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Economie

Dame Ndiaye, vice-président de la Chambre de commerce de Dakar : ’ Abdoulaye Wade ne doit pas se mêler de tout'

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Dame Ndiaye, vice-président de la Chambre de commerce de Dakar : ’ Abdoulaye Wade ne doit pas se mêler de tout'

Dans son bureau à la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture de Dakar (Cciad) où il occupe le poste de premier vice-président chargé du commerce de cette institution consulaire, M. Dame Ndiaye jette un regard critique sur la manière dont le président de la République gère le pays. Ancien président de l’Union nationale des commerçants et industriels du Sénégal (Unacois), M. Ndiaye a aussi dit son mot sur la hausse des denrées de première nécessité. Il n’a pas manqué d’expliquer pourquoi les commerçants chinois ont ravi la vedette à leurs homologues sénégalais. Entretien.

Wal fadjri : Actuellement, la situation du pays est surtout marquée par des hausses remarquables sur les prix des denrées de première nécessité. Quelle lecture en faites-vous ?

Dame Ndiaye : Avant de répondre à cette question, permettez-moi de jeter un regard critique sur la manière dont le président de la République, Me Abdoulaye Wade, gère le pays. Le chef de l’Etat a un handicap. De quoi s’agit-il ? C’est qu’il a en face de lui une opposition et une société civile qu’il n’écoute pas. Ce qui fait qu’il évolue en solo. Il se suffit à lui-même sur toutes les questions de portée nationale. Or, chacun a son mot à dire sur la marche du pays. Le fait que l’opposition et la société civile aient un mauvais œil sur toutes les actions du président de la République est un grand handicap pour ce dernier. Il fait des efforts dans certains domaines certes, mais je ne suis pas d’accord avec lui sur la manière dont il gère le pays. Il accepte que des groupuscules mettent la pression sur lui. Les gens ont maintenant dans leur conscience que leur problème ne peut être résolu que lorsque le président de la République est informé de ce qui se passe. Alors que cette question ne relève pas de sa compétence. Il doit laisser les ministres et ses conseillers qui ont été nommés pour ça. Les gens ne passent plus par l’administration pour la résolution de leurs problèmes. Ils se font entendre à travers les marches. Si les gens crient dans la rue, il les appelle pour leur donner de l’argent. Et je ne sais pas par quel moyen il trouve cet argent. Car le budget, qui est déjà voté par l’Assemblée nationale, obéit à des règles de fonctionnement. Il est classé par chapitre. Et il faut une raison pour tirer de l’argent dans ce budget. Mais aujourd’hui quiconque crie, on lui donne de l’argent. C’est ça mon problème. Je ne suis pas un opposant. Je suis un citoyen à part entière. J’ai donc le droit de dire ce que je pense si ça ne va pas.

Wal fadjri : Vous pensez que c’est une dérive qui peut engendrer une autre ?

Dame Ndiaye : J’ai vécu l’ajustement structurel. Ce qui en était l’origine, c’était le régime qui faisait la pagaille. Lui aussi (Abdoulaye Wade : Ndlr), s’il n’a pas un plan de gestion, malgré ses capacités à trouver de l’argent, il finira par avoir des difficultés pour s’en procurer. Or, le pays a besoin d’argent. Surtout en cette période où les travaux d’infrastructures routières commencent à émerger. Il faut que les choses se passent dans les règles de l’art. À défaut, il risque de ne pas mettre en œuvre ses projets. Pire, d’autres problèmes peuvent naître.

Wal fadjri : Quelle doit être, à votre avis, l’attitude du président de la République ?

Dame Ndiaye : Il doit écouter les gens. Il doit chercher des conseillers qui ont des capacités sur les domaines dans lesquels ils ont été désignés. Il faut qu’il les écoute. Qu’il donne aussi des pouvoirs aux ministres, aux directeurs, aux gouverneurs. Mais ces membres de l’Administration n’ont aucun pouvoir réel. Tout est concentré entre les mains du président de la République. Au point qu’il endosse la responsabilité de tout ce qui est bon et de tout ce qui est mauvais. Cela ne peut pas marcher. S’il continue ainsi de présider aux destinées du pays, il risque de poser un grand problème à son successeur lorsqu’il quittera la tête de la magistrature suprême.

