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Sante

Affaire Mariana : 3 questions sur l'insémination post mortem

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Mariana Gonzales-Gomez, une Espagnole de 31 ans, souhaite se faire inséminer les gamètes congelés de son époux, décédé des suites d'un cancer. Elle réclame le transfert en Espagne du sperme de son mari, l'Italien Nicola Turri, car l'insémination post mortem est interdite en France.

Mariana souhaite procéder à une insémination post mortem, illégale en France mais autorisée en Espagne. "L'Obs" détaille le cadre juridique de cette procréation médicalement assistée particulière.

Elle veut faire un bébé avec son mari défunt. Mariana Gonzales-Gomez, une Espagnole de 31 ans, souhaite se faire inséminer les gamètes congelés de son époux, décédé des suites d'un cancer. Elle réclame le transfert en Espagne du sperme de son mari, l'Italien Nicola Turri, car l'insémination post mortem est interdite en France.

Après l'avis négatif rendu par le tribunal administratif, le rapporteur du Conseil d'Etat s'est déclaré favorable à la requête de la jeune femme, vendredi 27 mai. "Nous préconisons l'exportation du sperme", a déclaré le rapporteur public, Aurélie Bretonneau, qui a évoqué une situation "exceptionnelle".

Le couple Turri s'était installé à Paris en 2013. Atteint d'un cancer, le mari de Mariana avait fait congeler ses gamètes en 2013, anticipant un traitement pouvant le rendre stérile. En rémission, il avait ensuite contracté une leucémie qui lui fut fatale. Selon l'avocat de la veuve, David Simhon, le décès de Nicola Turri, le 9 juillet 2015, est intervenu "une heure avant le rendez-vous chez le notaire pour donner son consentement à la procréation médicalement assistée (PMA) de son vivant".

L'avocat soutient que concevoir un enfant par insémination post mortem ne constitue pas une grande différence avec une procréation naturelle, réalisée peu de temps avant le décès du père. Pour David Simhon, le refus du tribunal de permettre l'exportation des gamètes en Espagne, où l'insémination post mortem est autorisée, porte "atteinte à une liberté fondamentale" : le droit d'être parent au sens biologique du terme. "L'Obs" revient sur les modalités et le cadre juridique de l'insémination post mortem.

 # Comment procède-t-on à une procréation post mortem ?

Il existe deux manières de procréer post mortem au moyen d'une assistance médicale : l'insémination et le transfert d'embryon. "Dans le premier cas, on injecte directement le sperme à l'intérieur de l'utérus de la femme au moment où elle ovule", détaille Carine Brochier, coordinatrice de projet à l'Institut bioéthique européen de Bruxelles. "Mais le résultat est loin d'être garanti", poursuit-elle.

"Le deuxième cas est celui de la fécondation in vitro (FIV). La femme est stimulée par de hormones et on va prélever sous anesthésie locale ses ovocytes. On y adjoint ensuite le sperme décongelé. Puis on sélectionne parmi les embryons celui qui présente le moins de risque de développer une maladie avant de le réimplanter dans le corps de la femme."

Les embryons peuvent être conservés à une température de -196°C environ 5 ans et les gamètes, 10 ans. Selon Carine Brochier, seules 15% des procréations réalisées à partir de sperme congelé sont couronnées de succès. "L'échec entraîne une grande désillusion pour les femmes qui considèrent la procréation post mortem comme leur dernière chance d'avoir un enfant biologique avec l'homme qu'elles ont aimé", poursuit la spécialiste en bioéthique.

# Que dit le droit français ?

D'après le Code de la santé publique, la procréation médicalement assistée "a pour objet de remédier à l'infertilité d'un couple ou d'éviter la transmission à l'enfant ou à un membre du couple d'une maladie d'une particulière gravité". La loi précise que "l'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer, et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination."

En France, toute forme de procréation post mortem est donc prohibée puisque l'insémination est réservée aux couples vivants. C'est le principe de l'intérêt premier de l'enfant qui prévaut dans la législation française. Le droit de l'enfant plutôt que le droit à l'enfant. Une loi que Corine Brochier estime "sage et raisonnée", car elle empêche, selon elle, de "mettre au monde un enfant orphelin dès avant sa conception".

C'est sur cette base légale que Mariana s'est vue refuser le transfert en Espagne des gamètes de son mari. Cette position est actuellement défendue devant le Conseil d'Etatpar l'Agence de la biomédecine et l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, dont dépend le Centre d'études et de conservation des œufs et du sperme (Cecos) de l'hôpital Tenon, où est conservée la semence de Nicola Turri.

Ce n'est pas la première fois que la question de l'insémination post mortem est posée en France. En 2009,Fabienne Justel s'était engagée sans succès dans une bataille juridique pour obtenir le droit de se faire inséminer les gamètes de son mari, mort en 2008 des suites d'un cancer. De vifs débats ont ensuite ponctué l’examen des lois de bioéthique en 2011 pour autoriser cette pratique. A l'époque, le comité national d'éthique avait rendu un avis favorable sur le transfert d'embryon post mortem mais avait rejeté l'hypothèse d'une légalisation de l'insémination post mortem. La loi n'a finalement pas été modifiée.

 # Quels pays autorisent  l'insémination post mortem ?

La Belgique, l'Espagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni autorisent la procréation post mortem, comme le prouveune étude comparée des législations réalisée en 2011 à la demande du Sénat. L'opération peut intervenir de six mois à dix ans après le décès, en fonction des pays. En Espagne, l'insémination post mortem est autorisée jusqu'à un an après le décès du père. Le lien de filiation est alors automatiquement établi. Mariana Gonzales-Gomez a donc jusqu'au 10 juillet pour obtenir gain de cause.

La loi espagnole de 2006, sur les techniques de reproduction humaine assistée, stipule que l'insémination post mortem nécessite obligatoirement un accord du compagnon de la future mère. Dans le cas de Mariana, "le couple avait décidé de s’engager dans un parcours de procréation juste avant (l)a mort (de Nicola)", explique David Simhon. "Son décès a interrompu le processus, mais Nicola avait laissé une sorte de testament dans lequel il souhaite que son épouse puisse utiliser ses gamètes après sa mort."

Le jeune homme de 30 ans avait en effet fait part de son désir d'enfant dans ces lignes, publiées dans les colonnes du "Le Monde" le 22 avril dernier : "Avant de ne plus pouvoir écrire, je tiens à vous donner des indications sur la seule chose qui compte aujourd'hui dans ma vie et l'instabilité de mon futur, les paillettes (de sperme, NDLR). Je voudrais que Mariana puisse en faire l'usage qu'elle désire si (...) cette leucémie devait être fatale pour moi."

La décision de la justice administrative devrait venir confirmer l'avis du rapporteur public. Mais, dans le cas d'un refus, Mariana Gonzalez-Gomez envisage de saisir la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Elle pourrait alors demander la suspension du délai d’un an auprès de l’Espagne.

Maïté Hellio



2 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Mai, 2016 (08:15 AM)
    la France est la premiere nation du monde elle sait ce que les autres nations ne savent pas

    Doit elle considerer que sa liberte a des limites?

    En tout cas en Afrique on souffre du franc cfa qu'elle nous impose. Combien de temps la France tiendra t elle à mepriser le droit des autres? :emoshoot: 
  2. Auteur

    Anonyme

    En Mai, 2016 (20:21 PM)
    Bayil ma dem congélé sama yoss au cas u on ne sait jamais...
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