Le Dr Fatou Samba Ndiaye, cheffe du service d’hématologie clinique à l’hôpital Dalal Jamm de Guédiawaye et vice-doyenne de la Faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odontologie de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, s’est exprimée sur France 24 à propos de la première greffe de moelle osseuse réalisée au Sénégal. Lors de cette intervention, elle a salué une avancée majeure pour la médecine sénégalaise tout en exhortant les autorités à investir dans la souveraineté sanitaire, en partenariat avec les acteurs privés et internationaux.
Retour sur une prouesse médicale
Revenant sur cette première greffe, le Dr Ndiaye a qualifié l’opération de « grand succès ». « Le patient va bien », a-t-elle assuré, précisant que cette réussite est le fruit de plusieurs années de préparation. « L’intervention, qui a nécessité de nombreux essais et une organisation rigoureuse du parcours patient depuis le diagnostic posé en 2024, marque un tournant pour le pays et la sous-région », a-t-elle ajouté. Le patient, atteint d’un myélome multiple, avait initialement envisagé un traitement en Tunisie. Face aux coûts prohibitifs de l’évacuation sanitaire, il est revenu au Sénégal, où il est devenu le « patient zéro » de cette technique novatrice localement.
La souveraineté sanitaire, une priorité absolue
Pour le Dr Ndiaye, cette greffe constitue un pas décisif vers la souveraineté sanitaire. « Tous les patients n’ont pas les moyens de se faire évacuer à l’étranger. Il est crucial que leur prise en charge se fasse ici, avec une qualité optimale », a-t-elle déploré. Elle a appelé l’État à faire de ce chantier une priorité : « On parle souvent de souveraineté alimentaire, mais la souveraineté sanitaire est tout aussi vitale. Les évacuations coûtent cher – billets d’avion, séjours prolongés, frais hospitaliers – alors que développer des infrastructures et des compétences localement permettrait d’économiser ces sommes colossales. » Pour pérenniser cette avancée, son équipe s’attelle à garantir un approvisionnement constant en médicaments et équipements. « Nous préparons déjà la prise en charge d’un deuxième patient dès mai, avec l’ambition que cette technologie devienne une solution durable pour le plus grand nombre », a-t-elle annoncé.
Le défi du financement et de l’équité
Le Dr Ndiaye a également interpellé l’État et ses partenaires sur la nécessité d’un financement robuste. « Des investissements conséquents sont indispensables pour bâtir une autonomie médicale durable », a-t-elle insisté. Cette percée historique illustre, selon elle, l’urgence d’une volonté politique forte et d’une collaboration avec les partenaires pour offrir des soins de qualité sans obliger les patients à quitter le pays. Elle a par ailleurs abordé les disparités territoriales dans l’accès aux soins : « La radiothérapie reste concentrée à Dakar, mais des efforts de décentralisation émergent, comme à Touba, avec des projets à Saint-Louis. » Elle a toutefois souligné un défi majeur : « Une maintenance efficace des équipements est essentielle pour éviter les pannes récurrentes qui creusent les inégalités. »
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