Wal fadjri : Que dites-vous alors des véhicules que le président de la République aurait donnés gratuitement aux anciens ministres et aux anciens députés ?

Dame Ndiaye : Lorsque le chef de l’Etat avait dit que celui, qui ne travaille pas pour le pays, ne doit pas bénéficier de ses biens, tout le monde avait applaudi. Mais lorsqu’il a déclaré avoir donné gratuitement les voitures de fonction aux anciens ministres et aux anciens députés, tous les Sénégalais étaient fâchés. Les Sénégalais ne sont pas d’accord sur cette largesse.

Wal fadjri : Cela vous paraît-il anormal dans ce contexte marqué la cherté de la vie ?

Dame Ndiaye : Avec cette conjoncture difficile, si le président de la République s’aventure à acheter de nouvelles voitures pour les députés et les ministres, cela me paraît anormal. Et puis l’argent ne vient pas de sa poche. Il peut le puiser dans les caisses du Trésor public. Donc, Abdoulaye doit revoir ce qu’il fait. Il doit bien réfléchir avant d’agir. Il doit accorder plus de responsabilités à ses conseillers et aux ministres. Il bénéficie d’une majorité qui lui permet de gouverner. Mais gouverner, c’est prévoir. Gouverner, ce n’est pas lui seul qui doit le faire. Il doit prendre en compte les compétences des autres membres du gouvernement à qui il a confié des postes de responsabilité.

Wal fadjri : Parlons maintenant de la hausse des prix constatée sur les denrées de première nécessité. Quel commentaire pouvez-vous en faire ?

Dame Ndiaye : La hausse des prix sur le riz, le lait, l’huile, etc., je vais en parler aussi. Sur cette question, le président de la République, avant de prendre toute décision, doit aussi faire appel à des gens qui ne regardent que leurs intérêts. J’ai entendu les interventions des uns et des autres, mais, pour la plupart, ils n’ont prêché que pour leur propre paroisse. La hausse des prix dont on parle beaucoup a été trop médiatisée. Elle est intervenue partout dans le monde. En ce qui concerne le riz, il ne représente pratiquement rien dans la dépense. Car celui qui achète 3 kg de riz, si la taxe baisse, le coût lui revient à 60 francs Cfa. Pour celui qui consomme 5 kg de riz, c’est 100 francs. Et 100 francs ne représentent rien dans la dépense. Sur la hausse du lait, tout le monde sait que la hausse du prix vient des producteurs. Leurs Etats ont abandonné les subventions qu’ils leur apportaient. C’est la raison pour laquelle le lait est devenu trop cher. Maintenant, c’est la hausse sur le prix de l’huile que je ne comprends pas. L’huile est produite ici parce que c’est là où on cultive l’arachide. Ce qui est étonnant, c’est que le prix de l’huile a augmenté de 300 francs au moment où on parle de la baisse du prix du riz. Mais il y a le sucre. Nous entendons parler de la baisse du prix des denrées de première nécessité. Mais le sucre n’en fait pas partie. Ce sont simplement des rumeurs. Mais personne n’ose toucher le sucre. Or, c’est le produit le plus utilisé par les consommateurs du Sénégal. Et pourtant il est très cher. Les commerçants sénégalais en ont fait leur cheval de bataille, mais sans succès. On nous parle toujours du prétexte de la création d’emplois, etc.

Wal fadjri : Le chef de l’Etat envisage de suspendre provisoirement les taxes sur les importations pour baisser un peu les prix. Qu’en pensez-vous ?

