On le connaît pour sa franchise. Une fois encore, l’international sénégalais de West Ham n’y est pas allé avec le dos de la cuillère pour livrer ses impressions sur la décision de certains joueurs de privilégier les vacances à la place des quatre importantes prochaines sorties de la sélection nationale, dans le cadre des éliminatoires combinées Can et Mondial 2010. Arrivé tard dans la soirée de mardi en provenance de Paris, ce cadre de la Tanière dénonce la démarche peu orthodoxe des Mamadou Niang, Souleymane Diawara et compagnie. Même son «frère», Pape Bouba Diop, avec qui il a partagé le meilleur comme le pire, n’a pas échappé aux critiques. «Ceux qui ne veulent plus venir, c’est leur affaire», lance de dépit, l’enfant de Karack. En véritable patriote, il jure de répondre à l’appel de la nation chaque fois que celle-ci aura besoin de ses services. Surtout dans les moments les plus difficiles. A l’image de Diomansy Kamara dont il salue, dans l’entretien, le «courage» et le «patriotisme». Conscient qu’il sera difficile de reconquérir le cœur des Sénégalais après la déroute de la dernière Can au Ghana, le «lapin flingueur» réclame leurs «voix». Du soutien pour une bande de Diambars, prêts à mourir pour la nation. Un groupe de «commandos» dans lequel on va retrouver un El Hadji Diouf new look . Le «Vagabond» a changé, révèle Henri Camara, qui avoue avoir longuement discuté avec lui. «Vous verrez un autre El Hadj Diouf», répond le plus capé des joueurs sénégalais, en sélection nationale, à ceux qui se posent des questions sur la convocation du bad boy. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, Henri Camara qui vient de connaître sa «pire» saison en Angleterre, rassure et avance que son expérience lui permettra de combler le manque de compétition.
Vous n’avez pas joué cette saison en championnat avec votre club, West Ham. Comment avez-vous vécu ces moments ?
Difficilement ! Il n’y a pas mille mots pour décrire ce que j’ai vécu cette année. Je n’ai quasiment pas joué. Lorsque je suis rentré de la Can, malgré l’élimination, je pensais, après le but marqué contre l’Afrique du Sud (1-1), que j’allais retrouver les terrains. D’ailleurs, le coach m’a félicité et on en a parlé. A cet instant, j’avais repris espoir, mais en vain. Personne ne comprenait. Même certains joueurs n’ont pas compris que je sois resté sur le banc tout ce temps. J’étais venu pour jouer à West Ham. Je me donnais à fond à l’entraînement. J’étais en forme. Apparemment, le coach ne voulait rien comprendre. Alors, je n’ai pas hésité à aller le voir pour lui dire ce que je pensais. J’étais tellement frustré que je lui ai balancé en pleine figure que je regrettais d’être venu à West Ham. Et que si je pouvais, j’allais retourner à Wigan. Malheureusement, ce n’était pas possible.
N’avait-il pas donné son accord pour votre venue ?
Je ne sais pas. Il m’a juste dit qu’il ne pouvait changer son équipe vu qu’elle faisait de bons résultats et qu’il fallait attendre. J’ai su alors que je ne rentrais plus dans ses plans. Alors, il fallait gérer jusqu’à la fin de la saison. Il restait deux mois. Mais, par contre, ce fut deux mois interminables. Sachant que je pourrais avoir une chance avec l’équipe nationale, j’ai continué à bosser aux entraînements. Pour ne pas être surpris aussi par une convocation du coach. Un professionnel a besoin de compétition. Par contre, l’expérience est un élément important pour faire face à certaines insuffisances. C’est cela aussi le haut niveau. Il y a toujours des choses à apprendre. La prochaine fois, je ferai plus attention avant de me rendre dans un autre club. Je prendrais surtout la précaution de discuter avec le coach avant de m’engager. Et surtout prendre le temps qu’il faudra avant de signer. Car pour West Ham, cela s’est fait au dernier moment. Je n’ai pas eu le temps de m’approcher du coach. J’avais envie de changer d’air. West Ham est un grand club.
Ce fut la pire année vécue en Angleterre ?
Effectivement ! C’est une année catastrophique. Je n’ai pas honte de le dire. J’ai rien compris. Si j’étais blessé, à la limite, je dirais peut-être que c’est parce que j’étais blessé. Mais, je ne l’étais pas cette année. Je suis en pleine forme. Je n’ai pas besoin de raconter des histoires. Le coach m’a fait perdre énormément. J’étais dans l’underground total. Des joueurs que je croisais parfois, me demandaient si j’étais toujours à West Ham. A chaque fois, c’était les mêmes questions. Au finish, cela rend malade. J’avais hâte que la saison se termine pour je vienne au Sénégal. Aujourd’hui, je suis là. Je vais tout faire pour aider mon pays à se qualifier pour les prochaines compétitions. Après, j’aurai largement le temps de songer à ma prochaine destination.
