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Politique

ALIOUNE TINE, SECRETAIRE GENERAL DE LA RADDHO SUR LE BOYCOTT DES LEGISLATIVES : « L’opposition doit faire une concession en reconnaissant la victoire de Wade »

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ALIOUNE TINE, SECRETAIRE GENERAL DE LA RADDHO SUR LE BOYCOTT DES LEGISLATIVES : « L’opposition doit faire une concession en reconnaissant la victoire de Wade »

Secrétaire général de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme, Alioune Tine, a entrepris une médiation pour renouer le dialogue entre le pouvoir et la frange la plus importante de l’opposition qui a décidé de boycotter les élections législatives du 03 juin prochain. Il demande aux deux parties de faire des pas en avant pour sauvegarder le modèle démocratique sénégalais. À cet effet, M. Tine exhorte l’opposition à reconnaître les résultats de la présidentielle du 25 février dernier, et au chef de l’État d’ouvrir des négociations sérieuses avec elles.

Vous avez engagé une médiation pour renouer le dialogue entre le pouvoir et l’opposition dont une frange importante a décidé de boycotter les élections législatives du 03 juin. Quelles sont les raisons qui fondent votre démarche ?

Quand vous êtes observateur d’une élection, vous observez toutes les phases : la phase préélectorale, la campagne, le scrutin et la phase post-électorale. Il s’agit de voir si les résultats sont tendus, s’il y a violence et qu’est-ce qu’il faut faire dans la phase post-électorale en cas de contentieux de tensions, si tu veux régler peut-être par les institutions idoines. Le Conseil constitutionnel s’est prononcé juridiquement. En principe, si les choses se passent bien, on demande à tous les acteurs d’accepter la décision de justice, rendue par le Conseil constitutionnel en disant que le président a gagné les élections. En tant qu’observateur des élections, nous avons fait l’observation, nous avons déployés 1300 éléments. On était dans tous les départements et pratiquement dans toutes les communautés rurales.

Nous avons constaté beaucoup de dysfonctionnements. Nous allons bientôt sortir notre rapport et nous dirons dans ce rapport toutes les difficultés qu’il y a eu. Nous avons dit clairement que, malgré les dysfonctionnements, ça ne pouvait pas changer, ni modifier les résultats de l’élection présidentielle. Si dans la phase post-électorale, il y a des problèmes, des risques de boycott, il est nécessaire aujourd’hui de prendre contact avec les acteurs politiques. L’opposition que nous avons rencontrée avec laquelle nous avons longuement discuté n’ignore pas les positions de la Raddho en tant qu’observateur.

Je pense qu’il y a une chose qui ressort de ça, c’est que le boycott, même s’il est envisagé par l’opposition, c’est la mort dans l’âme. Parce que quand on prend les partis politiques qui boycottent, c’est pratiquement le noyau des partis politiques avec le Pds qui, depuis les années 70, ont construit notre système démocratique et le système électoral actuel. Ce n’est pas souhaitable qu’il y ait boycott. Le Parlement sénégalais a eu sa crédibilité à partir des élections législatives de 1978 où, pour la première fois, il y a eu une opposition présente avec 18 députés. Pour la première fois, les députés de l’opposition ont commencé à initier de nouvelles pratiques parlementaires avec les questions orales et écrites, obligeant les membres du gouvernement à venir donner des explications de leurs politiques devant le Parlement. Je pense que ça a été une véritable rupture dans la pratique parlementaire de notre pays. Celui qui a initié cette pratique, c’est bien Me Abdoulaye Wade, président de la République actuel. Je pense que, pour le travail qu’il a fait pour la démocratie sénégalaise, il n’est pas souhaitable de l’affaiblir ou même de détruire le dialogue démocratique par une absence de l’opposition disons significative à l’Assemblée nationale. Nous avons également rencontré des proches du président de la République et des membres influents du Parti démocratique sénégalais avec lesquels nous avons longuement discutés. Des deux côtés, tout le monde estime que le boycott est une mauvaise chose pour la démocratie sénégalaise. Le Sénégal est quand même un pays qui, depuis les années 78-80, était considéré comme un pays phare, de référence pour son modèle démocratie en Afrique. Et c’est important que cet acquis qui fait la fierté de tous les Sénégalais soit maintenu et renforcé.

Les deux parties sont d’accord que le boycott n’est pas bon pour la démocratie. Mais l’opposition a posé des revendications sur la table.

