ENTRETIEN AVEC… MOUSTAPHA GUEYE, «Tigre de Fass» souteneur de Idy : «Ce que je vois dans ce pays m’a révolté»

Tout à coup, un de ses trois portables sonne dans sa poche, Tapha Guèye décroche et dit : «C’est le premier portable de ma vie !», avant de répondre à son correspondant, tenant entre ses bras robustes une vieille marque Nokia. Quand, il finit sa courte conversation Moustapha Guèye ne peut pas s’empêcher de passer à l’aveu. «Cela fait partie des premiers Nokia, mais je ne vais jamais le jeter. Je suis familier à ce portable. Je suis fidèle en tout et je ne m’engage pas à la légère, quand je m’investis sur une chose j’y vais à fond», assure-t-il. Voici le nouveau souteneur de Idrissa Seck. Le «Tigre de Fass», champion incontesté de l’arène devenu depuis peu le souteneur le plus résolu du candidat de la caravane Dekkal Yaakar Idrissa Seck. Dans cet entretien, le chef de file de l’écurie Fass dit tout sur les raisons de son soutien à son «candidat».

On vous a vu en compagnie du candidat Idrissa Seck. Qu’est-ce qui motive votre engagement ?

Je me suis engagé derrière le candidat Idrissa Seck parce que, j’ai conscience que c’est lui l’espoir de ce pays. Pour conforter ma conviction à lutter à ses côtés, je l’ai longtemps observé travailler dans le gouvernement sous le régime de Abdou Diouf et aussi sous le règne du Président Abdoulaye Wade. J’ai suivi ces actions quand il était Premier ministre et j’ai vu les péripéties de sa sortie du gouvernement, de sa traversée du désert, et de son retour sur la scène politique. Je me suis dit : «Ce gars-là il doit être fort dans sa tête, c’est quelqu’un avec qui on peut compter.» Alors, je me suis engagé. Car, je dois penser à la jeunesse sénégalaise qui souffre, je dois penser à ceux qui sont malades et qui ne peuvent pas se soigner, à ceux qui n’ont pas de voix, aux non-voyants et aux handicapés qu’on rencontre en ville et qui tendent la main pour vivre dans ce pays. A tous ces gens-là, je veux et je dois être leur porte-voix. Donc, pour aider tous ces gens, il ne suffit pas de leur donner de l’argent, mais de militer avec quelqu’un qui, lorsqu’il sera Président, pourra les aider à sortir de leurs difficultés actuelles. Je ne suis pas allé vers Idrissa Seck pour un semblant de soutien, je me suis engagé sincèrement avec lui. Car, c’est le candidat de mon choix, comme cela pouvait être le cas pour les autres candidats.

Est-ce que le fait qu’il a été emprisonné dans le cadre des chantiers de Thiès a influencé votre choix ?

Cela a, en partie, influé sur ma décision de le soutenir. Parce que je suis comme tous les Sénégalais, nous n’aimons pas l’injustice. Il a été injustement incarcéré, on l’a écarté du pouvoir pensant signer sa mort politique, mais le bonhomme, comme à la lutte, est revenu plus fort. C’est ce caractère de guerrier qui me plait dans sa personnalité. C’est comme s’il fait un combat pour sauver sa dignité, c’est comme un lutteur qui revient d’une défaite, il a la rage de forcer son destin, c’est ce qui arrive à Idrissa Seck, il veut gagner et celui qui s’allie avec Idrissa Seck aime forcément gagner. Je suis avec lui jusqu’au bout et je ne m’en cache pas.