Vous devez normalement retourner à Wigan.
Effectivement ! Je vais retourner à Wigan. Mais, avec mon agent, on est en train de voir dans quel club je pourrai me refaire une santé. Il y a des contacts. Même en France. Je vais vous faire une révélation. L’Olympique de Marseille souhaite s’attacher mes services. Mais, pour l’instant, je n’ai pas envie de retourner en France. Je veux rester en Angleterre pour encore deux ou trois années, avant d’aller voir ailleurs. Peut-être, après ce sera en Espagne. C’est un championnat qui me plaît beaucoup. Maintenant, comme vous le savez, les choses vont vite en football.
Comment préparez-vous la prochaine sortie des Lions ?
Comme d’habitude. J’essaie d’être au meilleur de ma forme pour bien aborder ce premier match des éliminatoires. C’est de la même manière que je prépare tout le temps mes matches. Durant toute la saison, je n’ai fait que cela. Ce qui me fait mal et me dérange, c’est simplement le manque de compétition. C’est vrai que je n’ai quasiment pas joué de la saison avec mon club, West Ham. Je ne me rappelle même plus si c’est trois ou quatre matches. C’est pour vous dire que ce fut une année difficile. Mais bon, je pense avoir suffisamment d’expérience pour bien aborder les quatre matches à venir. Il n’y a pas à s’inquiéter. Je ferai tout mon possible pour être à la hauteur.
Pourtant, cela inquiète beaucoup les Sénégalais !
C’est normal. Mais dites-vous simplement que je me suis entraîné normalement durant la toute la saison avec mon club. Je n’ai été blessé que durant cinq jours. Il y a que les matches qui m’ont manqué. Et comme j’ai dit tout à l’heure, il n’y a pas à s’inquiéter. Je sais comment gérer cette situation. Physiquement, je suis prêt. Vous verrez. Le plus important, c’est de gagner les quatre matches. Et la meilleure manière d’y arriver, c’est de gagner le match face à l’Algérie. Ce ne sera pas facile. Les Algériens auront envie de faire un résultat chez nous. C’est pour cela qu’on a besoin du soutien du public.
Pensez-vous que le public sera derrière vous, après la déroute de la Can ?
Je l’espère. Je leur demande de tourner la page et de regarder vers l’avant. On va vers des matches très importants et sans les supporters, ce sera très difficile d’y parvenir. C’est une nouvelle compétition avec beaucoup de jeunes joueurs. Il y a eu un énorme changement qui s’est opéré au sein de l’équipe. C’est une nouvelle équipe, en somme. Une équipe qui veut réécrire le football sénégalais. Que les gens viennent encourager ces gosses, qui ont désormais le flambeau. Nous, les rares anciens, on est là pour les pousser vers l’avant. Il faut toujours savoir repartir sur de nouvelles bases. Dans les autres pays, c’est ainsi que ça se passe. Au Cameroun ou ailleurs, après une défaite, les supporters restent toujours derrière leur équipe. C’est ce qu’on aimerait voir chez nous. Il y a des hauts et des bas en football. Des jours où on gagne et des jours durant lesquels, on perd forcément. On ne peut pas gagner tous les jours. C’est ce qui fait la force de ces pays. Tant qu’on sent le public derrière nous, cela nous motive davantage.
Il y a beaucoup d’absents surtout celle de votre ami, Pape Bouba Diop qui vient de remporter la Coupe d’Angleterre. Cela vous fait mal ?
C’est regrettable ! Mais avant tout, c’est le choix du coach. Je n’en ai pas discuté avec Bouba, mais il n’y a pas lieu de faire un commentaire.
Que répondez-vous à ceux qui estiment qu’il fait partie des joueurs qui ne sont plus motivés par la sélection nationale ?
Les gens le disent. Le coach a ses raisons. Tout ce que je peux dire, c’est que j’aurais bien aimé le voir au sein de l’équipe. C’est un Sénégalais. Il vient de remporter la Coupe d’Angleterre. Malheureusement, certains joueurs oublient qu’ils ont encore besoin de l’équipe nationale. Qu’ils réfléchissent bien à ce qu’ils sont en train de faire. L’équipe nationale, c’est sacré. Il ne faut pas qu’on joue avec. Pour cela, il n’y a pas mille solutions. Il suffit de sa battre pour son pays, à chaque fois qu’on fait appel à toi. Par contre, si c’est pour passer des vacances, on s’expose naturellement aux critiques.
