Le Panel Malabo Montpellier a lancé son nouveau rapport. Ce document, qui préconise d’exploiter le financement climatique pour renforcer la résilience des systèmes alimentaires en Afrique, a été lancé officiellement ce lundi 5 décembre 2022, à Dakar, en marge de la 11ème réunion du forum Malabo Montpellier. Une rencontre organisée par le Panel Malabo Montpellier, en partenariat avec le Centre de suivi écologique (CSE) du Sénégal, et qui a accueilli plusieurs intervenants, notamment le ministre de l’Environnement, du Développement durable et de la Transition écologique du Sénégal, Alioune Ndoye ; le président d’AKADEMIYA2063, Dr Ousmane Badiane, par ailleurs, co-président du Panel Malabo Montpellier ; l’ambassadrice itinérante de Sa Majesté Mohamed VI, roi du Maroc, et co-présidente du Forum Malabo Montpellier, Dr Assia Ben Salah Alaoui ;le Directeur général du CSE, le Professeur Cheikh Mbow ; et le co-président du Panel Malabo Montpellier, le Professeur Joachim Von Braun.
« La nécessité de débloquer un financement de 41,3 milliards de dollars pour assurer l’adaptation des secteurs de l’agriculture, de la foresterie, de l’utilisation des terres et de l’eau en Afrique »
Le rapport, intitulé« S’ACCLIMATER : des politiques innovantes pour financer l’action climatique et renforcer la résilience des systèmes alimentaires en Afrique»,répond à la question de savoir comment le continent africain peut utiliser le financement climatique pour renforcer la résilience de ses systèmes alimentaires. Il examine les outils et les mécanismes innovants disponibles pour mobiliser des financements supplémentaires auprès des secteurs public et privé.Il fournit également une analyse approfondie de quatre pays africains sélectionnés de manière systématique, à savoir : le Bénin, le Mali, le Rwanda et le Zimbabwe, qui ont réussi à débloquer des financements importants pour renforcer la résilience climatique de leurs systèmes alimentaires grâce à des actions gouvernementales ciblées.En effet, ce nouveau rapport indique qu'il seraitnécessaire de débloquer un financement de 41,3 milliards de dollars pour assurer l’adaptation dessecteurs de l’agriculture, de la foresterie, de l’utilisation des terres et de l’eau en Afrique.Néanmoins, les recherches indiquent que les petits agriculteurs, les agro-entrepreneurs et les industries connexes n’ont reçu que 3,6 milliards de dollars pour financer l’adaptation au changement climatique en 2017/18.
« Un déficit de plus de 40 milliards de dollars pour protéger les systèmes alimentaires contre les effets du changement climatique »
Au cours de ce rendez-vous, des ministres africains, des représentants des pays et des partenaires au développement ont discuté du rapport et de ses recommandations. Selon le Panel Malabo Montpellier, les gouvernements africains devront puiser dans toutes les sources nationales et mondiales disponibles pour le financement de l’adaptation afin de combler un déficit de plus de 40 milliards de dollars et ainsi protéger les systèmes alimentaires contre les effets du changement climatique.
« Étant donné que le continent africain représentera un quart de la population mondiale d’ici 2050, l’avenir sera façonné par les Africains, et l’avenir de l’Afrique sera façonné par ses systèmes alimentaires », a déclaré Dr Ousmane Badiane, coprésident du Panel Malabo Montpellier. Pour lui, les pays africains utilisent déjà les ressources nationales pour aider l’agriculture et la production alimentaire à faire face aux phénomènes climatiques extrêmes.
Le rapport étudie les cas de quatre pays africains sélectionnés
Dr Badiane signale que ce rapport du Panel Malabo Montpellier sur le financement climatique étudie les cas de quatre pays africains sélectionnés de manière systématique (le Bénin, le Mali, le Rwanda et le Zimbabwe). Ici, il montre comment les gouvernements pourraient renforcer la résilience des systèmes alimentaires face au changement climatique grâce à des innovations telles que les fonds climat nationaux, les financements mixtes public-privé et les structures de financement participatif combinées à des structures institutionnelles et à une conception de politiques innovantes.
Le Bénin, par exemple, a mis en place plusieurs institutions et mécanismes pour soutenir l’adaptation, notamment le Fonds National pour l’Environnement et le Changement Climatique (FNEC) et le Fonds d’appui au Développement Communautaire (FaDEC), renseigne-t-il.
Le Mali, qui a créé un fonds climat centralisé, souligne le président d’AKADEMIYA2063, figure également parmi les sept premiers bénéficiaires du financement de l’adaptation au climat, obtenu entre 2011 et 2020 grâce à ses partenariats étroits avec les partenaires internationaux au développement.
