Quatre petites heures. C’est le temps qu’il a fallu à la journaliste Ashley Feinberg pour retrouver les comptes secrets Twitter et Instagram du directeur du FBI James Comey.
Tout a commencé dans la soirée du mercredi 29 mars. Lors d’un dîner avec des spécialistes de la sécurité, le patron du FBI, nommé en septembre 2013 par Barack Obama, a laissé échapper qu’il avait un compte Twitter et Instagram avec neuf abonnés, afin de garder contact avec sa famille. Une information qu’il aurait peut-être dû garder pour lui.
Fun fact: #FBI director James #Comey is on twitter & apparently on Instagram with nine followers. pic.twitter.com/lDIFirzVeh
— Kevin Rincon (@KevRincon) 30 mars 2017
Il n’en fallait pas plus pour que le blog spécialisé sur les nouvelles technologies Gizmodo, se mette à enquêter. «Qui suis-je pour dire non à un tel défi?» écrit à ce propos Ashley Feinberg, la journaliste à l’origine de cette recherche. Pour son compte Twitter, le seul indice offert par Comey, c’est la nouveauté: «Je suis sur Twitter maintenant.» Concernant Instagram, les renseignements sont plus nombreux: «Ma vie privée est très importante pour moi. Je la chéris. J’ai un compte Instagram avec neuf abonnés. Mais je ne laisse personne s’en approcher : seulement ma famille proche et le petit ami sérieux d’une de mes filles», a-t-il déclaré.
Le directeur du service de renseignement intérieur américain ne peut pas se permettre d’afficher son propre nom. Mais en affirmant avoir des membres de sa famille comme abonnés, James Comey a donné «un indice extrêmement utile».
La journaliste se lance alors à la recherche d’un de ses proches sur les réseaux sociaux mais aucun de ses cinq enfants, ni sa femme n’utilisent leur nom complet. Autre difficulté, Instagram n’est pas propice à la recherche personnalisée. Après avoir découvert que le fils Brien Comey était invisible sur les réseaux sociaux mais connu sur Internet pour ses exploits au basket-ball, Ashley Feinberg recherche «sur un coup de tête»: «"Brien Comey" -James» sur Twitter. Le résultat offre un tweet de l’équipe de basket-ball de l’université de Kenyon dans l’Ohio, là justement où jouait le jeune Comey. Ce tweet renvoie vers un lien Instagram dans lequel un commentaire identifie directement Brien Comey.
@KenyonGolf's Jordan Harlacher teeing off w/ support from Tim Connolly & Brien Comey: https://t.co/equQuumVkd pic.twitter.com/88dEyRuMUt
— Kenyon Sports (@KenyonSports) 10 avril 2016
James Comey, alias Reinhold Niebuhr
Une première étape vient d’être franchie mais le compte de Brien est bloqué. En demandant l’accès, Instagram affiche plusieurs autres profils susceptibles de plaire à la journaliste. Souvent, ces suggestions sont basées sur les comptes que suit le fils Comey, et beaucoup portent le même nom de famille. Deux n’ont pas de photo de profil, la femme de James Comey et un certain reinholdniebuhr, suivi par… neuf personnes, comme l’indiquait le patron du FBI.
Comey avait justement fait sa thèse sur ce dénommé Reinhold Niebuhr, un théologien américain protestant, célèbre pour ses études sur les relations entre la foi chrétienne, la politique moderne et la diplomatie. Autre petit indice: cet homme est mort en 1971… Sur Twitter, sept personnes utilisent ce nom mais seul un compte ne possède pas de photo, et celui-ci n’a qu’un abonné. Le directeur du service de renseignement doit rester discret mais cela le rend encore plus visible.
Son unique abonné n’est autre que le journaliste et proche de Comey, Benjamin Wittes, suivi par 25 000 personnes et qui n’en suit en retour que 1 178, ce qui veut dire qu’il ne s’abonne pas à chaque nouveau follower. Pourquoi alors suivre un œuf violet qui ne tweet jamais? Autre indice, ce «Reinhold Niebuhr» utilise comme identifiant @projectexile7, un programme fédéral pour lutter contre les crimes liés aux armes, lancé par l’actuel directeur du FBI quand il était avocat.
Enfin, pour être définitivement convaincu, @projectexile7 suit 27 comptes, dont la plupart sont soit des journalistes ou agences de presse, soit des comptes officiels du gouvernement. Les tweets qu’il a aimés, 39 au total, ont un rapport direct avec le FBI, James Comey lui-même ou Donald Trump.
Le FBI, en pleine investigation sur le rôle joué par la Russie pendant la campagne présidentielle américaine, n’a pas souhaité faire de commentaire. Pourtant, «Reinhold Niebuhr» a posté sur Instagram, quelques heures après l’article de Gizmodo, un gif d’un homme en train d’applaudir, avec pour tag la journaliste à l’origine d’une enquête qui n’aura duré que quatre heures. Une histoire qui vaut à @projectexile7, plus de 8 000 nouveaux abonnés sur Twitter.
James Comey seems to be taking his social media outing by @ashleyfeinberg gracefully—he just posted this Instagram:https://t.co/gY63MNCZjZ pic.twitter.com/Wm91UuwL5N
— Quartz (@qz) 31 mars 2017
0 Commentaires
Participer à la Discussion