Certains pensent que vous avez reçu beaucoup d’argent de la part du candidat Idrissa Seck pour vous afficher publiquement avec lui…

C’est plutôt le contraire. Je mets mes propres sous pour soutenir Idrissa Seck. Je suis assez responsable quand je dois faire des choses, je le fais de mon propre gré. Je ne suis pas un quémandeur, ni un arriviste. Je peux, après les élections, dire merci à Idrissa Seck et ne plus le voir, je suis ce genre d’individu. Je me suis engagé pour un combat, c’est l’élection présidentielle du 25 février. Je suis avec lui sans rien lui demander, je n’ai rien demandé. J’ai vu que c’est un gars à soutenir et qui mérite d’être soutenu. Je gagne ma vie dans l’arène, je ne compte pas la gagner en politique. Je ne suis pas d’accord avec les gens qui reçoivent 1 500 ou 2 000 FCfa pour soutenir un candidat. Cet argent, qu’est-ce que ça peut régler ? Le mieux c’est de choisir un bon candidat, de convaincre les électeurs par les idées du genre : si vous élisez ce candidat, les jeunes ne vont plus prendre les bateaux pour rallier l’Espagne, il n’y aura plus d’agresseurs et les jeunes auront du boulot…

Idrissa Seck est comme tous les autres candidats, il ne fait que des promesses…

Quand il sera à la tête de ce pays, Idy sait bel et bien qu’il n’a pas à faire autre chose que de travailler pour régler les problèmes de ce pays. Si Idy ne tient pas ses promesses, alors là je saurai qu’il est nul.

On vous savait très lié à Mme Elisabeth Diouf et vous ne vous êtes jamais engagés auprès du Président Abdou Diouf pourquoi subitement vous vous engagez derrière Idrissa Seck ?

C’est la première fois que je m’engage officiellement derrière un candidat à l’élection présidentielle. Mais, sous le régime du Parti socialiste tout le monde savait les liens étroits que j’avais avec Mme Diouf qui était une amie, elle a fait beaucoup de choses pour moi, je ne me suis jamais affiché politiquement derrière Abdou Diouf, pourtant Ousmane Tanor Dieng c’est mon ami, mais je n’ai jamais été militant d’un quelconque parti, je suis souteneur de Idrissa Seck, mais je ne suis pas un militant du parti Rewmi. Je soutiens M. Idrissa Seck.

Quelles sont les qualités que vous trouvez en votre candidat ?

Ce qui est très important chez lui c’est qu’il a une grande capacité d’écoute, il tient compte de l’avis de ses collaborateurs. Il tient compte par exemple de ce que je lui dis, c’est un homme de paix, il pratique sa religion comme il se doit à chaque heure de prière, il vient interpeller ses collaborateurs pour dire : «Djouli», c’est important on a besoin de ça quand on est musulman et puis il n’a pas l’habitude de dire moi, il dit toujours nous.

Vous vous êtes rencontrés combien de fois ?

Je l’ai vu des dizaines de fois, cela fait plus d’un an que je suis avec Idrissa Seck, les gens ne savaient pas. J’ai été le seul homme public à dire sur les ondes d’une radio (Ndlr : Emission Yoon Wi de El Hadj Assane Guèye sur Rfm, le 31 décembre 2006) que le pouvoir de Wade devait le libérer, parce que le Sénégal avait besoin de lui. Et puis, quand il est sorti de prison, c’est moi qui l’ai accueilli ici à Fass avec toutes les populations.

Le deal qu’il aurait noué avec le Président Abdoulaye Wade a jeté le flou dans la tête de beaucoup de Sénégalais. Ce n’est pas votre cas ?

Il y a beaucoup de gens qui m’interpellent sur ça en disant que Idy a fait un deal avec le Président Abdoulaye Wade. Deal ou pas, ce qui importe pour moi, c’est ce qu’il a sorti de sa bouche et que j’ai entendu de mes oreilles. C’est quoi ? C’est de travailler pour la paix, le développement de ce pays. Il m’a dit que le Président l’a appelé à renouer avec lui, en homme adepte de la paix, il a répondu en disant qu’il a retrouvé sa famille libérale et pas le Pds. Il continue de gérer son parti Rewmi, il va aux élections pour gagner. Je pense que c’est clair. Les Sénégalais doivent faire la séparation entre retourner et retrouver, il n’est jamais retourné, il a retrouvé sa famille. C’est ce qu’il m’a dit et j’y crois. Ce qu’il s’est dit avec Wade, seul lui le sait. Je reste fidèle à mes principes de départ : le soutenir sans ambages.

Votre soutien c’est à travers un mouvement ou vous le soutenez personnellement ?