Au Rwanda, ajoute-t-il, le gouvernement a investi massivement dans la création d’institutions innovantes de classe mondiale telles que le Fonds national pour l’environnement (FONERWA), qui soutient une approche axée sur la demande pour combler les déficits de financement.
Enfin, au Zimbabwe, le gouvernement a collaboré avec le Fonds Vert pour le Climat (FVC) pour concevoir le programme national FVC du Zimbabwe, un plan de quatre ans visant à préparer le pays à mobiliser le financement climatique du FVC, toujours selon Dr Ousmane Badiane.
« L’Afrique se mobilise de manière proactive pour déterminer son destin en matière d’adaptation aux impacts du changement climatique »
Joachim von Braun, coprésident du Panel Malabo Montpellier, pour sa part, a soutenu que ces pays montrent que le continent noir n’est pas neutre. « Les pays mis en avant dans ce rapport montrent que l’Afrique se mobilise de manière proactive pour déterminer son destin en matière d’adaptation aux impacts du changement climatique », a-t-il déclaré. Pour lui, « les investissements dans des systèmes alimentaires résistants au climat accéléreront la croissance de l'économie verte et des emplois verts, au profit des populations rurales ».
Le rapport fait suite aux récents pourparlers de la COP 27 des Nations Unies sur le climat où les négociateurs ont convenu de créer un fonds destiné à indemniser les pays en développement pour les pertes et dommages déjà causés par le changement climatique tels que la perte de quatre saisons des pluies consécutives en Afrique de l’Est. En plus d’un fonds de compensation pour les pertes et dommages, les pays à haut revenu s’étaient précédemment engagés à fournir 100 milliards de dollars par an pour soutenir l’adaptation dans les pays à faible revenu, mais cet engagement n’a pas été respecté. À ce titre, les auteurs du rapport constatent que l’Afrique n’a eu accès qu’à 5% des financements mondiaux disponibles, tandis que moins de 20% des financements climatiques du secteur privé ont été consacrés à l’adaptation.
« Le changement climatique entraînera une perte de 10 à 20% du PIB annuel en Afrique d’ici 2100 si… »
Selon le rapport du Panel Malabo Montpellier, le changement climatique entraînera une perte de 10 à 20% du PIB annuel en Afrique d’ici 2100 si les mesures d’adaptation restent faibles, inexistantes ou inappropriées.Mais, le directeur du Centre de Suivi Écologique (CSE) soutient que le combat contre les changements climatiques est une priorité pour le continent noir. « L’Union africaine a fait de la lutte contre les effets du changement climatique une priorité absolue en raison de ses conséquences profondes sur les populations, les moyens de subsistance et les communautés. Ce rapport fournit des indications précieuses pour aider les gouvernements africains à orienter les financements de manière plus rationnelle et plus efficace en vue de la préservation de la sécurité alimentaire », a expliqué le Professeur Cheikh Mbow.
« Orienter les choix des gouvernements africains en matière de politiques afin d'accélérer les progrès vers la transformation durable de leurs systèmes alimentaires »
À noter que le Panel Malabo Montpellier, qui se tient deux fois par an, réunit 18 éminents experts spécialisés en agriculture, en ingénierie, en écologie, en nutrition et en sécurité alimentaire. Son objectif est d'orienter les choix des gouvernements africains en matière de politiques afin d'accélérer les progrès vers la transformation durable de leurs systèmes alimentaires. Pour ce faire, le Panel identifie les domaines dans lesquels des progrès et des changements positifs ont été réalisés sur le continent et évalue les réussites des pays les plus performants. Il identifie les innovations institutionnelles et les interventions en matière de politiques et de programmes qui peuvent être reproduites et étendues d'autres pays.
Le Forum fournit une plateforme d'échange et d'apprentissage mutuel entre les leaders de la croissance agricole et de la sécurité alimentaire afin de promouvoir l'innovation en matière de politiques. Chaque rencontre du Forum est guidée par un rapport technique préparé par les membres du Panel Malabo Montpellier. Ces rapports de recherche permettent aux décideurs de haut niveau d'accéder aux données scientifiques les plus récentes afin d'orienter efficacement la mise en œuvre des politiques et des programmes en faveur des petits exploitants agricoles en Afrique, en particulier les femmes et les jeunes. Ce contexte d'apprentissage mutuel et d'échange de bonnes pratiques permet de soutenir les progrès récents et d'ouvrir la voie vers de meilleurs résultats dans la transformation agricole et le développement économique en Afrique.
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