ASSISES NATIONALES OU DIALOGUE POLITIQUE : POUVOIR ET OPPOSITION BUTENT SUR LA FORMULE

C’est au sortir de l’élection présidentielle de février 2007 que le fil, fragile, du dialogue politico institutionnel entre le pouvoir et l’opposition « dite » significative, s’est rompu. L’opposition, qui ne pouvait pas accepter, sans réagir, sa cuisante défaite, a exigé une rencontre avec le vainqueur qu’elle conteste pour discuter du processus électoral en général. Elle a persisté sur son rejet des résultats déclarant Me Wade vainqueur, à qui il demande en même temps une audience. Aujourd’hui, une ouverture est notée, car le pouvoir, par la voix du président de la République, se dit disposé à un dialogue politique et non des assises nationales, comme le réclame le Front « Siggil Sénégal ».

La mouvance présidentielle refuse tout diktat

Oui au dialogue, mais pas dans la contrainte. C’est la position défendue par le porte-parole du Parti démocratique sénégalais, Babacar Gaye. Pour le directeur de Cabinet politique du président de la République, c’est le pouvoir qui doit décider de la marche du pays, mais pas l’opposition.

Le porte-parole du Pds déclare que la formation libérale est favorable à la reprise du dialogue avec l’opposition. Mais il avertit que la mouvance présidentielle refuse toute contrainte provenant de l’opposition. C’est pourquoi, Babacar Gaye invite l’opposition à respecter « les institutions que les Sénégalais ont choisies librement et à reconnaître la validité de l’élection présidentielle et celle des autres joutes ».

Le porte-parole des libéraux rappelle que « le président de la République a accordé plusieurs audiences à l’opposition, malheureusement qui a estimé ne pas venir répondre ». « Je n’ai pas vu une volonté de l’opposition allant dans le sens de répondre à l’appel du chef de l’Etat », déplore-t-il.

Pour Babacar Gaye, la meilleure voie que l’opposition devait emprunter pour impulser une dynamique de dialogue, c’était d’abord de « reconnaître le président Abdoulaye Wade comme étant la clé de voûte de nos institutions et donner aux membres des autres partis politiques cette dignité politique qui fait qu’entre hommes politiques, on puisse dialoguer sur l’avenir du Sénégal ».

Babacar Gaye est revenu sur les faits qui ont conduit à la rupture du dialogue. « Après la présidentielle, il y a eu une cassure du fait d’une opposition qui n’a pas accepté sa défaite électorale, alors que dans toutes les démocraties, après une élection, l’élégance voudrait que le vaincu félicite le vainqueur, surtout que dans l’unanimité, les observateurs nationaux et internationaux ont estimé que l’élection présidentielle s’est déroulée dans le fair-play, une ambiance de paix et de respect des règles ».

Pour M. Gaye : « l’opposition a du mal à comprendre ce qui lui est arrivé, car elle espérait qu’un deuxième tour était déjà chose acquise sans tenir compte de la volonté des Sénégalais de poursuivre l’expérience avec le candidat Abdoulaye Wade ». « Cette contestation illégale et antidémocratique de l’autorité politique choisie par les Sénégalais allait conduire à une rupture entre la majorité et l’opposition. Surtout que l’opposition a poursuivi son entêtement en boycottant les élections législatives et sénatoriales », déplore-t-il.

Babacar Gaye est d’avis que l’opposition s’est trompée de schéma. Peut-être estimait-elle que la pression médiatique et les agitations allaient convaincre le pouvoir à de meilleurs sentiments, analyse-t-il avant de faire remarquer : « l’opposition croit que son rôle, c’est d’être devant, alors que ce sont les gagnants qui sont habilités à conduire les destinées du pays. Il y a un principe de droit administratif qui dit qu’il n’y a pas d’obligation d’agir pour les détenteurs du pouvoir réglementaire. Je prends cet exemple au plan politique pour dire qu’il n’y a pas d’obligation de prendre des initiatives pour celui qui détient le pouvoir politique », insiste le porte-parole. Et M. Gaye d’affirmer : ‘le moment venu, à bon escient, le président de la République prendra la décision de créer les conditions pour que le pouvoir et l’opposition se parlent ».

Il rappelle que le président avait déjà initié ce type de dialogue en voulant que les partis de la majorité discutent avec les partis de la minorité. Qu’est-ce que nous avons eu de l’autre côté ?, s’interroge-t-il, ajoutant que l’opposition a estimé alors que les partis politiques de la majorité n’étaient pas assez dignes pour être leur interlocuteur. « Cela n’est pas une attitude démocratique, parce que ces partis sont aussi partie intégrantes du champs politique », selon M. Gaye.

Pour le porte-parole, c’est à partir de ce moment qu’est intervenue la cassure, soulignant que le Pds et ses alliés étaient disposés à ouvrir des discussions avec l’opposition d’alors. « On avait même tenté de créer un comité paritaire et des correspondances ont été envoyées, mais, en retour, l’opposition a dit non en indiquant qu’elle veut discuter directement avec le président de la République », se souvient-il.