Faites-vous allusion également à Mamadou Niang, Souleymane Diawara, Habib Bèye et autres ?
Ils sont tous dans le même sac. Ceux qui ne veulent plus venir ou temporairement, en équipe nationale, c’est leur affaire. S’ils préfèrent prendre des vacances, c’est tant mieux pour eux. C’est leur choix. Maintenant qu’ils n’oublient surtout pas que d’autres auraient pu faire la même chose. C’est le cas de Diomansy (Kamara). Ils auraient pu prendre exemple sur lui. N’est-il pas le premier à venir ? Il est aussi fatigué que tous les joueurs sénégalais qui évoluent à l’étranger. Du moins, une bonne partie. Mais, il a préféré se priver de vacances pour défendre les couleurs nationales. Il y a une chose que je ne comprends toujours pas, d’ailleurs. Au moment des vacances, ils les prennent sans arrière-pensées et au moment de faire les ultimes choix, ce sont les mêmes personnes qui sont les premières servies. Je crois que c’est fini tout cela. Il faut que les dirigeants prennent leurs responsabilités. On ne vient pas en équipe nationale quand on veut. Et je suis sûr que ces gens-là, si la France les avait convoqués, ces gens-là se seraient précipités pour rejoindre la sélection. Cela fait combien d’années que, personnellement, je n’ai pas eu de vacances. Depuis que je suis à Sedan, je viens répondre à la sélection nationale. J’enchaîne avec la sélection. C’est parce que j’aime mon pays. Je ne me pose même pas de questions sur ça. El Hadji Diouf a tout entendu après la Can. Pourtant, il a tenu à être là. C’est parce qu’il aime son pays. On a discuté tous les deux. Il n’a jamais été aussi décidé à l’idée de rejoindre l’équipe nationale. N’est-ce pas la conséquence de clans qui existent au sein de la Tanière ?
Ce genre de choses ne m’intéresse pas. Je ne m’attarde même pas sur cela. Qu’il y ait des clans ou pas. Ce que je trouve déplorable, c’est le comportement de Mamadou Niang et de Souleymane Diawara. Je ne l’apprécie vraiment pas. Je ne suis pas d’accord avec eux. Je le dis en toute franchise. Si, nous tous, avions pris la même décision, je me demande ce que deviendrait notre football. On a tous envie d’aller en vacances. Mais après le travail. On a un service à rendre à la nation. Comme j’ai dit, si c’était l’équipe de France, la réaction ne serait pas la même. On est tous d’accord là-dessus. Donc, ils n’ont qu’à revoir leur perception de l’équipe nationale. Ce n’est pas un bon exemple pour la jeune génération qui frappe aux portes de la sélection nationale. De même pour ceux qui sont présentement sur place.
Vous approuvez donc l’initiative prise par le sélectionneur national, Lamine Ndiaye de remettre de l’ordre dans la Tanière !
Bien sûr ! Je serai le premier à l’appuyer. Je ne ménagerai aucun effort pour que l’équipe nationale soit une vitrine du football sénégalais. Je peux même dire que El Hadji Diouf ou encore Tony Sylva, abondent dans la même direction. C’est à nous de l’aider pour que les choses aillent de l’avant. Nous les cadres, allons aider Lamine Ndiaye dans sa mission.
Comment allez-vous vous y prendre ?
Pour l’instant, on n’a pas encore discuté de la formule à adopter. Mais, pour tout ce que cela demande, on est prêt.
Vous avez cité El Hadji Diouf qui, pourtant, avait transgressé les règles lors de la dernière Can avec Tony Sylva et Ousmane Ndoye.
C’est du passé maintenant. Il y aura beaucoup de changements. Je vous assure. Vous verrez un autre El Hadji Diouf. Je ne dis pas qu’il était un mauvais exemple. Mais, c’est juste que la personne a beaucoup évolué mentalement. On a pu discuter tout dernièrement. Et j’ai senti une personne qui a envie de se racheter pour des erreurs qu’il a eues à commettre par le passé.
Pour parlez des quatre matches à venir. Quel sera celui qui vous inquiète le plus ?
C’est naturellement celui face à l’Algérie. On joue à domicile. C’est le premier match après la Can. On n’a pas droit à l’erreur. Il faut gagner à tout prix. Il faudra qu’on se fasse respecter. Qu’on se réconcilie avec le public. Tant qu’on gagne, le public est content. A nous de tout faire pour gagner ce match afin de mieux aborder le second, qui reste un derby. Ce ne sera pas facile de jouer les Gambiens. Je connais certains joueurs qui y jouent et ils sont bien décidés à nous barrer la route. C’est un rêve pour eux de battre le Sénégal.
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