AFRICANITE ET NÉGRITUDE : Alger et Dakar même combat ?

Panafricanisme ou Pan- négrisme. Deux concepts au cœurs des festivals panafricain d’Alger (5 au 20 juillet) et celui des Arts nègres prévu du 1er au 14 décembre 2009 à Dakar.

Ira-t-on vers un rassemblement des arts nègres où un rassemblement des Africains ? La question a été récemment soulevée par le Professeur Boubacar Diop, lors d’une conférence-débat sur la promotion des civilisations, des cultures africaines, avec en toile de fond, le dilemme Pan- africanisme et/ ou pan- négrisme.

Le conférencier a tenu à confronter les deux approches. Que l’on se situe du côté du Pan- africanisme - prôné par Alger- ou du Pan-négrisme -porté par Dakar, « la quête de sens, dans une articulation solidaire, doit primer sur les concepts de négritude, d’africanité », a estimé le Pr Boubacar Diop.

Le face-à-face entre ces deux approches est visible à travers la 1er édition du Festival mondial des arts nègres (FESMAN) en 1966 à Dakar et la 1ère édition du Festival panafricain d’Alger en 1969.

Pour cerner la problématique, l’universitaire a situé son propos sur deux questions : sur le plan linguistique et sur le plan politique.

Selon lui, il est important de comprendre d’abord ce que parler veut dire. « Pourquoi Négritude, Africanité », s’interroge-t-il.

A son avis, même si la légitimité des pères fondateurs n’est pas contestée, il est reconnu dès le 1er FESMAN d’autres mouvements pour contourner la négritude. Il est apparu en 1969 un autre pôle avec le festival panafricain d’Alger qui a fédéré des grands noms de la culture comme Pathé Diagne, Sembène Ousmane.

Chemin faisant, le mouvement de la négritude a connu une hibernation.

« On a assisté à une tentative de relance en 1990 mais cela n’a pas marché, explique le Pr. Boubacar Diop. C’est à la faveur de l’alternance politique en 2000 au Sénégal que l’on va assister à une relance effective ».

A quelques mois de la tenue de la 3ème édition du FESMAN (du 1er au 14 décembre 2009 à Dakar), Alger vit présentement au rythme de la 2ème édition du festival panafricain d’Alger. « Va-t-on assister à une nouvelle réplique de ce qui s’est passé, se demande le Pr. Boubacar Diop ou encore un débat cyclique aux enjeux politique et anthropologique ».

Dans ce cas de figure, une question toute basique apparaît. Pourquoi il y a deux festivals à la fois ? Nègre, Africain. Glisse-t-on vers des appellations d’origine incontrôlée ? « L’essentiel est de dépasser les malentendus dans un cadre de dialogue pour faire l’économie des télescopages afro arabe, euro africain, afro asiatique », souligne le Pr. Diop.

Celui-ci, dans son exposé s’est employé à définir l’origine du mot nègre qui a connu une inflation sémantique dans son évolution.

En transférant le débat sur le champ politique, on se pose la question de savoir pourquoi il y a hésitation entre Négritude et Panafricanisme. « La question est plutôt d’ordre stratégique et tactique », opine le conférencier. Avec des concepts, des notions sur les domaines d’intervention.

De l’avis de l’historienne Penda Mbow, le FESMAN doit relier la diaspora à ses origines africaines qui n’a pas la même orientation que le festival d’Alger qui est plutôt idéologique, politique et non culturaliste.

D’où cette préoccupation d’ordre stratégique. Comment se positionner par rapport au reste du monde ? Dans un tel contexte, la place de l’éclairage historique est capitale. Il s’agira d’ « enseigner correctement les faits des civilisations avec une démystification de l’autochtonie et faire attention à l’irrédentisme », suggère le Pr Boubacar Diop.

Une idée qui se résume en une unité du destin de l’Afrique pour la libération et le progrès.