Dans les salles d’attente de l’hôpital Serigne Mbacké Médina de Touba, des femmes se confient. La fatigue se lit sur leurs visages, tandis qu’elles portent leurs enfants, dont l’état de santé précaire est évident au premier regard. Déterminées, elles partagent néanmoins leurs histoires avec émotion. Parmi elles, Ndeye Arame Ndiaye, une jeune mère, serre contre elle son fils de neuf mois, désormais guéri de la malnutrition. Son témoignage illustre les défis auxquels sont confrontées de nombreuses mères sénégalaises, mais aussi les progrès possibles lorsque les soins sont accessibles et réguliers. Elle partage l’histoire de son enfant avec l’Association des journalistes en santé, population et développement (AJSPD), présente dans la région de Diourbel dans le cadre du projet « Santé en lumière », soutenu par la Fondation Bill & Melinda Gates, pour enquêter sur les questions de malnutrition. Touba, marquée par un fort seuil de pauvreté, est durement touchée par la malnutrition des enfants, des adolescents et des mères enceintes ou allaitantes.
« À six mois, mon enfant ne mangeait plus »
« À six mois, mon enfant ne mangeait plus. Il avait les pieds enflés, le corps chaud, et il perdait du poids », raconte Ndeye Arame, la voix posée mais encore émue. « Il n’avait pas d’appétit du tout », insiste-t-elle. Le diagnostic posé à l’hôpital a révélé une malnutrition aiguë sévère. Grâce à une prise en charge rapide, le petit garçon a bénéficié d’un protocole de traitement incluant une farine enrichie. Sa mère a reçu des conseils sur l’alimentation, la vaccination et le suivi médical. « J’ai commencé à lui donner la farine tous les jours, et j’ai vu des résultats positifs progressivement », confie-t-elle.
Accouchée par césarienne, Ndeye Arame n’a reçu son bébé que trois jours après l’opération. Affaiblie par sa propre santé fragile, elle n’a pas pu allaiter exclusivement son enfant. Malgré ces difficultés, elle s’est battue pour garantir à son fils les soins nécessaires. « À trois mois, il pesait 2,5 kg. Aujourd’hui, à neuf mois, il pèse 8,8 kg. J’ai veillé à ce qu’il respecte son calendrier vaccinal », explique-t-elle.
À ses côtés, Soda Ndiaye vit une situation plus préoccupante. Mère d’un enfant d’un an, elle raconte que les premiers signes de malnutrition sont apparus dès ses six mois. « L’hôpital m’a confirmé qu’il était malnutri. Il devait suivre un traitement », confie-t-elle. Cependant, dans un contexte d’extrême précarité, suivre ce traitement est difficile, même si elle s’efforce de respecter les rendez-vous médicaux. Les moyens manquent souvent. « Son aîné, âgé de plus de deux ans, ne marche pas encore », ajoute-t-elle, émue. Elle-même a vécu une grossesse compliquée, marquée par des pertes d’appétit fréquentes et de nombreuses maladies. « Mon mari se débrouille comme il peut, mais il est pauvre. Parfois, je dois marcher longtemps pour me rendre à l’hôpital », tente-t-elle de justifier.
Son histoire, partagée par tant d’autres femmes dans les quartiers périphériques de Touba, rappelle que la malnutrition résulte souvent d’un enchevêtrement de facteurs : pauvreté, accès limité aux soins, méconnaissance des bonnes pratiques alimentaires et surcharge de travail domestique.
Des interventions salvatrices, mais à renforcer
La prise en charge communautaire, la distribution d’aliments enrichis, les programmes de vaccination et le soutien à l’allaitement exclusif ont permis à plusieurs enfants de retrouver un bon état nutritionnel. Cependant, ces efforts doivent être intensifiés, notamment dans des zones à forte densité comme Touba, où les pressions sociales, économiques et sanitaires s’entremêlent.
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