J’ai créé un mouvement dénommé les Amis de Tapha Guèye soutiennent Idrissa Seck, ce sont des membres de ma famille, mes amis, mes supporters, les sportifs en général et en particulier les lutteurs.

Pourtant la lutte a son candidat en la personne du promoteur Petit Mbaye ?

Là je dois dire que Petit Mbaye est un gentleman. Je l’ai bien suivi durant cette campagne. Malheureusement c’est à la dernière minute qu’il m’a parlé de sa candidature, j’avais pris déjà des engagements envers Idrissa Seck. N’empêche, il va rester un ami. Car, c’est un gars à qui je dois beaucoup de choses. Je lui souhaite beaucoup de chance.

N’avez-vous pas peur des représailles de la part des gens de l’appareil étatique pour votre soutien à Idrissa Seck ?

Forcément, les gens vont tenter de nous mettre les bâtons dans les roues. Car, il y a des choses que je voulais régler, mais je vois que ça été bloqué. Je ne sais à quel niveau ça été bloqué, mais je m’en fous. Ce que je dois avoir dans la vie personne n’y peut rien. C’est entre les mains de Dieu, je suis un Sénégalais, un républicain. Je ne dis pas que tout est mauvais dans la gestion actuelle, mais il y a mieux à faire avec mon candidat Idrissa Seck. Je ne suis pas contre Wade, mais ce que je vois dans ce pays m’a révolté.

Comme quoi par exemple ?

Il y a l’emploi des jeunes, leur formation, la saleté qui ravage Dakar, les gens sont malades à cause de la saleté, tout est délabré. Il faut avoir le courage de le dire, il n’y a pas de lumières dans certains coins de Dakar, les jeunes ne travaillent pas, les délestages qui n’en finissent jamais, le prix du gaz qui flambent que sais-je encore ? Le pays est à refaire et pour le vrai changement c’est avec Idy.

Et si Idy ne profitait que de votre image pour battre campagne ?

Peut-être car Moustapha Guèye n’est pas un anonyme. Si je l’accompagne, il y aura un engouement populaire, en plus il y a des gens qui sont dans d’autres partis et vont rallier Idy à cause de moi. Quand je soutenais Idy, j’étais loin d’imaginer que ça aurait une telle ampleur. Il y a aussi des gens apolitiques qui soutiennent Idy à cause de moi et ça je m’en félicite. Ces gens-là donnent un sens au combat politique.

Mais, il y a aussi le revers de la médaille, des gens vont quitter Tapha Guèye parce qu’il s’est allié avec Idy ?

Je suis d’accord, mais je ferai en sorte d’emmener le maximum de gens vers Idy. J’ai connu beaucoup de supporters qui sont avec moi et qui supportent d’autres candidats, il y a même d’ex-ministres, des députés, mais aujourd’hui, je suis en face d’eux pour un laps de temps. Tous les Sénégalais, sportifs ou autre doivent se mobiliser lors de cette campagne pour choisir un candidat dans la discipline, la paix, le respect et le jour du 25 février, tous les Sénégalais se rangeront derière celui qui sera choisi par les électeurs et je prie pour que ce soit Idrissa Seck.

Comment avez-vous vécu les jets de pierres à l’étape du candidat Idrissa Seck aux Parcelles Assainies ?

Cela s’est passé en mon absence, j’étais monté sur le véhicule de mon leader et j’ai levé le bras de mon leader ; il y a eu des scènes de liesse extraordinaire. C’est après mon départ que les gens ont commencé à lancer des pierres, mais quand je suis dans le cortège, les gens n’ont pas le courage de lancer des pierres.

Ah Bon ?

Non ! Les gens n’ont pas ce courage et je trouve que c’est dommage. Car, les jeunes, il faut leur apprendre les bonnes manières, autres que des jets de pierre, des coups de marteaux. Ce n’est pas notre culture. Un bon responsable doit montrer le bon exemple aux jeunes. C’est malhonnête de lancer des pierres à un candidat. C’est pourquoi, j’invite la jeunesse de mon pays de quel bord qu’elle soit à comprendre que ce n’est pas par la force des bras, les jets de pierres qu’on va gagner ces élections, le 25 février ce sont les cartes qui vont compter.