ANALYSE - Pénuries annoncées du riz et de l’essence : Les Français du Sénégal s’inquiètent

La disparition prochaine de carburant et du riz le plus accessible aux populations fait craindre des tensions sur le front social, qui ne manquent pas d’inquiéter les ressortissants français établis au Sénégal. Ils ont d’autant plus raison de s’alarmer qu’ils ne voient pas d’amélioration dans les jours à venir, l’Etat ayant bien gaspillé avec sa prodigalité.

La situation économique du pays n’inquiète pas que les ménages les plus démunis, car même les partenaires étrangers ne semblent plus se faire d’illusions. Ainsi, la réunion de l’Association des ressortissants français au Sénégal, qui s’est tenue mercredi dernier à Dakar, avait parmi ses principaux objets de concertation, la hausse des prix des produits de première nécessité. Et pour la majorité de participants, les nuages qui s’accumulent sur le Sénégal, ne sont pas annonciateurs de lendemains qui chantent.

Le premier motif d’inquiétude réside, selon ces expatriés dont une bonne partie s’active dans des secteurs porteurs de l’économie, au niveau des réserves en hydrocarbures du Sénégal. Les informations en leur possession leur ont signalé qu’à l’heure actuelle, le Sénégal n’a plus que trois jours de réserves pour l’essence Super. La raison en serait que la Sar n’en a pas produit assez, et l’autre importateur majeur, la société Total, ne s’attend pas à être livrée avant le mois prochain, dans deux semaines, au mieux.

Cette pénurie est à elle seule une cause d’inquiétude, mais elle vient s’ajouter à une autre, dont elle accentue les effets. L’un des participants à la rencontre s’est confié au journal Le Quotidien, pour dire : «On a constaté depuis quelque temps la raréfaction du riz brisé importé, et l’on sait que, de par la situation du marché international, ce produit va être de plus en plus rare. Depuis un certain temps, c’est plus le riz entier qui est importé ici. Or, ce produit est beaucoup plus cher que ce à quoi les Sénégalais moyens sont habitués. Il va donc être plus difficile à tous les ménages moins aisés d’y avoir accès.» En conséquence de quoi, les compatriotes de Nicolas Sarkozy n’écartent pas que des troubles sociaux surviennent à terme, si rien n’est fait pour améliorer les choses et atténuer les effets de ces manques.

Or, à ce niveau, les analyses à leur niveau sont des plus pessimistes. Ils ont noté que, du fait de la préparation du sommet de l’Organisation de la conférence islamique (Oci), le gouvernement avait accordé beaucoup d’exonérations fiscales et douanières à de nombreux importateurs. Plusieurs en ont profité pour importé plus que de mesure, et ont rempli leurs arrière-cours de marchandises. Ce qui fait que, nombre de commerçants n’ont pas besoin d’importer encore pour un certain temps, et l’Etat commence à ressentir le retour de bâton, avec la réduction de ses recettes fiscales. «Cela diminue d’autant les marges de manœuvre dont bénéficient les pouvoirs publics pour influer sur le cours des choses», jugent les observateurs étrangers.

Sur les hydrocarbures, les informations dont ont fait état les analystes français laissent apparaître une volonté de l’Etat de limiter la consommation du Super, en augmentant le prix de 30 ou 40 francs Cfa dans les jours à venir. «Mais, même cette mesure, ne pourrait pas cacher longtemps l’ampleur des problèmes», concluent ces gens. Sur ce point du carburant néanmoins, la direction de la Société africaine de raffinage (Sar) s’est inscrit en faux sur l’annonce d’une prochaine rupture de stocks. Le directeur de la société a annoncé que son usine était en pleine production, et ne prévoyait pas de manque d’essence Super pour les jours ou les semaines à venir. Tout en prenant soin de préciser qu’il ne pouvait parler qu’au nom de son entreprise, et non pas sur l’état des réserves du pays en hydrocarbures.

Pour en revenir à l’Association des ressortissants français, le tableau qu’ils dressent des perspectives du pays n’est pas des plus reluisants. Pour eux, le sommet de l’Oci a montré une propension au gaspillage des deniers par les dirigeants du pays au point que même les partenaires au développement ne seraient pas trop tentés à voler à leur secours, car le pays ne donnant pas l’impression de vouloir réellement faire face à ses vrais problèmes.