Bernard Tine, expert en com : "Sous couvert de culture : l’influence croissante des Maisons russes au Sénégal"
Pays longtemps considéré comme l’un des plus stables et institutionnellement solides de l’Afrique de l’Ouest, le Sénégal occupe une place particulière dans la stratégie d’influence russe sur le continent. Pays francophone, allié historique de l’Occident, doté d’institutions civiles encore fonctionnelles et d’un espace médiatique actif, le Sénégal représente pour Moscou un enjeu symbolique : y installer durablement une influence revient à démontrer que la stratégie russe ne se limite pas aux régimes militaires ou aux États fragiles.
C’est dans ce contexte que s’inscrit le développement du centre culturel russe Kalinka à Dakar, communément assimilé à une Maison russe. Officiellement dédié à la promotion de la culture et de la langue russe, ce centre, selon de nombreux observateurs, s’insère en réalité dans un écosystème d’acteurs politiques, militants et médiatiques dont l’orientation dépasse largement le cadre culturel.
Contrairement à certaines Maisons russes africaines directement issues du modèle de franchise de Rossotrudnichestvo, le centre culturel russe Kalinka présente une configuration hybride. Il est officiellement dirigé par Larissa Kryukova, épouse de l’ancien ambassadeur de Russie au Sénégal, Sergueï Kryukov. Cette proximité diplomatique lui confère une légitimité institutionnelle forte, tout en lui permettant de bénéficier d’un réseau politique et administratif local étendu. Dans les faits, une large part de l’activité opérationnelle et du rayonnement public du centre est portée par Oumy Sène, adjointe à la direction. Cette dernière incarne le véritable pivot local de la présence culturelle russe à Dakar. Oumy Sène n’est pas issue du monde culturel. Mais elle recèle une belle histoire sénégalaise. Elle n’est personne d’autre que la fille du regretté Ibrahima Sène, figure historique du Parti pour l’indépendance et le travail (PIT). Plus qu’un rôle culturel, elle représente le centre Kalinka lors d’événements internationaux, notamment au Forum Russie–Afrique de Saint-Pétersbourg, intervient souvent dans les médias de propagande russes (Russia Today, African Initiative).
On la cite également comme interface entre le soft power et les mouvements panafricanistes sénégalais. Kalinka en plus d’un centre culturel est un point de convergence politique. Le Sénégal accueille également une branche du KCOPC (Conseil des Compatriotes Russes), organisation largement documentée comme instrument de l’influence russe à l’étranger.
La branche sénégalaise entretient des liens étroits avec le centre Kalinka, des groupes militants locaux et le mouvement PARADE International Sénégal présidé par le très actif Samba Mbenda Diaw, intellectuel intervenant souvent dans la presse locale et défendant la rupture avec l’Occident, le panafricanisme et la réorientation stratégique vers la Russie,
Enfin Urgences Panafricanistes, mouvement fondé par Kémi Séba et régulièrement cité pour ses liens avec l’écosystème Wagner. Il vient de se faire retirer sa nationalité béninoise suite à son soutien à la tentative de putsch contre Patrice Talon. Sous prétexte de dénonciation du « néocolonialisme occidental », il mobilise de même que sa compère Nathalie Yamb des groupes d’activistes autour de thématiques clés pour Moscou : retrait des bases militaires françaises, etc.
La programmation du centre Kalinka illustre la mutation du modèle des Maisons russes : événements politiques sous couvert culturel, présence de récits géopolitiques dans les contenus diffusés et relais systématique des activités par les médias russes.
La culture devient un prétexte opérationnel, permettant de toucher les étudiants, les artistes et milieux intellectuels et les jeunes militants, notamment issus des courants panafricanistes.
Contrairement au Mali ou au Burkina Faso, la Russie n’opère pas au Sénégal dans un environnement militarisé ou ouvertement hostile à l’Occident. Elle privilégie une approche incrémentale et discrète, une influence dans les réseaux militants existants, et l'exploitation des débats souverainistes locaux. Cette stratégie vise moins la rupture immédiate que l’érosion progressive du consensus autour de la démocratie libérale.
Au Sénégal, la Maison russe ne se présente pas comme un centre de recrutement militaire ou un outil de déstabilisation brutale. Elle agit plutôt comme un nœud d’influence politique, reliant diplomatie officielle, propagande médiatique et activisme local.
Commentaires (7)
Bernard Tine me rappelle Abdou Diouf quand il dirigeait la francophonie. Le problème des dirigeants et académiciens français était (et est toujours) l'anglicisme qui a pénétré la langue française et que les jeunes français aiment. Abdou Diouf se donna comme mission de parler aux jeunes français pour leur demander de préférer leur langue française à l'anglais. Dans un discours, il déclara: "l jeunesse française préfère l'utilisation de mots anglais à la place des équivalents français qu'elle trouve ringards. Mais être ringard, c'est préférer la langue d'un autre à la place de votre langue maternelle ". Attaquer l'anglais pour le français. Et celui qui le fait oublie qu'il est sérère. Comment avoir un cerveau aussi noyé au point de ne pas comprendre qu'on est exactement le prototype de ce qu'on reproche à l'autre d'être.
C'est exactement cette noyade du cerveau que vit Bernard Tine. Il crie de refuser la culture russe, de préférer la culture française, et il s'oublie. C'est dramatique.
NB: Une seule chose me manque dans ce texte l'adresse de la Maison Russe. Il m'aurait beaucoup aidé en la donnant. Mais, je trouverais. Et, inchallah, à cause de ce texte je participerais aux activités de cette maison.
Au Sénégal,la Russie avance masquée!
Les valeurs qu'elle véhicule ne sont cependant pas les nôtres!
Vigilance !
This is what I do.... Www.JobatHome1.Com
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