. N’est-ce pas ?

Abdoulaye Makhtar Diop : Bien sûr. Il est temps d’avoir l’intelligence de travailler avec les entraîneurs locaux. Que ce soit Abdoulaye Sarr, en tandem avec Amara Traoré, ou en trio avec Lamine Dieng… Il est possible de trouver des techniciens locaux à même de travailler tranquillement à l’émergence d’une nouvelle équipe nationale du Sénégal. Même en dehors des dates Fifa, pendant les vacances, il est possible de procéder à des regroupements des équipes nationales pour éviter les cassures. Il est souhaitable de procéder ainsi pour jouer des matches amicaux avec les pays de la sous-région.

Wal Fadjri : A l’heure où les difficultés du football se retrouvent dans presque toutes les autres disciplines majeures pratiquées au Sénégal, quelle politique sportive permettrait de sauver la situation ?

Abdoulaye Makhtar Diop : Définir une politique sportive au niveau de l’Etat, c’est d’abord créer le substrat juridique sur lequel on fonde cette politique sportive. Aujourd’hui, en matière de sport, la seule loi, c’est celle portant sur la Charte du sport de mai 84. Le fondement de cette loi était relatif à l’amateurisme et à la pluridisciplinarité. Nous tendons vers le professionnalisme. Par conséquent, il est temps de réajuster la loi du sport sénégalais. Ensuite, il faudra passer à la réadaptation du décret de 76, qui définit de la politique générale. Il s’agira de voir si l’Etat opte pour le professionnalisme dans certains domaines du sport. Parce que ce n’est pas tous les secteurs du sport sénégalais qu’il faudra professionnaliser. Il faut alors définir le professionnalisme. Il faut ensuite que l’Etat élabore des statuts types en harmonie avec l’Ohada (Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires). Parce que dès que nous entrons dans le professionnalisme, avec des formules de sociétés à objet sportif, nous entrons dans le domaine du droit privé qu’il faut organiser en rapport avec l’Ohada. Vous voyez que ce n’est pas simple. Et après avoir défini et précisé ce substrat juridique, il faudra s’atteler au cadre institutionnel. C’est-à-dire définir les types d’organisation à même de recevoir les délégations de pouvoirs de l’Etat pour avoir des prérogatives de puissance publique. Il faudra faire en sorte que chaque secteur soit encadré sur un point de vue législatif et réglementaire.

Wal Fadjri : Viendra ensuite la question des infrastructures. Comment surmonter ce handicap du sport sénégalais ?

Abdoulaye Makhtar Diop : C’est vrai qu’il y a un sérieux problème d’infrastructures sportives au Sénégal. Toutefois, il ne faut pas être très exigeant sur la qualité des aires de jeu pour former de jeunes sportifs en herbe. Parce que les grands champions sénégalais en athlétisme ont fait leur début sur des pistes en caillasse. Les sauteurs ont appris à sauter avec des sautoirs en sable. Chacun parle d’infrastructure sans toucher du doigt le problème. Je me rappelle qu’à son arrivée au département, l’ancien ministre des Sports, Youssou Ndiaye, avait dit qu’il allait placer son mandat sous le signe de la réalisation des infrastructures sportives. J’avais tout de suite dit aux gens que cela n’était pas possible. Parce que l’Etat du Sénégal n’a pas les moyens de réaliser ces infrastructures en dehors des périodes d’organisation des compétitions internationales. Parce que, tout simplement, le budget du Sénégal ne le permet pas. Ensuite, la coopération, bilatérale comme multilatérale, ne finance pas la réalisation d’infrastructures sportives.

Wal Fadjri : Quelle est la solution ?

Abdoulaye Makhtar Diop : Il faut être raisonnable. La conjoncture nouvelle est financièrement très difficile à gérer. Il faut entretenir l’existant au lieu de penser à construire d’autres infrastructures sportives. Réhabiliter le stade Demba Diop pour en faire un stade de 40 000 ou 45 000 places coûterait moins cher que construire un autre stade. Ensuite, il faut essayer de faire de Thiès le second grand pôle d’infrastructures sportives du Sénégal. Parce qu’aujourd’hui, les fédérations internationales sont très exigeantes, non seulement sur la qualité des infrastructures, mais aussi sur la proximité avec les aéroports internationaux et les infrastructures d’accueil. Or après Dakar, Thiès est la région la plus proche de l’aéroport international Léopold Sédar Senghor et des complexes hôteliers qui permettraient, en cas d’organisation d’une compétition internationale, de servir comme lieu d’accueil. Il faut aussi faire des projections sur un quart de siècle. Par exemple, se dire qu’après avoir réalisé le complexe sportif de Thiès, on va passer à celui de Ziguinchor, puis Kaolack, Tamba… Il faut tenir aux Sénégalais un discours de vérité : qu’ils comprennent que le Sénégal ne peut pas, dans les dix années à venir, avoir des stades.



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