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Monday 01 September, 2025
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Faure Gnassingbé, le sceptre… et l’éternité

Auteur: Mass Massamba Ndao

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Au Togo, un air de déjà-vu souffle sur la scène politique. Faure Essozimna Gnassingbé, au trône depuis 2005, n’est plus président de la République. Enfin, officiellement. Car derrière le changement de titre se joue un subtil tour de passe-passe institutionnel : en devenant « Président du Conseil », un poste sur mesure créé par la nouvelle Constitution, il concentre plus que jamais l’ensemble des pouvoirs exécutifs. Il dirige le gouvernement, contrôle l’armée, nomme les hauts responsables, pilote la diplomatie et dispose du droit de grâce. Le pouvoir absolu, sans le titre.La transition vers un régime parlementaire, validée par l’Assemblée nationale le 3 mai 2025, n’est qu’un rideau de fumée. La manœuvre, habillée d’un vernis démocratique, dissimule mal une réalité implacable : le pouvoir reste dans les mêmes mains. Les plus critiques parlent d’un « coup d’État institutionnel », d’un « habillage monarchique » dans un pays qui peine à rompre avec la tradition des pouvoirs à vie.Comme pour rassurer, le nouveau rôle honorifique de président est confié à Jean Lucien Savi de Tové, 86 ans, vétéran du Sud-Togo. Une nomination symbolique, sans leviers réels, interprétée comme une tentative de calmer les tensions régionales. Mais l’opposition, laminée et désabusée, dénonce une mascarade. Nathaniel Olympio, leader du mouvement « Touche pas à ma Constitution », parle d’une « journée triste » pour la nation.Le calme règne pourtant. Résignation ou peur ? Dans ce Togo aux plages bordées de palmiers, l’indignation ne trouve plus d’écho. L’histoire se répète, implacable. Et Faure trace sa route, désormais embarqué pour un mandat de six ans, renouvelable. Comme une démonstration que les constitutions sont des outils modulables au gré des ambitions personnelles.Le cas togolais n’est pas isolé. En Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, au pouvoir depuis 2011, laisse planer le doute sur un quatrième mandat, se disant « en pleine santé ». Ailleurs, d’autres leaders, parfois octogénaires, s’accrochent, invoquant le « devoir de servir » ou des circonstances exceptionnelles.Youssou Ndour le résumait d’une phrase : « L’homme noir aime trop le pouvoir. » Généralisation ou vérité dérangeante ? La longévité politique en Afrique n’est pas qu’une question d’âge, mais de refus obstiné de céder le fauteuil. Et si les peuples s’essoufflent à réclamer l’alternance, les dirigeants, eux, excellent à se réinventer.Pourtant, une question persiste : à quel moment un dirigeant, si sincère soit-il, devient-il un frein à l’innovation, à la jeunesse, à la respiration démocratique ? La paix et la stabilité, invoquées pour justifier l’immobilisme, risquent de devenir des prétextes à la confiscation du pouvoir. Il est temps que le continent réinvente l’exercice du leadership. Sans sacraliser le fauteuil.
Auteur: Mass Massamba Ndao

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