Dakar va accueillir, du 29 août au 5 septembre, le Forum africain sur les systèmes alimentaires 2025 à l’initiative de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA). Cet événement continental d’envergure réunira plus de 5 000 participants notamment les magnats de l’agro-industrie mondiale pour « échanger, réfléchir et agir en faveur d’un avenir alimentaire durable et résilient pour l’Afrique et le monde entier ».

L’enjeu de cette rencontre est de faire de Dakar le catalyseur de la vision agricole de AGRA qui repose sur des innovations et pratiques agricoles (l’utilisation d'engrais, de pesticides, l'irrigation et la sélection de variétés à haut rendement) qui ont entraîné une forte augmentation de la productivité des cultures alimentaires dans les pays en développement, principalement à partir des années 1960. Si elle (la révolution verte) a permis d'accroître la production et de nourrir de vastes populations, elle a parallèlement entraîné des conséquences négatives, notamment une dégradation des sols et une perte de biodiversité.

Autant de méfaits qui poussent des chercheurs et acteurs des associations paysannes à tirer la sonnette d’alarme pour alerter l’État du Sénégal. Lors d’un Webinaire organisé par l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique (AFSA), ce mercredi 5 août, ces derniers ont dévoilé l’emprise d’AGRA sur la politique agricole et sa menace pour la souveraineté alimentaire.

Lancée en 2006 par la Fondation Bill et Melinda Gates et la Fondation Rockefeller à l’initiative de l’ancien Secrétaire Général des Nations unies Kofi Annan, l’évaluation des actions de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA) dans les 13 principaux pays cibles (Mali, Ghana, Nigéria, Burkina Faso, Éthiopie, kenya, Ouganda, Rwanda, Tanzanie, Malawi, Mozambique, Zambie) a abouti, selon le chercheur Américain Thimothy A. Wise, aux conclusions suivantes :

« Peu de preuves d’une augmentation significative des revenus ou de la sécurité alimentaire des petits producteurs alimentaires ». Au contraire, dans les pays où l’AGRA opère, il est constaté une augmentation de 30 % du nombre de personnes souffrant de la faim. Une situation qui touche d’ailleurs 130 millions de personnes dans les 13 pays cibles de l’AGRA. D’après Mutinta Nketani, coordonnatrice de l’Alliance zambienne pour l’agroécologie et la biodiversité, AGRA a signé un protocole d’accord avec l’État lui permettant de formuler la politique agricole nationale, au final « plus de 60% des producteurs agricoles sont plongés dans la famine ».

En plus des impacts environnementaux négatifs, notamment l’acidification des sols en cas de monoculture avec des engrais synthétiques à base de combustibles fossiles, la révolution verte promue par AGRA est « une grave menace pour un système alimentaire durable ».

En conclusion, le socio-économiste du développement et directeur exécutif de l'Institut de recherche et de promotion des alternatives pour le développement (IRPAD), Mamadou Goïta et sa collègue Absa Mbodji de la Dytaes, invitent l’État du Sénégal à porter la voix de l’agroécologie qui est « la seule solution pour un agriculture et un système alimentaire durable ».