Le Blogs de : alassane kitane

Pays sec, hivernage sec, Trésor sec, Tabaski à sec, mouton sec, robinets à sec, poches évidemment sèches. N’avez-vous pas l’impression qu’un chapeau de plomb est tombé sur Ndoumbélane ? Dans un style sec, je vais tenter de vous peindre la sécheresse à Ndoumbélane. Jamais pauvreté n’était aussi démocratisée à Ndoumbélane : paysans, chômeurs, étudiants, élèves, enseignants, ouvriers, éleveurs, pêcheurs, transporteurs, chauffeurs, charretiers, médecins, etc., tout le monde est à sec. Même le porc à qui rien ne répugne est en train de sécher du fait que gnamou mbaam est train de devenir gnamu nit…

Pendant ce temps, un vent sec et chaud nous rappelle que si Ndoumbélane n’est pas la porte de l’enfer, il en est l’allégorie, surtout pour ceux qui évoquent la miséricorde divine pour ESPERER le paradis pour tous. Celui qui laisse chaque jour le soleil nous calciner comme des pierres granitiques aura-t-il de la peine à nous laisser croupir de misère et de souffrance dans les flammes de l’enfer ? Visages secs, humeurs sèches (j’ai vu deux vieillards, chapelet à la main, se battre en pleine rue pour une histoire de dattes) : la triple sécheresse a asséché les cœurs et même les esprits. Sécheresse hivernale, sécheresse pécuniaire, sécheresse intellectuelle : ce n’est pas surprenant de voir l’injure élire domicile dans les esprits abandonnés par les idées et les arguments.

Pendant ce temps, un vilain âne politique, plaisantin au visage sec et rustre, prie devant la Kaaba sacrée pour devenir le prochain roi de Ndoumbélane. Et la presse de Ndoumbélane en fait grassement état. Oh quel drame, ce pays ! C’est vrai qu’il y a de ces visages tellement farceurs qu’on se demande s’ils peuvent être sérieux, même en période deuil. Où en est-on d’ailleurs avec ce deuil sans esprit de deuil ? Cey Ndoumbélane, pays de thiakhaanerie ! C’est vrai qu’avec la grande et sèche imposture auréolée de gloire artificielle de l’actuel roi de Ndoumbélane, n’importe qui peut prétendre diriger. Dans ce pays où on peint les moutons en lions, ce ne serait pas manquer de respect au conseil constitutionnel que de proposer la candidature d’un chat borgne et infirme au poste de roi. Même un tel chat se verrait tresser des lauriers par des laudateurs qui parlent au nom de l’Islam, si jamais il parvenait à se faire élire à Ndoumbélane.

Pendant ce temps, la psychose du mouton de Tabaski me rappelle que je suis pris dans l’étau d’une société qui vit au-dessus de ses moyens et qui étouffe toute culture de l’investissement. Cruelle dialectique de l’homme et de la bête : nous sommes, en l’espace de quelques jours, devenus les esclaves du mouton et lui, notre roi ! Cette frénésie à laquelle je ne peux me soustraire, me rappelle que je suis un membre d’une société dont la férocité est implacable. Il me faut braver le soleil si je veux devenir, comme tout le monde, le bien d’un mouton. Heureusement que le foirail est à quelques encablures de chez moi. Mais c’est surtout ma « poche » qui m’inquiète… Je crois que les souris m’ont dévalisé.

Pendant ce temps, ma vieille bagnole tombe en panne sèche devant une station à essence elle-même à sec ! C’est quoi cette guigne ? Dans ce pays on devrait, une bonne fois pour toutes, abolir tous les noms de famille pour en porter tous un seul : sec. Tout est sec ou est à sec. C’est quoi ce pays où la religion compte plus de « fonctionnaires » que l’Etat ? Le roi de ce bruit arrangé qu’on appelle « mbalaax », chanteurs de maîtres (et non maitre-chanteur quand même) a dit « nit ku niuul dafa beug nguur ». L’histoire lui a donné raison : on se bat sans retenue pour le pouvoir, mais auparavant lui-même en est la preuve puisqu’il s’accoquine avec tous les régimes de Ndoumbélane.

Pendant ce temps, le roi Ndoumbélane se réveille de sa longue torpeur pour enfin se rendre compte que son gouvernement vit au-dessus de ses moyens et qu’il a créé des agences doublons pour caser sa clientèle politique. Quel cirque ! C’est ce qui arrive quand on choisit un roi à la vision borgne, qui ne compte que sur ses caisses de résonnance dans la presse pour transformer son invincible médiocrité en leadership. Non Ndoumbélane du dèm ! Tout est à l’arrêt dans ce pays où le désert a fini de camper jusque dans l’espace politique. Plus de leaders politiques, plus d’analystes politiques, plus de science politique. La science politique est service des chapelles politiques au lieu d’être la lumière qui devrait permettre de voir leur trajectoire. La sécheresse à Ndoumbélane est à la fois chronique et universelle.

Pendant ce temps, un président d’une association consumériste est accusé de consommer ses propres mandants en légitimant toutes les hausses sèchement décidées par ses amis « consommateurs » de consommateurs. Cannibalisme symbolique ou tartufferie consumériste ? Il paraît que le gus est employé au Palais de Ndoumbélane : comment le berger du troupeau de brebis peut-il manger avec les loups ? Un leader consumériste qui consomme ses propres amis consommateurs ! Seul Ndoumbélane pouvait offrir un scénario aussi proche de la vie aquatique.

Pendant ce temps, les cœurs secs de Ndoumbélane sont heureusement bercés par la mélodie divine composée par un jeune d’un don forcément céleste ; un jeune à la voix sublime et au génie nietzschéen ; un virtuose qui a l’inspiration « d’accoucher d’une étoile qui danse » à partir « du chaos » qu’il abrite. Grâce à son talent, le nom du quidam du pétrole ne donne, pour la première fois depuis le coup de la BBC, plus aux habitants de Ndoumbélane l’envie de se boucher les oreilles. A…li…ou, sunu quatre cent mille… Quelle voix ! Comme quoi, quelles que soient les profondeurs des abimes, les artistes se font toujours pousser des ailes pour en sortir et tutoyer le ciel…