Les revendications de l’opposition concernant l’évaluation de l’élection sont justifiées. Pour moi, elles doivent être considérées comme des revendications naturelles. Après chaque élection, il est tout naturel d’évaluer ensemble du processus, de voir ses points forts, comment les renforcer ensemble. Quels sont les points faibles du processus et examiner les points faibles ensemble et leur trouver une solution consensuelle. Si on le fait régulièrement après les élections, il me semble que les problèmes qui se posent avec les élections au Sénégal pourraient petit à petit trouver une solution. Le problème, c’est l’acceptation des résultats à la fin des élections et surtout la présidentielle. Nous travaillons sur l’évolution de la participation politique au Sénégal. Nous avons commencé à participer à des élections dans les quatre communes depuis 1848. On a commencé à élargir cette participation politique en 1948 où, avec l’acquisition de la citoyenneté française en 1946, tout le monde a commencé à voter au Sénégal. C’est en ce moment qu’il y a eu un règne sans discontinuité du Bps qui est devenu l’Ups et puis le Ps jusqu’à maintenant. Le Sénégal a une véritable tradition démocratique et électorale qu’on peut mesurer sur deux siècles. Cette tradition a évolué. Le Sénégal ne peut pas se trouver dans cette situation. Je veux dire que le Sénégal a comme un problème à entrer dans la post-modernité et à se renforcer dans la post-modernité. On est entré en 2000 qui est pratiquement la troisième alternance au Sénégal. La première, c’est en 1914, avec Blaise Diagne, la deuxième, c’est en 1948 avec Senghor. La troisième, c’est dans la période post-coloniale avec Wade. Il faut maintenant qu’on parte à une deuxième phase, une étape où dès qu’on termine les élections, tout le monde soit d’accord que les résultats de ces élections sont acceptés par tous. Parce que c’est le fait de ne pas reconnaître les résultats des élections qui amène les crises politiques aiguës et les conflits armés politiques en Afrique. Si on prend la Côte d’Ivoire, c’est ça. Regardez tous les problèmes qu’il y a pour organiser des élections en Côte d’Ivoire après le conflit. Au Mali, si tout de suite, les gens ne règlent pas le problème du fichier, il va y avoir des problèmes post-électoraux. On va y aller bientôt au Nigeria. Le Sénégal n’est pas le seul pays à être dans cette espèce de zone de turbulences en Afrique de l’Ouest. Il est bon que le Sénégal, en trouvant une solution, en même temps, montre la voie pour le reste de l’Afrique de l’Ouest. L’évaluation de l’élection présidentielle est nécessaire. L’examen des revendications de l’opposition est nécessaire.

Parmi ces revendications figure le fichier électoral. Pourtant ce fichier a été audité par les partis politiques…

Le fichier électoral a été audité. Nous avons participé à cet audit. Il y avait au moins deux membres de la société civile que nous connaissons avec lesquels nous travaillons : Mamadou Lamine Thiam et Théodore Ndiaye. À l’issue de l’examen du fichier, il y a un rapport qui est sorti pour dire qu’il est suffisamment fiable pour aller aux élections. Et je pense que si les gens sont allés aux élections, c’est parce qu’on a estimé à un moment que le fichier était suffisamment fiable. On a été aux élections, on a eu les résultats que l’on sait, il faut donc aller de l’avant, envisager l’avenir. Maintenant, s’il est nécessaire dire : écoutez, nous avons toujours des soupçons, malgré la tenue de l’élection, nous voulons qu’on réexamine le fichier, je ne vois aucun problème à le faire. Je pense que pour des questions de transparence et de confiance, l’accès au fichier doit être banalisé de manière à ce qu’il n’y ait pas de point de fixation sur le fichier électoral comme c’est le cas un peu partout, ce qui empoisonne franchement le climat politique de façon globale. L’accès au fichier ne doit pas être un problème. S’il n’y a rien à cacher, il faut y avoir accès. Pour nous, observateur des élections, si c’est la condition d’une confiance renouvelée pour le processus, il faut y aller.

L’opposition affirme que la Cena n’a pas fait son travail. Etes-vous de cet avis ?