Dame Ndiaye : Je voudrais, avant qu’il ne prenne cette décision, qu’il aille d’abord en Gambie et en Mauritanie pour voir combien le riz est vendu là-bas. Le prix du riz est beaucoup plus cher dans ces zones. Les efforts déployés par les commerçants pour vendre le riz moins cher, l’Etat ne peut pas le faire. Le prix du riz que l’Etat achetait à la caisse de péréquation était de 195 000 francs. Aujourd’hui, nous le vendons à 180 000. C’était les variétés comme le ‘Siam’. Mais s’agissant du riz ‘Parfumé’, le président de la République ne peut pas le vendre moins cher. A moins qu’il y mette le budget du Sénégal. Avant dévaluation, le prix du riz ‘Parfumé’ était de 350 francs le kg. Aujourd’hui, grâce aux efforts des commerçants sénégalais, le prix du riz ‘Parfumé’ est de 250 à 275 franc, donc très accessible. Au point que les Sénégalais achète maintenant le riz ‘Parfumé’.

Wal fadjri : Mais il y a un problème à ce niveau. Pourquoi le riz coûte moins cher Bocar Samba Dièye, l’un des plus grands importateurs, et cher chez les autres commerçants ?

Dame Ndiaye : Ça, c’est que dit Bocar. Ce que je sais, c’est que le riz ‘Parfumé’ que les Sénégalais préfèrent est différent de celui vendu par Bocar. Ce dernier a du riz. Mais il n’a pas toutes les variétés de riz. Même le riz ‘Parfumé’ a des variétés. Ceux qui préfèrent acheter le riz de Bocar sont libres d’en acheter. Ceux qui préfèrent aller ailleurs sont aussi libres de leur choix.

Wal fadjri : Pourquoi cette différence de prix ?

Dame Ndiaye : Peut-être parce que les prix d’achat ne sont pas les mêmes. Avec la libéralisation, chacun à son choix. Mais il y a une variété de riz difficile à vendre moins cher.

Wal fadjri : Et le riz de la vallée du fleuve, vous ne vous y intéressez pas trop ?

Dame Ndiaye : Le riz de la vallée du fleuve, ce n’est que du bavardage. La production est très insuffisante pour la consommation. Lorsque j’étais dans l’Unacois, nous parcourions le long de la vallée. Mais c’était impossible de rassembler 1 000 tonnes de riz. Mais lorsque les producteurs parlent, vous allez croire qu’ils ont gardé 5 000 à 7 000 tonnes. Ils ne disent pas la vérité. Ils n’ont jamais respecté les accords que nous signons avec eux. Peut-être ça a changé aujourd’hui.

Wal fadjri : Les commerçants se plaignent toujours de la présence de leurs homologues chinois. Pensez-vous que c’est normal ?

Dame Ndiaye : On peut même dire que les commerçants sénégalais sont à l’origine de leur propre descente aux enfers. Car c’est eux qui vont en Chine pour y acheter des conteneurs. Or, les Chinois, s’ils vous vendent un produit 100 francs, si vous revenez, ils vendent moins cher parce qu’ils diminuent la qualité et augmentent la beauté du produit. C’est ça leur politique. Ce qui fait que les stocks que tu avais laissés restent invendus à cause du nouveau produit que tu as acheté. En plus, les commerçants sénégalais importaient d’énormes quantités de marchandises. Cela a étonné les Chinois. Au point que ces derniers ont décidé de les suivre. Et lorsque les Chinois ont su que les Sénégalais achetaient leurs produits moins chers et les vendaient chers au Sénégal, ils ont décidé de venir vendre leurs propres produits. Ce que les Sénégalais vendaient 6 000 francs, les Chinois le vendent à 1 000 francs. C’est tout le problème des commerçants sénégalais. Ce qui est difficile à régler.

Wal fadjri : Qu’est-ce que vous pouvez proposer comme solution ?

Dame Ndiaye : Personnellement si c’était moi, je laisserais tomber les produits chinois. Tant que les Chinois sont là, les commerçants qui continueront à aller Chine pour acheter des marchandises, vont subir une grande perte.



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