Je n’entre pas dans ce débat. La Loi sur la Cena a été acceptée à l’unanimité. Je pense que c’est la loi qui fixait un tout petit peu les compétences de la Cena, sa fonction, son rôle et autres. En tant que société civile, on n’a pas été associé. Notre premier problème quand on a parlé de Cena, c’est pourquoi changer l’Onel qui a quand même fait son travail en 2000. Celui (Abdou Diouf) qui a institué l’Onel est parti avec la surveillance du scrutin par cette instance. Et mieux, l’Onel a fait école. Si vous allez au Burkina Faso, vous avez l’Onel. Le Cameroun a également l’Onel. C’est une marque sénégalaise, c’est important. Le deuxième problème qui est un peu implicite que les gens signalent, mais ils l’ont signalé trop tard, c’est le fait qu’à partir des années 1998, on a eu des ministres de l’Intérieur dits ministres de la société civile. Il y avait le Général Lamine Cissé qui a été remplacé par le Général Mamadou Niang. Les gens ont soulevé tard le fait d’avoir un ministre de l’intérieur membre du Pds. Ils l’ont soulevé a posteriori. Le coup est parti. Je pense qu’on peut en rediscuter tranquillement. Si la condition pour que la confiance revienne c’est de mettre un ministre de l’Intérieur indépendant, il faut l’envisager en toute sérénité. Pour nous, si les gens veulent changer la Cena, ils n’ont qu’à en discuter pour regarder ses points forts et les points faibles. Quand vous allez au Burkina Faso ou dans d’autres pays, le mécanisme de régulation de supervision des élections, le pouvoir de nomination n’incombe pas au président. Il y a des propositions du président de la République, du Parlement, des partis politiques. Ainsi, les différents membres sont nommés et la confiance règne. Je pense qu’il y a un critère de sélection qui relève de l’expertise des membres. Si vous nommez des membres de la Cena qui n’ont jamais observé des élections de leur vie, ça peut poser problème. Toutes ces questions doivent être examinées en toute sérénité sans passion pour voir comment on peut renforcer le processus de régulation.

Selon un journal de la place, le président Wade aurait demandé à l’opposition de reconnaître sa victoire avant de discuter avec elle. Quels sont vos commentaires ?

Nous pensons que chaque partie doit faire un pas pour aller vers le dialogue et sauvegarder les intérêts supérieurs de la Nation. Je pense que l’immobilisme n’arrange pas l’opposition, ça n’arrange pas le pouvoir, surtout le président de la République qui a quand même un programme extrêmement ambitieux à gérer. S’il veut décliner ce programme, ce ne sera pas dans l’instabilité que ce sera possible. Les positions doivent bouger en reconnaissant les résultats de l’élection. C’est ma conviction profonde et je pense qu’en le faisant, on va faire avancer les choses. Le président de la République doit non seulement accepter de recevoir l’opposition, mais également de discuter avec elle sur la base de ses propositions. C’est la solution qui nous permet d’envisager l’avenir avec optimisme et de faire également en sorte que tous les partis politiques et toutes les coalitions de partis puissent participer à cette élection législative pour qu’on puisse effectivement sauvegarder notre démocratie, renforcer le Parlement par la présence de toutes les sensibilités politiques du pays. Il me semble que si personne ne fait un pas, nous n’avancerons pas. Si l’opposition fait un pas, et franchement nous sollicitons de la façon la plus solennelle l’ensemble des leaders de l’opposition pour qu’ils acceptent les résultats de ces élections, je pense que ça serait un grand bond en avant pour la démocratie. Nous demandons en contrepartie que des concertations sérieuses entre l’opposition et le pouvoir se tiennent pour qu’à l’avenir on puisse avoir un processus crédible qui requiert la confiance de l’ensemble des acteurs politiques et qui facilite l’acceptation des résultats des élections législatives à venir et les autres échéances à venir.

Mais, est-ce que les deux partis auront le temps de faire cela si on sait que les législatives se tiennent le 03 juin prochain ?

La priorité des priorités, c’est de sauvegarder le modèle démocratique sénégalais. C’est avant tout de sauvegarder la cohésion nationale, c’est également de préserver la stabilité politique dans ce pays. Pour cela, il faut que tout le monde participe à ces élections. Pour sauvegarder tout, s’il nous faut reporter les élections, on n’a qu’à les renvoyer. Le président de la République est là. Que l’opposition le reconnaisse, il est là. Qu’elle ne le reconnaisse pas, il est là. Et c’est un interlocuteur incontournable de la vie nationale. Je pense que le minimum de réalisme recommande que l’opposition reconnaisse le président de la République pour qu’on puisse avancer.

 



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